Totem, le spectacle du Cirque du Soleil actuellement à Paris, nous a tellement passionné que nous avons voulu en savoir plus. Avoir le regard d’un des artistes qui performent chaque soir pour éblouir le public. Et c’est Virginie Canovas qui nous dévoile les coulisses de cette production mise en scène par Robert Lepage. L’artiste est capable de voltiges aériennes absolument spectaculaire en compagnie de ses deux partenaires. Totem est prolongé jusqu’au 30 décembre.
INTERVIEW / Virginie Canovas
UsofParis : Comment décririez-vous Totem en quelques mots ? Et votre personnage ?
Virginie Canovas : Totem retrace l’évolution de l’espèce humaine dans différentes ères du temps. Mon personnage est une déesse bollywoodienne inspirée des pin-ups des années 50. Elle arrive à la plage et rentre dans un jeu de séduction et de compétition dans les airs avec les deux autres garçons. Nous exécutons un trio d’anneaux aériens qui demande beaucoup de force, de souplesse et de contrôle.
Qu’est-ce que ce Totem a de plus que les autres créations du Cirque du Soleil ?
Je dirais que la particularité de Totem est dans les projections sur la scène qui rajoutent vraiment une autre dimension au visuel. Elles nous transportent encore plus dans l’histoire.
Depuis combien de temps faites-vous partie de ce spectacle ? Combien de jours, de mois de répétitions ont-ils été nécessaires ?
J’ai commencé mon aventure sur Totem en août 2017 avant cela j’étais sur le spectacle Amaluna et Saltimbanco.
J’ai passé 6 semaines aux studios d’entraînement de Montréal pour apprendre le rôle où je m’entraînais tous les jours . Puis, j’ai eu 3 semaines d’intégration une fois que je suis arrivée sur la tournée avec 3 à 4 entraînements par semaine sur scène.
La plus belle émotion vécue avec le Cirque du Soleil ?
Difficile d’en sélectionner une après 10 ans d’aventures avec Le Cirque du Soleil. Mais je dirais que la première fois que nous avons présenté Amaluna devant un public à Montréal, c’était tellement intense… Faire partie de la création d’un spectacle est une expérience extraordinaire.
On donne tout ce qu ‘on a pour créer le meilleur spectacle possible, on y met beaucoup de nos idées artistiques et acrobatiques. Et l’expérience humaine acquise tout au long est juste magique et unique.
Alors la première fois qu’on présente le fruit de 6 mois de travail collectif, c’est comme si un rêve devenait enfin réalité ! Et le sentiment de fierté et d’accomplissement personnel est tellement fort que les mots sont durs à trouver pour décrire les émotions.
Le plus beau pays visité grâce au Cirque du Soleil ? Pourquoi ?
Virginie Canovas : Avec Le Cirque du Soleil, j’ai tourné aux Etats-unis, Canada et en Europe. Je dirais que l’Italie est au top de ma liste : les paysages, la culture, la gastronomie italienne, les gens…
Tout est simplement beau, bon et chaleureux là-bas. Le Lac de Côme est définitivement mon endroit préféré en Italie.
Votre astuce pour supporter au mieux un décalage horaire ?
Haha, le décalage horaire ? bonne question !
Je voyage beaucoup, de l’Europe jusqu’à Las Vegas où j’habite maintenant. Donc ce sont des longs voyages de 11h à 15h, voire plus des fois. Alors je dirai que dormir dans l’avion est une bonne première option. Une fois arrivé à destination, un bon repas sain pour reprendre de la bonne énergie. Et beaucoup d’eau car on est très déshydraté après un voyage en avion dû à l’air pressurisé qui est plus sec que la normale.
Et dernière astuce se coucher à une heure raisonnable. Rester allongé même si le sommeil ne vient pas ou plus, au moins le corps se repose.
Un conseil pour garder votre énergie chaque soir ?
Tout est dans la tête pour moi, c’est elle qui décide de l’énergie qu’on a ou qu’on veut projeter. Je me parle intérieurement de façon positive, je m’encourage, je me rassure… cela me donne confiance, canalise mon énergie et me rend forte d’une certaine façon.
Avant d’entrer sur scène, je fais des exercices de respiration qui m’aident à trouver mon équilibre, cela me calme et me booste en même temps.
Une anecdote personnelle ou professionnelle avec Paris ?
Paris est toujours une ville intense pour moi car ma famille peut venir me voir et pour certains d’entre eux c’est la première fois qu’ils voient un spectacle du Cirque du Soleil.
Je suis heureuse et fière de pouvoir leur faire vivre un bout de ma vie et de pouvoir les serrer dans mes bras après le spectacle.
C’est la plus belle des récompenses.
Le plus beau témoignage d’un spectateur que vous ayez reçu après un spectacle ?
Lorsqu’un spectateur me dit qu’il a vécu un moment unique, qu’il n’a pas vu le temps passer et qu’il ne voulait pas que ça s’arrête, je me dis : “mission accomplie, la magie du cirque a marché !”
Interview by Alexandre
Virginie Canovas est à l’affiche de Totem du Cirque du Soleil
jusqu’au 30 décembre 2018
du mardi au samedi à 20h matinée le samedi à 16h30 le dimanche à 13h30 et 17h
Parc de Bagatelle Bois de Boulogne
Route de Sèvres 75016 Paris
Bastian Baker a fait une halte à Paris pour la promo de son 4e album. En pleine tournée mondiale en première partie de Shania Twain, le chanteur suisse assure aussi bien en sourires qu’anecdotes autour de ses nouveaux titres dont certains ont été conçus à Nashville avec un célèbre producteur américain.
L’ancien hockeyeur n’a pas fini de surprendre.
Il sera en concert le 18 mars 2019 à la Maroquinerie.
INTERVIEW
USP : Où a été écrite Stay ? Quelle est l’histoire de cette chanson ?
Bastian Baker : Stay, c’est une chanson qui m’a pris le plus de temps à écrire de ma vie. Elle m’a pris trois ans.
Quand même !
Parce que ce n’était pas Stay quand j’ai commencé à l’écrire.
