Isabelle Adjani revient sur scène après 8 années d’absence et avec un texte inédit de l’auteure américaine Carey Perloff. Deux défections – la comédienne espagnole Carmen Maura et le metteur en scène Julien Collet Vlaneck – la première de la pièce repoussée de plusieurs jours et un jeune premier, Niels Schneider, donnant la réplique à l’icône du cinéma.
Et si la révélation de cette création Kinship, au Théâtre de Paris, n’était pas là où on l’attendait ?
Nous avons hésité avant de partager notre avis sur cette pièce. Sans doute parce que notre attente n’était pas dissimulée. L’attente de retrouver l’interprète inoubliable de La Dame aux Camélias – nous sommes encore hantés par son dernier souffle de vie sur la scène du Théâtre Marigny – et de La Dernière Nuit de Marie Stuart. Deux destins historiques et tragiques pour sublimer l’incarnation de l’une des plus grandes actrices.
Sans doute parce que la déception n’est pas totalement digérée, plusieurs jours après notre venue.
Autant dire sans attendre que le choix de cette pièce Kinship nous laisse encore perplexe. Si Adjani voulait tant jouer Phèdre pourquoi n’avoir pas céder à l’appel du texte originel de Racine ? Plutôt que se restreindre à une sorte d’adaptation diluée de sa flamme et sordidement contemporaine.
La pièce met du temps à démarrer, les séquences sont très courtes et entrecoupées de changements d’accessoires – pas de décor, nous avons droit à un écran géant en fond de scène – un peu laborieux, longs et qui empêchent de rentrer pleinement dans le récit. La mise en scène n’est pas audacieuse.
Isabelle Adjani dissimule sa silhouette dans des vêtements trop amples, n’hésite pas le port de lunettes de vue et de soleil – pour quelles raisons ? Seuls ses pieds auraient droit d’apparaitre nus et sans fard. Avec cette obsession du contrôle de son image, la grande Adjani n’émeut plus, ne trompe plus le public qui serait capable de tout lui passer si elle osait un réel lâcher prise face à l’âge qu’elle semble vivre comme un malheur.
Pourrait-elle seulement prendre un jour exemple sur une Jeanne Moreau, une Danièle Darrieux, sublimes à tous les âges qu’elles ont traversés ?
Avec cette pièce, la belle Isabelle ne peut malheureusement plus être un exemple de jeu pour les apprentis comédiens qui se préparent à l’entrée du Conservatoire.
Face à elle, Niels Schneider l’interprète de Xavier Dolan – Les Amours Imaginaires – semble avoir perdu de son charisme en ôtant son aura cinématographique. Son interprétation est juste mais il ne donnera pas plus, le rôle étant finalement trop étroit pour lui.
La vraie surprise, vous l’aurez devinée, est la comédienne d’origine italienne Vittoria Scognamiglio. Celle que l’on n’attendait pas et qui doit prouver chaque soir sa légitimé à avoir repris au vol un rôle – qui avait été répété par une autre avant elle – est d’une incroyable justesse.
C’est à se demander si Isabelle Ajani n’aurait pas fait une erreur de personnage. Et si au lieu de jouer une nouvelle fois l’amante folle de passion, irraisonnable et désespérée, elle n’aurait pas dû choisir d’interprété la mère de Niels.
L’auteure Carey Perloff n’aurait-elle finalement pas réalisé tout simplement avec Kinship le fascinant portrait d’une mère aimante et effacée ? Si telle était sa volonté, alors la pièce a un réel attrait.
Vittoria Scognamiglio est à elle seule le meilleur des arguments pour motiver tous ceux et toutes celles qui ont réservé leurs billets et qui pourraient s’en vouloir de les avoir chèrement payé, après avoir lu plusieurs critiques mitigées ou vu passé un tweet virulent.
KINSHIP
de Carey Perloff
texte français : Séverine Magois
mise en scène : Dominique Borg
avec Isabelle ADJANI
Vittoria SCOGNAMIGLIO
Niels SCHNEIDER
du mardi au samedi à 21h
matinées le samedi à 16h et dimanche à 15h30
au Théâtre de Paris
15 rue Blanche
75009 PARIS