Le titre Hypnotized a fait l’effet d’une petite déflagration musicale au printemps dernier, alors que l’on n’avait plus de nouvelles du jeune phénomène de la musique électro acidulée qui avait fait danser plusieurs générations sur Wake Up.
Un nouveau visage, nouveau look et des tonalités plus fiévreuses.
YANIS a pris un aller pour Berlin, s’est plongé dans les nuits électro, a fait des scènes incognito. De retour à Paris, il conçoit L’Heure Bleue un EP chargé de 6 titres qui nous envoient dans les airs, prend une claque avec le chorégraphe Yoann Bourgeois qui lui inspirera le jeu d’équilibre de sa pochette.
Il pense déjà à retourner dans la capitale allemande pour un concert et a des pistes sérieuses pour un live à NYC.
En revanche, il n’est pas décidé à reprendre les cours de claquettes, après un mois de pratique assidue.
INTERVIEW SELFIE
Quelques mots sur l’ambiance de ce premier live L’Heure Bleue au Badaboum
à Paris.
YANIS: C’était fou ! C’était la première date après la sortie de l’EP. En plus on avait travaillé en résidence, 3 jours avant. On a retravaillé les lumières, le son.
Et les gens étaient incroyables, ils chantaient.
Je rigolais aussi sur scène parce que j’étais vraiment étonné. J’ai pris une claque.
Le public m’a mis une claque.
J’aime voir les gens danser et ils se sont lâchés. Je suis, en fait, hyper fier de tous ceux qui sont venus me voir. Je les soupçonne d’être des licornes, je ne sais pas en fait d’où ils viennent, s’ils habitent vraiment ici.
Sur ton profil FB, tu as écrit : “je ne trouve pas d’endroit plus bouleversant et rassurant que la scène.” Comment être rassuré quand on a autant d’yeux qui te regardent ?
(il me montre son tatouage œil sur l’avant-bras droit)
On m’a beaucoup regardé depuis que je suis tout petit. Donc ça ne me dérange pas étrangement d’être regardé.
Et je dessinais beaucoup d’yeux aussi quand j’étais petit. C’est d’ailleurs pour ça que j’ai cet œil tatoué.
Ça m’a toujours fasciné le regard de l’autre, une attention que l’on me portait très petit, déjà en maternelle. J’avais des relations particulières.
C’est pas des années incroyables la primaire, le collège. On me disait que j’étais “différent”. Et au final, c’est pour ça que j’ai fait de la musique. Il n’y a pas de jugement quand on est artiste. Et quand je suis scène, je sais pourquoi je suis là.
Je ne cache pas je suis stressé avant de monter. Mais c’est un lâcher-prise total pour moi.
Avais-tu un manque de la scène ?
Énorme manque ! Sans doute le plus difficile à gérer. C’est un shoot d’adrénaline, un peu une drogue.
Quel est le substitut ?
… En fait, on fait des chansons pour retourner sur scène ! 🙂
Tu t’es entrainé ?
Je suis en mode Rocky. Je monte des marches… Non, c’est pas vrai ! 🙂
Une émotion folle en tant que spectateur d’un live ?
J’étais au Festival Beauregard où j’ai vu Florence and the Machine. Elle a une énergie folle sur scène où elle prend le public pour ne plus le lâcher. J’étais dans la fosse. C’était fou !
Ce que j’aime chez elle c’est qu’elle retient aussi beaucoup mais elle sait aussi faire danser les gens. Je ne sais pas comment elle fait pour danser et chanter.
Une appréhension de revenir après
la longue absence ?
On en a toujours, comme pour chaque projet.
J’avais une vraie liberté de m’arrêter. On ne m’a rien imposé.
Finalement, je suis content de la façon où tout s’est construit. Avec Hypnotized, c’était un moyen de tester des choses.
Certains ne t’ont d’ailleurs pas reconnu !
C’était le but ! 🙂 Je suis plein de personnes différentes.
Dans quelle mesure était-il nécessaire de revenir à une autre identité et à ta propre identité ?
Ma vie a tellement changé entre ce que j’ai créé quand j’avais 13 ans. Sliimy était un personnage qui m’a protégé aussi. Ma vie a basculé depuis : l’indépendance, les voyages (Berlin, concerts au Japon…) et apprendre à me réconcilier avec l’autre.
J’ai été aussi entouré de beaucoup d’artistes. Sliimy, c’est un projet solitaire, réalisé dans une bulle, coincé, à Saint-Étienne.
En écrivant les nouveaux titres, ce n’était pas un alter-ego qui parlait mais moi.
Quand s’est produit le déclic ?
A Berlin ! Là-bas c’était neutre, personne ne me connaissait. J’ai découvert des lieux incroyables.
J’ai pensé à une autre identité. Mais quand j’écrivais les textes, je me disais que je ne pouvais pas les faire chanter par une autre « personne ».
Chaque chanson de l’EP évoque ce rapport à l’autre. Et c’est souvent un duo, une idée de communion, comme Hypnotized. C’est une histoire d’emprise. Craved, c’est plus dans la séduction.
