2014 a été un très bon cru pour Florent Marchet qui a sorti en tout début d’année l’album inspiré et désarçonnant Bambi Galaxy. Il y est question d’espace, de futur plus ou moins rassurant, d’idéal – avez-vous devinez lequel ? – Avec ces nouveaux titres, le chanteur semble avoir gagné en audace et sérénité. Prenant la route des festivals et des grandes scènes, il gagne, enfin, la reconnaissance qui lui avait sans doute manquer pour les albums précédents.
Il nous revient avec un ciné-concert original à partir de 3 ans, Rêves Cosmiques au cours du prochain festival DAYS OFF !
Nous l’avons rencontré, un soir au Nuba, tout en haut de la Cité de la Mode et du Design pour revenir sur l’ambiance de tournée avec un retour sur l’accueil de Bambi Galaxy. D’une rare générosité et élégance, Florent Marchet répond sans détour. Et c’est bien ce trait de personnalité qui nous attire depuis l’écoute du tout premier titre Tous pareils, grâce à la compil Inrocks, il y a quelques années déjà.
INTERVIEW
UsofParis : 2 dates au 104, un Printemps de Bourges, la Fête de l’Humanité, une Gaité Lyrique… Qu’est-ce qu’elle a de plus que les autres cette tournée ?
Florent Marchet : Cette tournée est différente sur le plan de l’énergie par rapport aux précédentes.
Avec les musiciens, cette fois on fonctionne plus comme un groupe. De par les couleurs de l’album et les intentions musicales, ça permet d’être plus punchy et du coup, faire de gros festivals.
C’est très agréable d’être multi-carte : faire des grosses jauges, des scènes en plein air, une première partie de Stromae et continuer la tournée des salles plus intimistes.
Et puis je pense que ça jouait moins bien avant. Il y a un meilleur groupe ! Ça n’a rien à voir avec les individus. C’est comme faire l’amour : il suffit d’une texture de peau, une odeur… Il y a la chimie des corps et la chimie musicale.
Il se trouve que les musiciens qui sont avec moi sur scène jouent bien ensemble. J’ai l’impression que l’on a un vrai son.
Comment s’est constituée l’équipe ?
On avait déjà joué pour la tournée de Noël Songs. C’est la nouvelle équipe qui était arrivée à la toute fin de la tournée Courchevel. Deux remplacements : le bassiste et le batteur. Et je trouvais que chaque fois qu’ils venaient il se passait quelque chose de nouveau.
La tournée de Noël Songs a confirmé mon sentiment et nous avons enregistré Bambi Galaxy ensemble.
J’avais envie pour cet album qu’il y ait une dimension live, pas par le son mais dans l’énergie. Car très souvent on enregistre un album et après on le monte sur la scène et on trouve que les sons sont plus énergiques.
On a travaillé les morceaux avant de les enregistrer. On a même fait quelques concerts dans mon studio pour essayer de chercher un son à l’album.
Y’a des morceaux qui ont été enregistrés live comme Space Opéra ou Où étais-tu ?
Qu’est-ce qu’ils t’apportent ces deux nouveaux membres ?
Le bassiste joue beaucoup de clavier basse, 09, un clavier analogique des années 70 et toutes ces basses très rondes avec filtres et distorsions. Ça apporte quelque chose de très organique.
Le batteur apporte quelque chose d’assez débridé, voire psychédélique par moments. Y’a un vrai lâchage.
C’est difficile d’expliquer pourquoi d’un coup on peut improviser au même moment, sans se concerter, ni même se regarder.
J’aime leur façon de se lâcher sur scène. Il y a quelque chose de plus sauvage qu’avant.
Est-tu toujours dans le même mood sur scène ?
Y’a deux choses qui me font peur dans le fait de monter sur scène, vraiment, qui font que je peux vomir avant : c’est jouer à Paris et dans ma région, et précisément dans mon village. Dans ces moments-là, je regrette vraiment de faire de la scène. Il y a des antécédents aussi : je passais à Paris et je ratais mon concert, c’était comme si je passais un examen.
Et dans ma région, j’ai fait les pires concerts de ma vie. D’où ma décision de ne plus en faire. Mais difficile de faire pareil pour Paris.
