Un artiste qui crée un musée fictif exposé dans un musée qui n’en est pas un et dont l’œuvre est éclairée par une jeune médiatrice passionnée et tatouée. Ne cherchez pas : on est à la Monnaie de Paris et plus précisément au Musée d’Art Moderne – département des Aigles de Marcel Broodthaers. Et c’est totalement barré !
Finie la bonne odeur de la Chocolate Factory de Paul McCarthy. Place à une proposition artistique tout aussi déconcertante, originale et farfelue.
Feu Marcel Broodthaers, ancien poète belge reconverti en artiste et passionné de Magritte, a les honneurs de l’institution parisienne.
A la lecture des quelques lignes de présentation de l’expo, le doute était contagieux au sein de l’équipe. Armés de notre curiosité et maintenus à la surface de la compréhension par notre adorable médiatrice, Laurie, nous avons saisi ce qui à première vue n’est pas flagrant, apprécié l’esprit génialement anti-conformiste de cet artiste inconnu.
Nous avons aussi jubilé en pensant à toutes ces expositions d’œuvres contemporaines rébarbatives conçues sur du vide, vues par le passé et à qui on aurait dû tordre le cou.
Car ce que nous révèle Marcel Broodthaers c’est la mise en doute systématique de l’art, suivant ainsi les traces de Marcel Duchamp, à travers ce Musée d’Art Moderne – original et totalement fictif – dédié tout entier à la figure de l’aigle déclinée à l’infini et sous tous les supports. Ici l’artiste inconnu du grand public et qui pourtant parle à chacun de nous, joue à une brillante réflexion sur le monde de l’art.
Tout est mis au premier plan : les objets improbables comme les oeuvres. Et au final, qu’est-ce qui fait oeuvre ?
Est-ce que la représentation d’une toile d’Ingres ou de Manet sur une quelconque caisse en bois peut en faire une oeuvre d’art à part entière ?
Ainsi dans la section des figures, se trouvent pêle-mêle des sculptures, des écussons et autres tasses, miniatures à la figure l’aigle. Si bien qu’on s’y perd, d’autant plus quand on peut lire associer à chaque objet la mention : “ceci n’est pas un objet d’art“. Pour certains, il ne fait aucun doute mais pour d’autres…
On pense à Martin Parr, le génial photographe qui mélange dans ses expos à la fois tirages originaux de ses photos et objets en tout genre, si possible les plus kitsch possibles, à l’effigie de la Reine Élisabeth II ou du Président Obama.
Amusant de savoir que pour cette exposition à la Monnaie de Paris, chaque objet a été traité de la même manière et avec la même délicatesse, sans distinction de valeur.
Marcel B. a poussé la supercherie (en est-ce vraiment une ?) jusqu’à proposer son musée à vendre pour cause de faillite. Il n’aura pas trouvé preneur mais l’idée est géniale.
En sortant, on est gorgé de bonnes intentions : (re)devenir subversifs et clamer à quelques artistes et à certains commissaires d’expo que non ce qu’ils exposent à nos yeux n’est pas forcément de l’art – et même si ça se vend quelques millions.
Exposition Marcel Broodthaers,
Musée d’Art Moderne – Département des Aigles
Monnaie de Paris
11, quai de Conti
75006 PARIS
Horaires :
tous les jours de 11h à 19H
nocturne le jeudi jusqu’à 22h
nocturnes étudiantes
entrée gratuite pour toutes les étudiants
les jeudi 21 mai, 11 juin et 2 juillet à partir de 19h
Une réflexion sur « Marcel Broodthaers et son génial musée fictif à la Monnaie de Paris »