J’étais dans les rues de Melbourne. J’écris souvent des mélodies en me baladant, en marchant. J’ai des mélodies qui me viennent en tête et je les enregistre sur dictaphone. J’avais commencé avec “nana ni na na nana…“. Et j’ai un bout de texte qui a germé et il resté dans mon téléphone. Puis j’ai terminé la chanson l’année dernière à New York avec Vlad Holiday.
Je suis arrivé chez lui en studio le matin et lui ai dit : « j’ai ce truc que j’ai fait il y a trois ans à Melbourne ». Je lui ai chanté et il a trouvé que c’était vraiment cool. Du coup, on a commencé à bosser sur ça. Dans le couplet, ça parlait justement de ce côté de la balade dans la ville avec les lumières, un côté un peu vide que tu peux ressentir dans certaines villes.
C’est une chanson qui a voyagé de Melbourne à New York !
Du coup, on a on s’est inspiré de ma soirée que je venais de passer à New York. Et un peu de ce côté très éphémère de la vie de tournée, du fait que parfois t’aimerais bien rester un peu plus longtemps.
C’est comme ça que Stay est née.
Au fur et à mesure qu’on l’écrivait, j’enregistrais. Ça se passait super bien, je faisais une prise et puis on doublait. Finalement quand on est retourné en studio quelques mois plus tard pour essayer une version plus pro, ça ne sonnait pas mieux. Du coup, on a gardé les premières prises parce qu’il y a un côté assez nonchalant que j’ai rarement. C’est ça qui la rend un peu différente.
Tu rentres de tournée avec Shania Twain. Que retiens-tu de ces dates aux States ?
Il n’y a pas forcément de leçon à retenir parce que je n’ai pas l’impression d’avoir découvert quelque chose de forcément nouveau. J’ai quand même beaucoup tourné. Mais c’est vrai que là c’est d’autres dimensions. C’est une centaine de personnes sur la tournée. C’est dans le top 5 des plus grandes tournées de l’année avec Timberlake, Taylor Swift, Beyoncé, Jay-Z et Def Leppard. Et pour Shania Twain, c’est pour une tournée come back. Tu te rends compte de la légende que c’est. Je pense que ce que j’ai le plus appris avec elle c’est vraiment la relation aux fans. Elle prend le temps de faire monter des gens sur scène, de discuter même, malgré le fait que c’est une grosse production. Parce que pour des plus petits concerts c’est assez commun d’avoir des gens sur scène.
Surtout que c’est hyper millimétré les shows américains !
Super millimétré ! C’est vraiment à la seconde. Mais elle arrive à rendre ça quand même spontané. Je pense que c’est un objectif quand tu fais une tournée pareille : arriver à avoir ce côté millimétré mais en même temps le facteur humain qui reste hyper présent.
Et donc tu vas intégrer ça dans ta tournée ?
Oui ! Il y a beaucoup de choses que Shania Twain fait sur sa tournée dont je vais m’inspirer quand même.
Mais dans chaque concert que je vais voir, je suis le mec dans le public qui est plutôt les bras croisés en train de regarder ce qu’il se passe. J’ai découvert plein de trucs. Et parfois des trucs super simples. Je me souviens avoir vu Green Day au Montreux Jazz Festival. Les mecs faisaient des sauts… ils décollaient !
Mais ce n’est pas possible qu’ils sautent aussi haut. En fait, derrière leurs retours, ils cachaient des petits mini-trampolines. Ils sautaient dessus.
Du coup, ça donne une élévation. J’ai fait ça sur toutes mes tournées. Et chaque fois que des gens voient des photos de moi en train de sauter, ils disent “Mais c’est un truc de fou ! Il faut que tu fasses l’athlétisme !”
Qu’est-ce qu’il reste du hockeyeur en toi ? Que retiens-tu de ta pratique hockey pour ta carrière musicale ?
Bastian Baker : Bien sûr ! Je pense que c’est même une partie hyper importante. Il me reste la discipline et la motivation et aussi l’esprit de camaraderie. Ce côté très bon gars que le hockey a finalement. Et puis une notion de travail que tous les artistes n’ont pas forcément.
Se dire : “On sait ce qu’il faut pour arriver à tel ou tel succès et on va le faire“. J’ai encore des contacts avec pas mal de monde dans ce milieu, plein de potes qui jouent. Du coup, je vais vraiment voir les matchs avec plaisir.
C’était assez spécial pendant la tournée avec Shania parce que l’on jouait dans quasiment toutes les arénas de hockey et c’était assez génial pour moi. C’était un peu comme le parfait équilibre. 😉
Les critiques peuvent te blesser ?
Non absolument pas. Je pense que c’est probablement une de mes forces. Et même si quelqu’un de proche qui critique, ça ne me touchera pas forcément. Moi j’aime plutôt ce qui construit plutôt que ce qui détruit. Mais si c’est constructif, pourquoi pas… Après j’ai eu beaucoup de chance aussi, je pense que dans ma vie, j’ai lu trois commentaires négatifs sur Instagram. Je n’ai pas de haters, de fous furieux dont le but est de détruire ma vie. J’ai la chance de ne pas avoir tous ces côtés un peu négatifs que la musique véhicule parfois.
Pourquoi avoir sollicité Jacquire King pour cet album ? Qu’espéraitu qu’il t’apporte ?
Jacquire King estune légende. C’est un producteur vraiment reconnu. Il bosse avec des artistes que j’adore, j’admire et j’apprécie : King of Leon, James Bay, Of Monsters and Men. Il a bosé sur le prochain Shawn Mendes et aussi avec James Bay. Son album, surtout la section rythmique qu’il a mis en place, est un truc qui m’a beaucoup touché. D’ailleurs, c’est le même batteur que pour James Bay qui joue sur les trois titres que j’ai produit avec Jacquire King.
C’est aussi par Shania Twain que je l’ai rencontré. Après j’y avais été un peu au culot.
Comment ?
On a eu un rendez-vous un matin, j’ai pris ma guitare, je lui ai joué des titres et je lui ai dit “Je veux bosser avec toi !” Au début, on devait faire un titre. Finalement, il a vraiment bien aimé la vibe. On en a fait trois. Et puis, ça reste une expérience assez spéciale, assez unique.
