Aurora est une de ces artistes complexes qu’on adore interviewer et avec laquelle on pourrait parler des heures. Jeune fille de 20 ans, Aurora enchante son public à chacun de ses concerts, avec ses textes et sa musique dignes d’une chanteuse qui aurait 10 ans de carrière. Nous l’avons rencontrée au Barbès, le lendemain de son passage à Rock en Seine. Une rencontre que nous attendions depuis plus d’un an, après son concert à la Boule Noire.
Nous sommes très heureux de partager notre coup de cœur, auteure d’un album pépite : All My Demons Greeting Me as a Friend.
INTERVIEW SELFIE / AURORA
UsofParis : Tu semblais très surprise par le public à ton concert à Rock en Seine. Qu’as-tu ressenti ?
Aurora : Pour moi, c’était un de ces concerts parfaits parce que tu commences et c’est lumineux. Il y a encore la lumière du jour et il y avait beaucoup de personnes, mais pas trop. J’aime quand ça commence comme ça et que cela devient de plus en plus sombre, et que le public continue à arriver. A la fin, il fait complètement nuit, c’est magique.
J’ai toujours dit que j’adorais jouer en France, j’y ai fait beaucoup de concerts et ça a toujours été incroyable pour moi. Je sens qu’ici, le public me comprend. On comprend ma musique et mes mots quand je parle, le public rit même quand je ne veux pas être drôle, mais j’aime ça, ça me relaxe.
Tu as eu une année folle, entre la sortie de ton album, les concerts, Jimmy Fallon aux USA (huge!).Ce qui est assez rare pour une jeune fille ! Comment vis-tu ce succès ?
Je sais !
En Norvège, des fois on va nager dans la glace en hiver, on fait un trou dans la glace et on plonge dedans. Quand tu es dedans, tu as tellement froid ! C’est la pire et la meilleure chose au monde. Lorsque c’est fini, tu oublies que tu as eu si froid, parce que tu es dehors, sec. C’était vraiment intense lorsque tu l’as fait mais c’est du passé. C’est en quelque sorte comme cela quand tu fais toutes ces choses incroyables. Ça sonne vraiment incroyable lorsque tu en fais la liste et ça l’était bien sûr. J’ai juste fais mon métier et ce que je devais faire. Je ne suis pas vraiment nerveuse quand je chante, car c’est la musique.
C’est un vrai conte de fée pour moi quand j’en fais, mais une fois que c’est passé je ne pense pas vraiment à tout ça.
Ce métier était-il un rêve pour toi ?
Je ne rêvais pas de cela avant. Je voulais être une astronaute, peut-être une danseuse, une auteur.
Tu as déjà écrit 43 chansons, n’est-ce pas ?
Oui, j’écris des chansons tout le temps. J’ai toujours eu envie d’écrire. Même quand j’étais enfant, je pensais que je pourrais écrire des chansons pour les autres artistes. Je ne voulais pas vraiment être sur scène. Mais c’est arrivé. Et j’aime ça ! Ce n’était pas un rêve, mais c’en est devenu un.
Le New York Times t’a comparée à Björk, que penses-tu de ce rapprochement ?
Je ne sais pas. J’aime Björk. Je n’ai jamais vraiment écouté avant. Une fois que mon album est sorti, j’ai pensé que je devais écouter de nouvelles sortes de musique. J’ai acheté et écouté quelques albums de Björk.
Donc ce n’était pas une partie de ton inspiration ?
Non, car je ne connaissais pas avant. J’avais entendu parler de Björk. Je n’ai pas iTunes ou Spotify, je ne découvre pas la musique facilement. J’aime Leonard Cohen, Bob Dylan, Enya, la musique classique, les BO de films, j’aime la musique sans mot.
Être comparée à Björk maintenant je ne comprends pas vraiment parce que mon premier album est un peu électronique mais aussi organique. Mais je pense que nous sommes vraiment simples dans la façon dont on connecte les choses dans notre esprit.
Quand je vois un homme à la guitare je pense à Bob Dylan, mais Bob Dylan est Bob Dylan et cet homme à la guitare est cet homme à la guitare. Je pense que c’est bien de rappeler dans l’esprit des gens quelque chose qui existe, mais d’être aussi quelque chose de nouveau. Je veux être quelque chose de nouveau, c’est pour cela que je suis là.
Joan : J’ai vraiment aimé Murder Song…
Alex : Moi Conqueror…
Joan : J’aime beaucoup Conqueror aussi, mais tu ne l’as pas écrite seule, n’est-ce pas ?
C’est la première chanson que j’ai écrite avec d’autres personnes. En fait, je l’ai écrite avec deux personnes de mon groupe : Martin le bassiste et Magnus le batteur. Ils ont eu cet œil incroyable lorsqu’on a produit l’album.
Joan : Moi, je voulais parler de Murder Song…
Oh oui ! J’ai beaucoup de chansons tristes, c’est pour ça qu’ils m’ont dit : « essaie d’écrire avec d’autres personnes pour avoir des chansons joyeuses. »
Murder Song que j’ai écrite moi-même, est très triste, sanglante. Je suis très morbide. Je suis fascinée par la mort et le meurtre.