Cette fois, avec la préparation des concerts, je pense que l’on a bien réussi le 104 et le Printemps de Bourges. J’étais détendu, à l’aise. C’était très nouveau pour moi. Et je l’ai fait sans l’aide de la psychanalyse.
Ou de substances…
Non, pas forcément, j’étais un peu aidé… Par la cortisone à cause d’un problème de voix. Et il se trouve qu’elle a un effet incroyable ! C’est peut-être pour ça en fait. Je n’ai peut-être aucun mérite.
Le phénomène Stromae, avec qui tu as partagé la scène du Printemps de Bourges, t’impressionne ?
C’est assez fort de réunir autant de monde avec les thématiques qui sont les siennes. C’est un showman incroyable. Jouer avant lui ce n’est pas évident. Mais ça s’est très bien passé.
Et j’ai découvert, en discutant avec lui, que la chanson qu’il écoutait souvent dans le tour bus de sa tournée précédente était Benjamin. Finalement, Benjamin et Alors on danse, même si c’est les chansons sont très différentes, racontent une histoire un peu similaire. Il avait aussi vu le concert de Noël Songs à la Cité de la Musique.
Je suis sensible aux angles qu’il prend dans ses chansons.
Qu’as-tu ressenti face à l’accueil de Bambi Galaxy ?
C’est assez étonnant comme cet album a pu déstabiliser des gens qui me suivaient depuis longtemps. Ce qui m’a touché c’est quand les gens sont entrés dans l’histoire et dans l’aspect introspectif de l’album. C’est mon album le plus intimiste. Et pourtant, il n’est pas toujours perçu comme cela à cause de l’espace, l’aspect futuriste. On imagine que je suis à 100% dans la fiction.
Je n’ai jamais été aussi proche et en accord avec cette intimité qu’avec cet album-là. Et c’est bien souvent quand on avance masqué qu’on peut se libérer.
Je discute beaucoup après les concerts, j’aime le retour du public. Certains m’ont avoué : « on est passé à côté, mais comme on aimait tellement les autres albums, on y est retourné et tout d’un coup, on a trouvé la porte. » Je suis conscient qu’il faut du temps mais quand on a trouvé la porte on peut voit les relations avec toutes les anciennes thématiques. C’est juste le point de vue qui a changé.
Est-ce que tu regardes un peu le passé ?
J’ai rarement tendance à enjoliver le passé. Au contraire. Heureusement, j’ai des gens autour de moi qui m’aident à ne pas flinguer tous mes albums. Mais j’ai eu une période de plusieurs mois au cours de laquelle je dézinguais Rio Baril, sans l’avoir réécouter.
Parce que c’est l’envie de progresser, de se surprendre et de rattraper les ratés.
Par exemple, je garde un très mauvais souvenir de Rio Baril sur scène. Je n’étais pas heureux, pas accompli. La seule façon de faire la paix avec lui ce serait de le remonter sur scène, ce que je ferai peut-être un jour.
En fait, on doute jusqu’à la fin, enfin j’espère. Et si l’on doute plus, c’est qu’on aurait dû arrêter ce métier depuis longtemps. Ce qui fait que je remonte sur scène, que je fais un nouvel album, c’est l’impression que j’ai, à chaque fois, une nouvelle chance, de faire mieux que la fois précédente – en tout cas, être convaincu qu’on fait mieux, même si ce n’est pas le cas.
Food et musique, ça fait bon ménage ? (en référence à la soirée Foodstock à laquelle il a participé en juin dernier)
Je compare très souvent la gastronomie et la musique, ce sont sans doute les deux choses qui nous animent le plus. On a fait le tour certainement des saveurs en gastronomie et des plats, on ne réinvente plus grand chose et en musique également. Ce qui diffère c’est le point de vue et le fait de mixer les cultures. En musique, il n’y a jamais eu autant de styles différents qu’aujourd’hui.
C’est pareil en cuisine, ça fusionne. C’est ça la vraie nouveauté, et la gastronomie du futur !
Florent Marchet en concert à Paris :
Rêves Cosmiques à la Cité de la Musique – Festival Days Off 2015
dimanche 5 juillet à 15h et 17h
concert à Lyon le 17 novembre au Salle Molière