Il y a beaucoup d’idées, de créativité, une manière de bosser vraiment très précises, bien à lui. Et donc c’était aussi la première fois que je me mettais un peu en recul. Parce que d’habitude, c’est moi qui produis.
Et ce qui totalement inhabituel pour moi : c’est de passer dix jours en studio pour enregistrer trois titres. En général, je passe dix jours en studio pour en enregistrer douze !
Quels titres avez-vous faits ensemble ?
Love on Fire, Down et Time. Je lui avais envoyé une sélection d’une soixantaine de chansons, et c’est les trois titres qu’il a sélectionnés. Ceux sur lesquels il a senti qu’il voulait bosser en fait.
Est-ce que Nashville a des vibes différentes d’une autre ville pour faire de la musique ? Ou c’est juste un décor avec des fantômes illustres ?
La vibe est un peu régie par la population. Il n’y a que des songwriters,des producteurs donc une sorte de centre de créativité absolument fou. Ici, n’importe quel mec avec qui tu vas bosser te dira qu’il a bossé sur Pink, Lady Gaga ou un truc de country qui marche.
C’est vrai qu’il y a vraiment un réservoir de talents assez fou qui te donne la possibilité, au quotidien, d’écrire des belles choses.
A Nashville, chaque jour, j’avais différentes cessions d’écriture. C’est génial parce que tu commences, tu ne sais pas où tu vas, tu trouves que c’est cool et finalement tu te perds. Tu arrives à la fin, tu as écrit une chanson et tu trouves que c’est la meilleure chanson que tu aies écrite de ta vie. T’es obligé sinon, ça ne sert à rien de l’écrire.
Tu peux le faire tous les jours si tu veux. Et c’est cette offre qui fait de Nashville la capitale de la musique.
Sinon, niveau personnel aussi, j’ai un de mes meilleurs potes qui joue au hockey dans cette ville : Roman Josi, un suisse. Il est le capitaine de l’équipe de Nashville. Du coup, mes journées se résument en : j’écris des chansons la journée, ensuite je vais voir un match de hockey. Je vais bouffer dans un bon restaurant et je vais boire des coups jusqu’à 3h du mat’. Et je recommence le lendemain. Donc c’est assez idéal. Mais faut pas rester trop longtemps. 😉
Quelle est la chanson la plus ambitieuse de l’album, celle qui a demandé le plus de travail, le plus d’arrangements ?
Down est clairement une chanson qui a nécessité beaucoup d’arrangements, où on s’est posé beaucoup de questions.
Un jour en studio, il y avait vraiment de gros doutes.
Finalement Down est la chanson préférée de chaque musicien à qui je fais écouter l’album. Dans les arrangements, dans la dynamique, il y a un truc qui séduit.
Quel est l’endroit le plus surprenant où a pu être composé ou écrite une chanson ?
Bastian Baker : Un lieu qui sort de l’ordinaire, c’est pour la chanson Six. J’étais à l’aéroport de Miami, dans la salle d’attente. Et le vol a été décalé d’une demi-heure parce qu’un des pneus avait crevé. Et c’est dans cette demi-heure là que j’ai écrit le texte. C’était un rush. J’ai écrit Day one, day two, day three. Il y avait un côté très méthodique et d’angoisse. Si l’avion n’avait pas eu de problème, il n’y aurait pas eu de chanson ! 🙂
J’ai bien aimé aussi So Low. Quelle est son histoire ?
A la base de cette chanson, il y a la relation que j’ai eue il y a quelque temps avec une actrice qui était passablement plus âgée que moi. Et un peu mon opposé. C’est à dire que j’aime bien boire un coup, elle ne buvait pas. Je suis très actif, nature… elle aimait plutôt rester à la maison pour lire un livre. On était vraiment super différents. Mais il y avait quand même cette attirance du côté extrême de l’un et de l’autre. Et c’est comme ça que j’ai commencé à écrire les couplets : “I fell in love with you, stil don’t know why. We’re total opposite…” C’était basé sur de nombreuses parties de cette courte relation que j’ai eue. Ça n’a quand même pas marché à la fin. 😉
Est-ce que tu vas lui envoyer le titre ?
A chaque fois que j’ai écrit des chansons grâce à des relations, j’ai envoyé la chanson à la personne.
Et son retour ?
Ca fait six mois qu’on ne parle plus. 🙂
En l’occurrence, elle l’aime beaucoup mais elle a une autre chanson préférée : Light & easy. Elle adore cette chanson !
Aussitôt terminé sa première tournée, Radio Elvis est reparti à l’écriture, renforcé par l’énergie du live et des plus de 250 concerts.
Le nouvel album Ces garçons-là est un écrin magnifique réunissant 11 titres virtuoses.
L’ensemble est porté par la poésie de Pierre Guénard et les compositions avec ses deux compagnons de route Manu Ralambo et Colin Russeil.
J’ai déjà le coeur accroché à New York, Prières perdues et La Sueurs et le sang.
Interview Radio Elvis
UsofParis : Que retenez-vous de la première tournée de Radio Elvis ?
Pierre Guénard : En 250 dates, on a appris à se connaître ! Colin, le batteur, et moi, on se connaissait déjà. On a fait le premier EP ensemble. Manu est arrivé sur la fin de l’enregistrement.
Dans un bus 9 places, ça crée des liens (ça peut aussi les défaire). D’ailleurs, ça a fait les deux. 😉
Au début, on n’avait pas les mêmes références, on s’est fait écouter des choses.
Et pour le deuxième album, on s’est rendu compte que l’on avait les mêmes envies, le même vocabulaire pour parler musique. C’est important d’avoir les mêmes mots pour parler d’un son.
C’est quand même très abstrait.
C’était ma première expérience de tournée, je découvrais tout. J’ai appris mon métier.
Vous avez fait de belles scènes !
Manu Ralambo : Le plus bel exemple : on jouait dans un joli théâtre de verdure au bord de la mer et le lendemain on se retrouvait dans une église à l’autre bout de la France.
Après la grande scène des Francos, on jouait quelques jours plus tard dans un champ, sur des tapis. Pierre : On a fait une tournée de villages où on montait la scène tous les jours !