Quels adjectifs pourrais-tu poser sur ton EP ?
Un EP assez planant. C’est pas évident de mettre des adjectifs.
L’Heure Bleue résume bien le projet. Cet entre-deux, où les couleurs changent. C’est aussi quelque chose de présent.
L’heure bleue a inspiré de nombreux artistes. C’est un instant contemplatif qui a touché les peintres aussi.
Qu’est-ce qui est berlinois dans cet EP ?
Berlin m’a influencé musicalement mais aussi personnellement.
Et y’a cette influence dans la pochette avec ce socle en béton, rigide, de la structure aussi. Et puis l’espace vide et épuré.
La ville m’a permis de faire le vide aussi. Ce n’est pas forcément une ville belle au premier abord. Il faut creuser. Et j’ai rencontré des artistes pas forcément Pop, plutôt indépendant et avec une grande liberté.
Et musicalement ?
Dans chaque titre, il y a une retenue. On ne sait pas forcément sur quel pied danser. Même chose à Berlin, il y a des choses très club, mais il y aussi des vibrations plus sombres. Et chaque titre, il y a une vibration assez sombre aussi.
Charlotte Le Bon a-t-elle accepté facilement de participer à ton clip ?
On se connaît depuis 7 ans, bien avant Canal +. C’est une artiste que j’admire.
Je lui ai proposé de participer au clip car elle a eu une expérience dure avec Messmer sur le Grand Journal. Elle ne voulait pas le refaire.
L’ambiance était plus posée. Ca a finalement été une thérapie pour elle et aussi pour moi.
Il y a l’idée de relaxation, d’apaisant. Il y a un contact avec l’autre, il faut accepter le deal.
Finalement, en préparant le clip, j’ai trouvé très peu de documents de vidéos, d’artistes contemporains qui avaient réalisé quelque chose sur l’hypnose. Très étonnant !
Qui est Apollo Noir avec qui tu as collaboré pour L’Heure Bleue ?
Il y a beaucoup de personnes avec des surnoms ou alter-ego dans mon entourage.
Ce qui est intéressant c’est qu’il n’est pas connu dans le milieu de la musique. Il est graphiste à la base. Le visuel nous rapproche aussi. Il ne me prend pas pour un fou quand je lui dis : « j’aimerais une chanson qui sonne bleu, ou comme une vague ». On fonctionne beaucoup avec les émotions et les couleurs. Dans la musique électro, c’est aussi très organique.
C’est une relation très forte. On a composé les sons ensemble. Et surtout, il collectionne les instruments vintage.
Et donc, c’est lui le clavier Jupiter (utilisé pour Thriller de Michael Jackson) ?
Tout à fait. On a travaillé sur plusieurs instruments différents. Les claviers ont une âme.
J’arrive le plus souvent avec des mélodies, des idées de chants. Et on bosse ensemble. C’est comme un labo avec plein de liberté. On est en train de composer de nouveaux de nouveaux titres.
Christine and the Queens est un exemple pour toi ?
C’est une fille incroyable. Je la connais aussi depuis longtemps.
Elle a construit son projet sur le temps. Et je suis admiratif car elle s’inspire de tous les arts sans aucune limite.
Elle est humainement incroyable.
Chacun s’inspire, entre artiste. On a des liens : j’adore aussi danser sur scène. On partage l’amour de la performance, de Michael Jackson aussi.
Qu’est-ce qui te manquait de Paris quand tu étais à Berlin ?
Une bonne baguette. Et du bon vin. C’est tellement franchouillard mais j’assume.
Et qu’est-ce qui te manque de Berlin quand tu es à Paris ?
La liberté dans la fête. Les espaces de danse sont plus vastes.
Paris, mon amour et Berlin, mon amant…
Une chanson pour pleurer ?
Je pense à une chanson des Rolling Stones…
Mais j’en ai une autre : The Cinematic Orchestra avec Patrick Watson, To built a home. Elle est dans le film The Tree avec Charlotte Gainsbourg.
Une chanson pour t’évader, pour quitter Paris ?
Ibeyi : River. J’adore le clip d’ailleurs. C’est très simple.
Une chanson pour aimer ? Ou tomber amoureux ?
Y’en a plein ! C’est tellement français, mais encore une fois, j’assume : La vie en est rose de Piaf. Ma maman me la chantait tout le temps quand j’étais petit.
La dernière claque musicale ?
Dernier album de Tame Impala, c’est incroyable ! « Cause, I’m man ». Leur premier titre me fait vraiment penser à Michael Jackson. Il aurait pu la chanter.
Interview by Alexandre
YANIS, EP L’Heure Bleue
Y&I Records
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CONCERTS :
10 mars à Liège (Le Reflektor – plateau avec We Are Match)
12 mars à Bordeaux (Le Rocher de Palmer)
18 mars à Avignon (Les Passagers du Zinc)
22 avril à Lille (La Péniche)
26 mai à Saint-Étienne (Le Fil)