NOSFELL nous revient avec un nouvel album studio gorgé de beauté bestiale, de poésie des cimes et d’imaginaire foisonnant. Sa voix nous avait manqué, sa douceur nous trouble toujours autant.
Après un opéra avec le dessinateur Ludovic Debeurme et une tournée de plus de deux ans avec le génialissime Octopus le spectacle du chorégraphe Philippe Decouflé, l’artiste au regard d’ange nous réapparait autre. Peut-être simplement parce qu’il nous laisse percevoir, cette fois, un peu de lui à travers des textes écrits en majorité en français. Le Klotekerg, cette langue si particulière des premiers albums vient, pour ce nouvel opus, seulement par petites touches pour rappeler l’incroyable sonorité de la partition de Nosfell.
Exclu : le chanteur se met en scène pour la première fois et pour ce projet à travers des vidéo clips dévoilés dans les prochains jours. Il est aussi impatient que nous de les partager sur sa page youtube. En attendant, le teaser et son interview :
United States of Paris : La sortie d’un nouvel album est-elle une source de stress ?
Nosfell : J’essaie de me déshabituer à enfanter dans la douleur (rires). C’est toujours un calvaire. Mais j’ai pris beaucoup de plaisir à enregistrer cet album. En ce moment, je suis comme un lion en cage. J’ai envie de jouer. J’ai envie de monter sur scène car le disque est fini depuis octobre dernier. L’attente est trop longue.
C’est à la fois du stress et je sens aussi que je tombe du nid : la mue est tombée et je dois refaire une coquille.
Y’a-t-il un avant et un après Octopus (spectacle de Philippe Decouflé) ?
Le fait de travailler avec et pour Philippe Decouflé, je me suis mis en mode « au service de… » Ce n’était pas un travail de commande classique. J’ai appris la tournée à 20 sur la route, l’esprit de famille, l’esprit de groupe, la cohésion de groupe. J’ai aussi appris à être plus à l’écoute des partenaires sur le plateau. Alors qu’avant je traçais ma route et mes musiciens en scène devaient me suivre. Cette tournée a été l’occasion de rencontrer un public qui ne me connaissait pas.
Cette collaboration a été en fait très bénéfique pour moi. Car l’univers que j’avais, celui des premiers albums, découlait du rapport que j’avais avec mon père. Il était polyglotte, il me parlait ce langage particulier, il fallait que je lui raconte mes rêves… Le travail avec Decouflé a été un sas de décompression.
Que t’apporte d’écrire et de chanter en français ?
Ce n’est pas tout à fait une première, puisqu’il y avait déjà 2 chansons dans mon 2e album, une chanson avec Daniel Darc dans le 3e et quelques titres en français pour Decouflé. J’avais envie de poursuivre cette recherche pour ce nouveau disque. La collaboration avec Dick Annegarn et Dominique A m’a un peu poussé au cul pour essayer de trouver ma musique. Ça faisait longtemps que je correspondais avec eux, par mails et puis l’envie de travailler ensemble. On s’est moins retrouvé sur la musique que sur le texte. Je me suis dit : « je ne vais pas laisser que les copains écrire en français. »
Mon langage me permettait d’aller dans des inflexions plus impressionnistes pour essayer de raconter et transmettre une histoire. En chantant en français, je peux lâcher prise. J’ai conscience de me dénuder un peu plus à travers les paroles de ce disque.
Qu’est-ce qui t’inspire dans l’écriture de Dominique A ?
Il y a un art absolu du double sens dans ses textes. Et une hyper-réalité qui est pour moi à côté de la réalité. Et c’est ça qui me fascine depuis toujours.
Ce qui est drôle par rapport au texte qu’il a écrit Dans les chambres fantômes, c’est que ça a été dur pour moi de ne pas être dans une sorte d’imitation. Car même à travers son texte, il y a une musique, il impose un rythme.
C’est pour cela qu’avec La mer ne dit rien j’ai essayé d’emmener les mots ailleurs. Je voulais voir jusqu’où il était possible d’aller avec ce texte. Les chansons de Dominique A sont un immense cadeau, alors qu’il était très occupé. Je l’admire.
Qu’est-ce qui est à l’origine de ces sentiments que tu chantes sur Amour Massif ?
Beaucoup de choses m’ont traversé pendant l’écriture de ce disque. J’étais en amour. Et pour ce disque, j’avais envie de continuer de raconter des histoires. Parce que je suis accro au concept. J’ai écrit plusieurs chansons, en ait retiré quelques unes. Et je me suis aperçu que tout parlait d’amour. Parfois charnel, parfois de l’amour filial, j’imagine aussi l’amour entre deux sœurs, un père et son fils…
En me retournant sur mon histoire, je me rends compte comme tout le monde que ce sentiment a toujours été quelque chose de difficile à transmettre. De dire à ses parents qu’on les aime. J’ai un rapport particulier avec mes frères et sœurs que je considère presque comme mes enfants car ils sont très jeunes.
Et c’est toujours très douloureux de savoir comment j’exprime ce sentiment. Massif c’est un peu comme une montagne que l’on admire, que l’on trouve belle mais qui est chaque jour changeante.
Mais l’amour peut mordre aussi !
Ah Cannibale ! (rires) Cette chanson m’a inquiété un bon bout de temps. Parce que je me suis demandé si ce n’était pas un peu kitsch quand même. Mais en fait ce qui me plaisait dans l’écriture c’est de pouvoir changer de rôle : ça peut être une femme qui s’adresse à un homme, et inversement ou un homme à un autre.
En fait, j’adorais ado et j’aime toujours Prince. Il parlait crument de sexualité. J’ai essayé de le faire un modestement avec cette chanson.
J’ai l’impression de redécouvrir ta voix. As-tu expérimenté de nouvelles choses vocalement ?
J’ai pas mal joué sur les hauteurs d’arrangement. Les chansons ont donc eu pas mal de vie avant d’être enregistrées. J’ai essayé de les chanter dans plusieurs tonalités avant de choisir la bonne. Pour savoir où je me sentais le mieux et même parfois là où je me sentais un peu plus en difficulté. Ce qui pouvait être excitant aussi dans le rendu. Que je ne sois pas toujours dans une assurance proche de la performance.
A qui as-tu fait écouter ton album en premier ?
Ludovic Debeurme, un ami très proche et dont l’avis compte beaucoup. C’est un excellent musicien qui peut être très critique. C’est comme un membre de la famille.
J’ai aussi tout de suite demandé à ma petite sœur. C’était aussi très important d’avoir son avis. Jo Dama je l’ai tout de suite inscrite dans ce processus. Elle a beaucoup aimé le disque.
Et avec ce nouveau projet, je pense vraiment que l’on va arriver à mieux se comprendre. Il y a des choses qui vont lui paraitre moins mystérieuses me concernant.
Avec Ludovic c’est plus technique. Il s’attendait à avoir plus de guitare sur l’album. Mais il adore les arrangements et Voix divine.