Ça nous appris à gérer notre stress et surtout à savoir ce qui était important sur scène. On a eu toutes les galères possibles en concert. Et en fait, on s’en sort toujours ! 🙂
Faire un mauvais concert, ce n’est pas possible ! Notre métier, c’est de savoir gérer les imprévus. Manu : On trépigne là. On a envie de retrouver la route.
Un groupe, c’est un peu un couple. Quel type de couple êtes-vous ?
Pierre : On est un couple apaisé. Il y a eu des moments de tension même pendant la tournée. Il y a eu tout un automne compliqué entre nous. On galérait dans nos vies et aussi sur scène et on avait beaucoup de pression, avant la Cigale.
Nous avions 40 dates en trois mois. Et après la Cigale, ça nous a libérés. En fait, on est un couple organisé. Dans la gestion du groupe, chacun a vite trouvé sa place. Je m’occupe du RP, des médias, de l’image. Colin et Manu, plus de la partie technique. En plus, on trouve maintenant chacun notre place artistiquement, ce qui n’est pas forcément évident.
J’ai eu l’impression d’une énergie live en écoutant certains titres.
Pierre : L’album dégage plus de live car nous avons appris à jouer ensemble. On s’est plus lâché sur ce disque. On joue mieux depuis le premier, on a de meilleurs instruments et ça compte. Et on a enregistré sur bande. Au final, on a plus confiance en nous.
Prières perdues est un titre très fort !
Manu : Pour ce titre et La sueur et le sang, on s’est dit faut qu’on les fasse de A à Z sans rien couper. Jouer live.
Pierre : C’est une prise totale. On a fait venir un pianiste exprès en studio, Nicolas Subrechicot (le pianiste de Lou Doillon). Il a enregistré aussi New York, plusieurs titres. On voulait jouer en live. Donc on devait être quatre.
Pierre : Quelques titres de l’album n’ont pas été écrits en tournée, mais les premières phrases ont été écrites pendant, comme 23 minutes.
J’ai repris des vieux carnets.
J’ai commencé à écrire en octobre 2017 et on a commencé à enregistré en mars 2018, en 10 jours. On a tout composé en 6 mois. Il fallait vraiment qu’on s’arrête. Et que l’on joue pour nous.
Il y avait une urgence à dire les choses, sans trop réfléchir, se laisser aller dans la spontanéité et dans la confiance.
C’est très laborieux l’écriture des textes pour moi. Je réécris beaucoup. J’ai parfois un carnet entier pour une seule chanson.
Quelle est l’origine de Prières perdues et Fini fini fini ?
Pierre : Ce sont deux textes qui sont apparus en même temps, le 13 novembre 2015, le jour des attentats et le jour d’enterrement de mon grand-père. Sur la route pour rejoindre le groupe après l’enterrement pour un concert, j’ai écrit Fini fini fini. Et le soir, on dînait ensemble et on apprenait les nouvelles. J’ai commencé à écrire Prières perdues dans la chambre.
C’était aussi l’anniversaire de ma soeur. C’était très éclaté émotionnellement.
Et la vie en France a vraiment changé à partir de ce jour-là.
Le titre New York a-t-il été écrit sur place ?
Pierre : La grille d’accord s’est faite en tournée. On écoutait pas mal Kevin Morby. Cette grille d’accord m’évoquait ce musicien.
On faisait une session de défrichage dans les Landes, au Manoir de Léon, en studio. C’est le premier titre que l’on a commencé à travailler avec Fini Fini Fini.
On était hyper enthousiastes. Mais j’ai mis un an à trouver les paroles.
Ça nous évoquait tous New York parce qu’il y avait ce piano à la Mickael Nyman.
Une atmosphère un peu briques, des films de Spike Jonze, Arcade Fire, MGMT.
L’ambition pour cette chanson était d’en faire notre Ultra Moderne Solitude à nous. On adore cette chanson de Souchon, elle est magnifique. Ça m’a d’ailleurs empêché d’écrire car je trouvais toujours moins bien que l’original. Mathieu Lescop m’a aidé à écrire les refrains.
New York s’épuise, la musique ça épuise ?
Manu : Oui ! Je me souviens quand on s’est dit qu’on allait commencer à composer. Se mettre au piano, à la guitare, puiser, chercher. C’est de l’énergie ! Pierre : C’est une charge mentale dense, quand on entre en studio. Ne rien oublier de ce qu’on s’est dit, de ce qu’on a projeté.
On avait pas mal pris de notes, Manu aussi.
Quand j’ai fini mes voix, j’ai cru que j’allais faire une dépression. Parce que la pression, les contraintes. On n’a pas de studio à vie.
Un accident heureux pour ce nouvel album ?
Pierre : Le publison ! 🙂 Manu : On a enregistré dans un studio des années 90 où Noir Désir a enregistré l’album 666.667 Club. Il y avait une machine électro qui déconnait. Et notre ingé son s’est amusé avec “cette panne” pour faire des effets. Au final, il l’a mis quasiment partout. Pierre : Ce qui est heureux aussi c’est que l’on a fait avec les éléments qu’il y avait sur place : le piano à queue, rhodes bass comme The Doors, ça a donné la direction première de l’album. Denis Barthe, le batteur de Noir Désir, nous a prêté aussi le synthé Juno 106 avec tous les réglages de Des visages, des figures. J’étais subjugué.
Ça a participé à la magie de l’enregistrement.
Quel homme êtes-vous ?
Manu : Depuis l’enfance, je n’y pense plus trop. 🙂
On me dit beaucoup : “tu as une part de féminité“. Et je m’en fous ! 🙂 Pierre : Je n’ai jamais été pris pour quelqu’un de viril. Je me suis fait souvent traité de PD – alors que je ne voyais pas en quoi c’était une insulte. Il se trouve que toutes les références que j’aime sont souvent très gayfriendly. Et je plais beaucoup aux homos en général. 😉
A une interview sur mes séries télé d’enfance, j’ai répondu Xena la guerrière, symbole pour les lesbiennes.
Parfois, je doute. Avec ma copine, on en rigole !
J’aime bien les mecs. J’aime les beaux hommes, comme les belles femmes.
