Avec son projet Lamomali, Matthieu Chedid débute une tournée aussi belle, classieuse, festive, intense, métissée, surprenante. A chaque nouveau projet, -M- crée la surprise. Sur scène, comme sur l’album, il est accompagné d’artistes en or : Toumani & Sidiki Diabaté, Fatoumata Diawara, Oxmo Puccino. Nous avons assisté aux premiers concerts aux Nuits de Fourvière.
Ce vendredi, la chaleur estivale est bien présente au sein des gradins du théâtre antique des Nuits de Fourvière. Et l’ambiance est festive ce soir, bien avant d’accéder à l’enceinte romaine.Une spectatrice motivée entonnait déjà le bal de Bamako dans le funiculaire. « Allez on chante !», dit-elle à ses amis. C’est parti pour le nouveau show de M : Lamomali
C’est une première fois pour moi et comme toutes les premières fois, je suis impatiente, excitée et intriguée de voir -M- sur scène. La seule initiale de son prénom et de son personnage emblématique des débuts suffit à le reconnaître de tous et toutes.
M ou plutôt Matthieu Chedid n’a de cesse de jouer et de se jouer d’univers musicaux différents allant de rythmes funky, rock, pop avec une grande facilité. Venu « en famille » l’année dernière aux Nuits de Fourvière, il nous emmène maintenant dans un univers musical métissé, empreint de sons africains. Accompagné d’artistes maliens au son de la kora, -M- va nous fait voyager, bouger, nous surprendre et peut-être nous émouvoir….
21h35 : Entrée de -M- sur scène
Il est vêtu d’un costume vert et or lumineux. Ses musiciens et choristes entrent sur scène dont Toumani Diabaté et son fils Sidiki avec leur kora et la chanteuse et danseuse Fatoumata Diawara. L’arrivée d’un quatuor de violons et de violoncelle surprend, ne voyant pas le lien avec la musique africaine.
-M- démarre alors son premier morceau Mama Sam : « non, je ne connais pas l’Afrique, la vie est une machine à fric… » repris spontanément par les spectateurs. Le quatuor commence à jouer. Sa musique semble se fondre avec les autres instruments, me faisant même oublier qu’ils étaient là.
Puis arrive « chui pas un homme, chui pas une femme, juste une âme » nous invitant à dépasser les clivages humains et à nous ouvrir à la spiritualité.
L’air du Bal de Bamako, titre phare de l’album, fait se lever l’ensemble des spectateurs qui se mettent à chanter : « Bal de Bamako, bal de Bamako, jtai dans la peau…» La participation d’Oxmo Puccino ravit la foule, le « village Lamomali » s’agrandit.
-M- : l’homme électrique
-M- a troqué sa guitare sèche contre une guitare électrique donnant ainsi une tonalité beaucoup plus rock qui se mélange au son du djembé, des koras ainsi qu’à la voix et à la danse envoutantes de Fatoumata Diawara. Il y a même un DJ aux platines qui nous emmène par instants dans un univers plus électro. Le morceau suivant Lamomali est encore plus surprenant démarrant par une interprétation rap de la chanteuse-choriste.
-M- a l’air de s’amuser comme un gamin. Il a le sourire aux lèvres, traduisant son plaisir d’être sur scène avec le public et ses partenaires.
Puis, l’effervescence laisse place à un moment intimiste avec Toumani et Sidiki Diabaté. Toumani nous invite : « Soyez les bienvenus à bord de Lamomali airlines dans laquelle il n’y a que l’amour, la spiritualité, le respect… » Toumani Diabaté nous relate l’histoire du Mali et de la tradition des griots qui se transmet de pères en fils afin de perpétuer le savoir par voie orale. Toumani et son fils Sidiki représente ainsi la 71ème et 72ème génération de griots. Le chant et la danse sont, quant à eux, réservés aux femmes. Sidiki se lance alors dans l’explication de la fabrication de la kora et la manière particulière de jouer avec les pouces. Puis Toumani dédie le morceau aux migrants qui sont décédés en mer, nous ramenant subitement à un côté plus sombre de notre humanité.
Il est environ 22h15 quand la pluie s’invite au programme. L’odeur de terre mouillée qui se dégage et la voix de Fatoumata Diawara me transporte en Afrique. « C’est à cause de la kora qu’il pleut ! C’est vrai, en Afrique, il en joue pour faire venir la pluie » me dit ma voisine.
-M- revient sur scène plaisante avec nous sur la pluie qui s’est invitée au programme « vous avez des ponchos ? Allez on va se réchauffer ! » Il entonne Onde Sensuelle qui nous donne immédiatement l’envie de bouger.
La superbe reprise de Balavoine « Qu’est-ce qui pourrait sauver l’amour ? » est comme un appel au monde qui vacille.
Suivent des morceaux plus intimistes, les spectateurs éclairent la nuit avec leur portable. La scène s’est transformée en décor lunaire, nous invitant à la rêverie.
Le morceau Manitoumani laisse apparaître une grande complicité et beaucoup de respect entre -M- et Toumani. La plupart des musiciens, chanteurs portent les fameuses lunettes lumineuses fétiches du chanteur.
Le groupe lance alors un air connu de tous mais totalement incongru « Vas-y Franky c’est bon ! » que le public s’amuse alors à chanter. Elle est tout simplement le prétexte pour Sidiki de jouer avec le public : « Allez on va remplacer Franky par Sidi.»
Lamomali : apothéose du voyage musical
Il est plus de 23h, le temps qui semblait suspendu a filé. -M- rend hommage à sa grand-mère Andrée Chedid, écrivaine et poétesse, qui a écrit les paroles de certaines de ses chansons. Il cite alors ses mots également repris par Toumani : «Toi, qui que tu sois. Je te suis bien plus proche qu’étranger. » C’est la clé de cette rencontre musicale et humaine. Le morceau Solidarité est chanté avec conviction et enthousiasme. C’est une grande humanité qui se dégage de ce voyage Lamomali, comme un pied de nez à tous ceux qui voudraient nous faire croire que l’étranger est une menace.
-M- nous remercie d’avoir pris part au voyage Lamomali, qui débute sa tournée à Fourvière. On sent alors la fin du concert arriver mais personne n’a vraiment envie que cela s’arrête. Tous sont réunis sur scène pour ce qui semble être le dernier morceau emblématique « Je dis M ». Ils nous saluent, les lumières s’éteignent. On croit l’aventure terminée mais c’est sans compter sur l’incroyable énergie de ce village Lamomali. -M- revient quelques instants plus tard «Vous êtes tellement chouettes et communicatifs, on s’est dit qu’on devait revenir » C’est reparti pour le Bal de Bamako ! Il est minuit, les gradins se vident, c’est la vraie fin cette fois-ci.
Je veux bien reprendre un billet à bord de Lamomali Airlines.
Je veux bien repartir pour ce voyage empreint d’humanité et de musiques, de couleurs aussi brillamment mélangés.
Je dis M !
by Emilie Jacquemier
Lamomali
Concerts du 09 au 12 juin 2017
Salle Pleyel
252 rue du Faubourg Saint Honoré
75008 Paris
et en tournée dans les Zénith de France