C’est quelque chose que tu as vécu ?
Hé bien, peut-être…
Je pense juste que c’est fascinant comment les gens peuvent être les mêmes personnes, comment toi et moi avons besoin d’oxygène, pouvons avoir des enfants, avons besoin d’être embrassé, avons besoin de nourriture, d’eau, qu’on nous sourit… On a besoin des mêmes choses car nous sommes des personnes. Et c’est juste fascinant que certaines personnes aient en eux l’envie de tuer alors que certaines personnes ne peuvent pas cueillir une fleur sans se sentir mal.
C’est à propos de ça que j’ai écrit Murder Song. Comment un homme peut tuer quelqu’un qu’il aime et cela arrive souvent dans le monde. Mais il ne comprend pas vraiment ce qu’il a fait, c’est une histoire très compliquée. Elle, elle ne voulait plus être dans ce monde, et elle savait que cet homme ferait tout pour elle. Elle lui demande de la tuer et lui dit : « Ok, je t’aime, je ferais tout n’importe quoi pour toi. » Une fois qu’il l’a tuée, il devient triste car elle ne bouge plus et il ne comprend pas où elle est allée. Il ne comprend pas pourquoi elle est partie et il pleure. Et c’est triste, car tout le reste de sa vie, il ne comprendra pas et sera triste.
Quel âge avais-tu quand tu as écrit cette chanson ?
18 ans ! 🙂
Tu as une communauté de fans très importante que tu appelles Warriors and Weirdos. En France, ils sont très nombreux. As-tu un message pour eux ?
J’ai tellement de choses à dire. J’aime mes fans. Ils sont incroyables ! Et j’ai l’impression qu’ils me comprennent. Je sais qui sont mes vrais fans, ceux qui voient plus en moi que je ne vois moi-même. Nous sommes les mêmes, peut-être des personnes un peu différentes. J’écris pour eux. Je remercie tout le monde de me soutenir, car j’ai besoin de ça pour être capable de faire ce que je fais. Mes fans sont les personnes les plus gentilles au monde. En France, je reçois toujours des cadeaux, ce qui est vraiment adorable.
Qu’est-ce que tes fans ne savent pas à propos de toi ?
Ils savent beaucoup de choses je crois. J’aime me doucher à l’eau froide. C’est pour ça que je n’aime pas les douches parce que j’utilise toujours de l’eau froide et un peu d’eau chaude à la fin. C’est bon pour la peau et ça me réveille.
Tu rencontres souvent tes fans avant ou après tes concerts, comme tu l’as fait hier à Rock en Seine ?
Quelques fois. J’adore rencontrer mes fans avant le show et aussi après le show. Des fois, ça prend une heure, même deux heures. Je n’ai pas toujours le temps, certaines fois je dois partir directement après le concert. Mais si j’ai le temps, je le prends pour aller discuter avec eux.
C’est facile de trouver le sommeil après un concert ?
Ça dépend. Quelque fois je suis tellement fatiguée après un concert où j’ai donné toute mon énergie, toutes mes émotions, que c’est très facile d’aller dormir. Et je dors comme un bébé. Mais si je sais que j’ai fait quelque chose de mauvais, ça me garde éveillée pour une semaine.
Si tu étais un conte de fées, lequel ce serait ?
Je pourrais faire partie du Seigneur des anneaux. Mais j’aimerais y vivre après que l’anneau soit détruit, pas avant, évidemment.
Si tu étais une chanson ?
Je pense que je serais une chanson calme et triste.
Children of the River de Secret Garden.
Si tu étais un chanteur ou une chanteuse ?
Iggy Pop. Je l’adore !
Si tu étais un film ?
Fantastic Mr. Fox, je viens juste de trouver ce film et je l’adore.
Si tu étais un mot ?
Dans ma chambre, il y a un poster avec des insectes et il y a un mot en dessous : Libellula Depressa. Je pense que c’est joli. Je ne sais pas ce que cela signifie. (N.D.R : c’est le nom d’un insecte la Libellule déprimée)
Quels sont tes futurs projets ?
Je vais faire un spectacle de cuisine ! 🙂 Non, je ne sais même pas cuisiner. Je brule même des spaghettis.
Je suis en tournée jusqu’au 19 décembre. Et le prochain projet est de faire un merveilleux deuxième album.
Tu as aussi passé des auditions pour des films, n’est-ce pas ?
Oui oui. J’aimerais essayer. Tout est possible. J’ai auditionné pour un film mais je n’étais pas inspirée par le rôle. J’aimerais jouer dans un film fascinant, peut-être une femme possédée.
Si Paris était une de tes chansons, laquelle serait-ce ?
Je pense que ce serait une chanson romantique. Je pense que Paris est cette ville dont les gens rêves avec des gens beaux, du rouge à lèvres rouge, du vin. C ’est aussi la ville de l’amour. Je pense que je l’écrirais du point de vue d’un homme dans la rue peut-être, comment il voit la ville où il vit.
Interview by Joan et Alexandre
AURORA
All my demons greeting me as a friend
(Capitol Music France / Universal Music France)
Aurora en concert à :
La Maroquinerie, le 24 octobre 2016