Pour le clip de Ces garçons-là, j’ai demandé qu’on filme le cul du torero, car je trouvais les lignes magnifiques. Et ça ne fait pas de moi un homo.
Je fais attention à mon image, c’est un défaut. 🙂
Je suis un homme qui se cherche beaucoup capillairement et vestimentairement.
Après The Weekend, un premier single dansant, léger et pop sorti en juin dernier, Charlie Winston nous présente son quatrième album Square 1.
Un disque plus profond qui aborde des sujets d’actualité mais aussi plus personnel. On y retrouve des sons pop, folk, mais aussi de tabla, de kora, de marimba chers à l’artiste qui nous emporte instantanément dans son univers. Joie, légèreté, mais aussi larmes d’émotions, les sentiments sont mélangés à la première écoute et c’est ce qu’on aime lorsqu’on écoute de la musique. De la bonne musique. Entretien passionnant avec un passionné.
Interview-selfie Charlie Winston
USofParis : Quel est le sujet de la chanson Here I Am ?
Charlie Winston : C’est à propos des échecs et du succès. Comment le succès n’existe pas réellement sans échec. Le problème avec la réussite c’est que t’as peur d’échouer.
C’est quelque chose que tu as vécu ?
A certains niveaux oui, mais je pense que chacun d’entre nous l’a vécu. Ce n’est pas nécessairement à propos de moi, c’est à propos du monde. La façon dont il est conçu.
On vit dans un monde où l’on va à l’école dans laquelle on nous enseigne à être au plus haut niveau, à réussir. Si tu réussis tes examens, tu réussiras ta vie, mais ce n’est pas la réalité.
C’est vrai pour certaines professions mais ce n’est pas pour la vie. La vie ce n’est pas avoir réussi chaque jour. C’est comme sur Facebook, tout le monde y montre la plus belle partie de sa vie. Ils ne montrent pas les mauvais moments. On aime donner aux autres de fausses impressions.
Tu étais un élève doué ?
Je n’ai pas vraiment réussi à l’école, je n’ai pas eu de bonnes notes là où je devais en avoir. J’étais lent, je faisais le clown. C’était ma façon d’aller contre ce système.
J’ai choisi d’être musicien. Même si c’était facile de l’être. Les choses sont devenues complexes et j’ai eu ce monde, cette machine construite autour de moi, j’ai eu beaucoup de conversations avec des gens qui sont dans l’attente de ce que tu dois faire ensuite. Et je continue de me battre contre ces attentes.
Maintenant, encore plus que jamais dans ma vie, je vois et je comprends que c’est très important d’échouer. Cet album pourrait être un échec dans les yeux du monde, mais pour moi ce n’en est pas un.
Pourquoi ?
Parce que chaque album que j’ai fait, c’est comme avoir une nouvelle famille, toutes les chansons sont mes enfants. Elles ne seront peut-être pas aussi populaires que d’autres chansons comme Like a hobo mais ça ne veut pas dire que c’est un échec pour moi. Parce que l’échec ce serait de vouloir les faire et de ne pas les enregistrer.
Here I am est peut-être ta chanson la plus personnelle ?
Oui, je pense que c’est la plus personnelle de l’album. Ça raconte une histoire au sujet de ma vie, à propos de qui je suis. Mais je pense que beaucoup de personnes peuvent se sentir proches de ce sentiment. Ne pas être très bon à l’école, ce n’est pas unique. Nous avons tous ce problème, tu peux avoir 16 ans et te sentir en échec parce que tu as de mauvaises notes mais ce n’est pas comme si nous allions tous avoir des jobs très importants. Il n’y a pas assez de jobs comme ça.
Tu devais faire un break avant de réaliser cet album, tes plans ont changé, que s’est-il passé ?
J’avais prévu un voyage avec ma famille pour partir vivre au Malawi. Quelques jours avant j’ai eu un gros problème au dos et j’ai dû annuler le jour du départ. Je n’ai pas pu marcher pendant deux mois. C’était une période assez difficile pour ma famille.
La belle chose avec l’art c’est que quand tu en as besoin il vient à toi. C’est pourquoi c’est assez dur de trouver du bon art de nos jours. Les gens sont plutôt heureux, on a probablement la meilleure économie que l’humanité n’a jamais expérimenté. On a de la chaleur quand on en a besoin grâce à l’air conditionné, de l’eau fraîche, de la nourriture dans un frigo. Tout est plutôt cool et les gens continuent de se plaindre. L’art n’est pas vraiment nécessaire comme il a pu l’être après la seconde guerre mondiale quand on a eu tous ces extraordinaires groupes dont on parle encore aujourd’hui. L’art ça vient quand tu en as besoin et j’en ai eu besoin donc c’est revenu à moi.
En juin, on a pu écouter The Weekend, une chanson catchy, pop. Je trouve que ce n’est pas très représentatif du reste de l’album. Pourquoi avoir choisi ce morceau comme premier single ?
Charlie Winston : J’ai eu cette conversation avec quelques fans, sur Facebook notamment. Je suis complètement à l’aise avec ce que tu dis. Ce que les gens ne voient pas – et c’est naturel – quand avec ma famille on a dû traverser ce moment difficile, ça a été si lourd qu’on avait vraiment envie de légèreté.
Quand tu vois tes enfants quand tu mets de la musique et qu’ils se mettent à danser, ils apportent cette légèreté dans tout. J’adore l’idée que danser c’est en quelque sorte une façon d’oublier.
C’est comme ça que la chanson est née. Cette chanson qui est très légère et lumineuse vient de quelque chose qui était beaucoup plus sombre, mais ce n’est pas expliqué et je ne voulais pas l’expliquer dans la chanson. Et après ça, il y a toujours les discussions avec le label. C’était la plus catchy, la plus radio friendly, ils pensaient que c’étaient le meilleur choix. Je voulais que ce soit Feeling stop en premier single, mais ils ont poussé fort, c’était presque une bataille 🙂
Contrairement à tes précédents albums, tu as travaillé avec une équipe sur Square 1. C’était difficile de lâcher prise ?
C’était génial ! C’est très représentatif de ma vie. J’ai lâché prise sur plein de choses. Je n’ai jamais mis de mots là-dessus. J’ai lâché prise sur le fait de penser à savoir où je vais. Je n’ai aucune idée d’où je vais. Ni si ma vie va aller quelque part, ailleurs.
Je suis rentré dans le studio, j’ai dit au groupe et à l’équipe que je voulais répéter pendant deux jours, juste jouer, pas enregistrer. A chaque fois que l’on jouait les morceaux du début à la fin, que ça s’arrêtait, quelqu’un me disait : « Qu’est-ce que tu veux faire ? » et je répondais « Je ne veux donner à personne la réponse »,
Un challenge ! 🙂
C’est devenu difficile pour moi. Après deux jours sans donner de directions, j’ai dit qu’on n’enregistrerait pas pendant encore une semaine, qu’on allait improviser et voir ce qui allait sortir de tout cela. Ce n’est pas moi qui ai dit comment faire, c’est la musique qui nous a dit comment faire à chacun de nous. La musique est née d’après de la musique que j’ai designé . Après tout ça je n’ai pas eu besoin de dire quoi que ce soit, chacun savait à propos de quoi l’album était, où il allait et je pouvais aller cuisiner le lunch pour tout le monde je savais que ce serait la même organisation.
Je travaille avec de bonnes personnes, mes musiciens sont extraordinaires, mes ingénieurs sont des ingénieurs haut de gamme qui ont travaillé avec beaucoup d’artistes. Je n’avais pas besoin d’être là et de leur dire comment être meilleur, ils font tous ça depuis des années. A partir du moment où ils ont compris la vision/conception tout était cool.
Que cela signifie Square 1 ?
C’est une expression qui veut dire : revenir au début. C’est lié à l’échec et au succès comme je t’ai dit au début. Il faut avoir une bonne relation avec l’échec, parce que si tu veux apprendre le piano, à jouer au tennis, une langue ou n’importe quoi d’autre, tu dois échouer. Chaque fois que tu fais une erreur, tu t’améliores un peu plus parce que tu t’en rappelles.
Ce qui est difficile c’est d’appliquer ça dans ta vie, dans une société où on te dit qu’un échec c’est une mauvaise chose et une réussite c’est une bonne chose. Tout le monde adore me demander : “Comment le succès a été pour moi ?” Mais personne ne me pose de question sur mes échecs. Parfois, avoir du succès c’est avoir eu un énorme échec personnel. Tu travailles si dur pour arriver à ce point, tu y arrives et ensuite tu vas où ? Tu dois retourner en bas et recommencer d’une manière ou d’une autre.
C’est ce que tu as fait avec cet album ?
Oui ! Enfin non. Ce n’est pas ce que je fais avec cet album, j’essaie d’avoir une meilleure relation avec cette notion, cette idée.
Tu as plusieurs chansons à propos de sujets d’actualité, es-tu un artiste engagé ?
… Je n’aime pas vraiment le mot engagé… Je ne me qualifierai même pas de musicien. 🙂
Mais tu l’es !
Bien sûr, parce qu’on doit mettre des noms. Je me qualifie d’artiste, parce que je dois créer, je dois faire de l’art, exprimer quelque chose à travers les sens. C’est ce que je fais, je travaille les sens. Il arrive que ce soit plutôt en musique, mais je peins aussi, j’ai passé une partie de l’été à peindre.
Si tu me qualifies d’engagé c’est comme si les gens avaient l’impression que je réfléchis sérieusement à comment sauver le monde. Mais je m’en fiche ! Le monde est foutu, admettons-le, on est tous foutus. On est en train de créer notre propre cercueil en étouffant la Terre. Je suis un optimiste mais je n’ai pas d’illusions. L’Histoire nous démontre que les humains font des erreurs massives.
Mais je suis juste un gars !
Peux-tu me parler un peu de la chanson Airport, elle m’a beaucoup émue ?
Juste après mon deuxième album, j’ai acheté une maison à Londres, je jouais beaucoup au piano et j’ai commencé à écrire cette chanson, mais seulement la mélodie. Je la jouais beaucoup. Ma femme était enceinte et elle n’arrêtait pas de me dire : « Il faut écrire cette chanson, il faut écrire cette chanson ! ». Puis j’ai complètement oublié cette mélodie.
En 2016, j’allais au studio tous les jours, j’y allais pour écrire, composer, trouver des idées et un matin j’ai dit : « Je vais écrire une chanson aujourd’hui et je ne partirais pas du studio avant qu’elle ne soit finie » et ma femme de me rappeler « Et cette chanson que tu avais l’habitude de jouer dans notre maison à Londres ? » J’ai pris un taxi, j’ai mis la radio BBC 4 et il y avait un programme à propos de la révolution libyenne. L’homme dans ce programme avait écrit un livre dans lequel il parlait du début de la révolution quand son père a dû quitter le pays. Il ne savait pas où son père était allé, il a commencé à le chercher. Le livre est à propos de son voyage et on lui a demandé de lire un extrait.
La première phrase qu’il a lu, je m’en rappelle, j’allais au studio et j’avais sa voix vraiment forte et il a dit : « My seat is bolted to the floor of the airport » et je me suis dit que c’était une si bonne phrase. Cette phrase dit tout ! Et j’ai beaucoup beaucoup été dans des aéroports, donc je connais ce sentiment.
C’est lié à une autre expérience ?
Oui avec les réfugiés quelques mois auparavant (voir le clip de Say Something), j’ai compris l’émotion en parlant avec eux, quand ils me montraient des photos de leurs maisons maintenant détruites. Tu ne sais pas vraiment si tu dois y retourner ou aller de l’avant. On a toujours ce moment dans les aéroports, même nous les Européens, on arrive à l’aéroport on a notre passeport, tout ce qu’il faut. Mais on n’est jamais certain de pouvoir partir car il y a des contrôles et on ne sait jamais ce qu’il peut arriver. C’est à propos de tout ça Airport, mais aussi à propos du sentiment d’être perdu.
Ton dernier concert ?
Massive Attack et Stanley Jordan, un grand joueur de guitare.
La chanson que tu aurais aimé avoir écrite ?
La chanson la plus moderne que j’aurais aimé avoir écrite est Human de Rag’n’Bone Man. Et une ancienne chanson ce serait It Ain’t Me Babe de Bob Dylan.
Es-tu toujours en contact avec Peter Gabriel ?
C’est marrant que tu me demandes ça ! Je viens juste de lui écrire un mail pour lui dire que ça faisait longtemps qu’on n’avait pas discuté. Mais je vois sa fille samedi, c’est une amie.
Zaza Fournier nous embarque dans un spectacle-musique original, déroutant et poétique. Le Déluge n’est pas à prendre à la légère tant il nous révèle à nous-mêmes. Mais il ne doit pas ralentir pour autant nos ardeurs à retrouver la chanteuse encore plus joueuse que jamais et prête à embarquer le public pour expérience musicale intense.
INTERVIEW
Quelle est l’origine de ce Déluge ?
Zaza Fournier : Ça a avoir avec un vrai petit déluge personnel.
Je lui ai laissé cours artistiquement lors d’une résidence. Je suis partie pour la première fois, seule, enfermée dans une maison proche du Bassin d’Arcachon. J’ai vu 2 personnes : la caissière du supermarché et le jeune mec qui vendait des huîtres qui rattrapait mon moral à deux mains.
Je m’autorisais des huîtres et du vin blanc à midi.
J’ai tout composé à la voix. Il y a eu un retour à la voix primaire, d’habitude je passais toujours par le vecteur d’un instrument.
Je me suis vraiment connectée à ma voix intime.
Le Déluge était présent dès les premiers jets ?
Bizarrement, tous les premiers jets sont restés. Il y a eu quelque chose de très évident dans l’écriture, ça ne m’était jamais arrivé.
La première chanson écrite est Pour que tu me voies, qui est la première chanson du spectacle.
Le fond est très concret, une chose que l’on a traversée, notre rapport au couple, à la fidélité, au désir. En revanche, j’ai vraiment écrit un conte pour adultes. Je voulais inviter un monde.
J’adore le titre Le Déluge. Est-ce que l’Orient s’est penché sur toi pour ce titre ?
C’est joli ! 😉
D’une façon plus large, je me suis connectée à ma voix ancestrale. Il y a une sorte d’harmonie sans âge qui s’est inscrite dans le chant tout de suite, dès la maquette. Je me suis sentie femme primaire au moment de la composition.
C’est ce que tu entends.
Je suis très associée à la chanson, ces harmonies je n’aurais pas pu les trouver en composant avec l’accordéon ou le ukulélé. C’est en ça que je parle de voix primaire.
Il y a aussi l’histoire de la femme dans le monde, la femme et son désir. Des questions anciennes.
Une punchline d’enfer pour inciter tout le monde à voir ton spectacle ?
Si tu veux que tes monstres retrouvent leur place, viens voir Le Déluge.
Le Déluge c’est aussi ouvrir de nouvelles voies artistiques ?
Je ne l’ai pas pensé comme ça, mais c’est ce que l’on me renvoie du projet.
J’ai l’impression qu’à chaque nouvelle proposition, j’avais ce retour.
Je vis ça comme une expérience renouvelée, un terrain de jeu total, ne me posant jamais la question du résultat.
Je laisse donc la possibilité à un résultat inattendu 😉
Ce spectacle, tu le portes depuis longtemps ?
J’ai la sensation que tout ce que j’ai fait ces 10 dernières années c’était pour faire ce spectacle. Bien sûr, je suis partie de la forme la plus légère possible, toute seule, à parler beaucoup entre les chansons. Et puis il fallut que je me concentre sur la forme guitare-basse-batterie pour attraper ma “légitimité de chanteuse“.
Ma dernière fois, on était deux sur le plateau et je tendais vers ce spectacle. Avec Le Déluge, j’assume d’où je viens, mes désirs de casser le cadre.
La femme en 2018 a-t-elle encore des choses à prouver ?
Je pense immédiatement à des femmes, sœurs, cousines d’autres pays, pour qui s’est un enjeu de chaque jour d’être femme et de tenter de trouver une sorte de liberté.
Sous nos latitudes aussi, en France, en Paris. L’actualité nous le dit haut et fort.
Il y a une violence latente auxquelles les femmes doivent faire face, mais les hommes aussi.
Ce qui est étrange dans cette violence-là c’est le poids de l’histoire que l’on se traine. Le regard de l’autre, le quotidien est un reliquat d’une violence sourde présente depuis l’origine.
Mélanie Doutey m’a répondu ne pas croire qu’un artiste est libre. Quel est ton sentiment ?
J’essaie de trouver ma liberté dans le fait d’être au plus près de ma singularité. Mais c’est remis en jeu tout le temps. Et il est très dur de s’échapper du cadre.
Le Déluge parle de ça : vivre c’est obéir à un cadre ou tenter de désobéir à celui-ci. Et là, ça dépasse le genre.
La liberté est quelque chose de conceptuel et tout à fait relative.
Le rapport au public a changé ?
Ce qui est différent, c’est que les chansons ne sont pas sorties. Les spectateurs sont dans la découverte totale. Au début, des gens sont déstabilisés, surpris, crispés aussi. Certains ont sans doute peur de l’endroit où je les emmène.
Mais le moment où ça se dénoue c’est hyper émouvant. Ça donne envie de jouir tous ensemble 😉
Le spectacle impose une écoute hyper active. Tout le monde est acteur du spectacle.
Mes chansons vont chercher quelque chose d’intime.
Je suis très émue de certains bouleversements.
Penses-tu que tu deviendras folle un jour ?
C’est une de mes angoisses profondes. Ma théorie : les fous ne sont pas fous et c’est nous les sains d’esprit qui sommes à côté de la plaque.
Ça nous pend tous au nez. J’ai un bon terrain.
Je pense que l’on est extrêmement facile et que c’est balèze de vivre. On est sans arrêt solliciter de corps et d’esprit. Et on tient, tout en gérant nos pulsions internes.
Qui tentes-tu d’imiter ?
Je ne parlerai pas d’imitation. Des gens m’inspirent beaucoup.
Un ami m’avait conseillé : pense aux gens que tu aimes entendre. Et c’est les gens que l’on dit fous que j’aime entendre comme Sébastien Tellier, Brigitte Fontaine.
L’œuvre de Brigitte me porte beaucoup. Il y en a peu des poétesses-artistes-interprètes totales, comme elle.
T’es-tu découvert le meilleur moyen d’évasion ?
Depuis toujours, je lis, trop, il parait.
Le monde ne m’intéresse pas tant et il est souvent plus intéressant dans les livres. Si c’était un métier, ce serait un truc qui me ferait de l’œil : lire toute la journée ! Ça ferait concurrence à la musique.
Garçons est une aventure révélatrice de ton autre part ?
Absolument ! Je suis vernie : j’ai le luxe d’explorer l’endroit de la masculinité qui est en moi. Quand on cherche dans la vie, on t’emmerde.
Tu fais un spectacle pour te révéler ça, on paie pour te voir : c’est une idée qui me réjouit beaucoup. De travailler avec d’autres artistes Carmen Maria Vega, Cléa Vincent et RaphaëlThyss notre musicien, ça fait énormément progresser, musicalement, vocalement.
Je ne voyais pas chanter Avec le temps. Non a été un réflexe et c’est Carmen qui me l’a proposé.
Yorina c’est un peu la Cendrillon des temps modernes. Couturière de formation, elle croise la route de sa marraine la bonne fée Dan du groupe The DO et depuis son destin a changé. De couturière à chanteuse, le destin est parfois surprenant !
Yorina n’a jamais chanté auparavant, ni joué d’instrument de musique. Pourtant, depuis cette soirée où elle a chanté devant quelques amis, sa vie a changé. Nous l’avons rencontré à l’occasion de la sortie de son premier EP Dry your tears sorti chez Barclay/Universal Music France.
Interview selfie / Yorina
USofParis : On t’a découverte en première partie du concert de Tamino au Point Éphémère. On avait adoré et c’est un vrai plaisir de te rencontrer.
Yorina : Oh merci ! 🙂 C’était le 3e concert de toute ma vie, c’était un peu fou. C’était génial, j’ai adoré. L’ambiance était super et j’ai beaucoup aimé Tamino aussi. Ce mec a un univers assez prenant.
C’est stressant ces premières scènes ?
L’avantage c’est que comme je n’ai aucune expérience, je ne peux pas vraiment appréhender encore. Je suis hyper contente tout le temps parce que je découvre plein de choses et que tout est nouveau. C’est génial tout ce que je vis. Je n’ai pas d’angoisse. Y’a juste le trac. Je suis hyper heureuse à chaque fois.
Sur ton EP il n’y a que 6 titres, que proposes-tu d’autre sur scène ?
En réalité, j’en ai pleins en stock. 😉 Pleins pleins pleins. Ça me donne une liberté folle, parce que je peux varier le set. Chaque set que j’ai fait était différent à chaque fois. Parce que j’ai une nouvelle chanson que je veux la tester. J’ai une liberté qui est assez cool. J’ai une problématique de luxe qui est : « Quel morceau je ne joue pas ? »
Ça a été dur de choisir les 6 morceaux de l’EP ?
Oui, c’est toujours difficile ce rapport avec les chansons comme j’évolue énormément parce que je débute. Ma voix évolue, mes envies aussi et mes mélodies… Il y a certaines chansons que je pouvais trouver vraiment géniales, il y a un an et puis maintenant je n’arrive plus trop. Comme ma voix évolue, elle ne feat plus forcément.
Les chansons de l’EP me portent pratiquement depuis le début pour la plupart. Je les adore depuis le début, je les défends à mort et elles ont évolué avec moi.
Ce premier EP annonce-t-il un futur album ?
Pour le moment, je ne sais pas trop. Tout ce qui est stratégie tant qu’on m’en parle pas je n’y réfléchis pas trop. C’est des choses que je verrais au fur et à mesure. Pour le moment, j’ai envie de faire vivre ce disque, vivre avec lui, le partager.
Je n’ai lu que de bons retours notamment la belle chronique dans Les Inrocks…
Je suis trop trop contente. Les retours sont vraiment cool. Et pareil aux concerts, je reçois tellement de bonnes ondes que je me laisse porter par ça. Je veux commencer humblement tout ça, petit à petit. Je ne vise vraiment rien, je vis au jour le jour.
Ton histoire est assez incroyable, tu n’étais pas du tout destinée à la musique. C’est arrivé par hasard. Quand tu étais petite, tu ne chantais pas ? Tu ne jouais pas d’instrument ?
Yorina : Je n’ai jamais pris de cours de chant, je ne jouais pas d’instrument. C’est vrai que c’est assez fou ! Je ne viens pas du tout de la musique. Je faisais de la couture avant. Mon frère jouait du saxo et mon grand frère de la trompette mais je n’avais pas un rapport à la musique direct.
Le rapport le plus direct que j’ai pu avoir c’est avec Dan de The DO pour qui j’ai fait des chemises de scène. Je cousais ses chemises et c’est comme ça que je suis un peu entrée dans le monde musical.
Mais ce n’était pas du tout mon truc. Je me suis retrouvée à une soirée avec lui, tout le monde a commencé à chanter, j’ai chanté…
Qu’as-tu chanté ?
Une chanson de The Beatles.
Et tout le monde s’est retourné, on m’a dit « Mais tu chantes ? »
J’ai répondu que non, je chantais sous ma douche mais je ne chante pas. Je suis couturière. Et Dan m’a dit qu’il fallait que je bosse ma voix car j’avais vraiment un truc. Il m’a donné un petit clavier et il m’a dit « Amuse-toi avec ça. Peut-être qu’un jour tu composeras ».
Il m’a appris les harmonies, les accords, il m’a fait une petite leçon de deux heures. C’est venu comme ça. J’étais dans un milieu artistique mais mon expression artistique y était beaucoup plus bridée. J’ai découvert une liberté, parce que c’était facile pour moi de composer et que c’était facile de créer des mélodies.
C’était simple, naturel et instinctif. J’ai découvert une manière de m’exprimer qui était incroyable. Il y a un truc émotionnel que je n’arrivais pas à avoir dans la mode. C’est vraiment une chance.
J’ai composé deux trois mélodies que j’ai envoyée à Dan. Comme ça à l’arrache. Je me suis dit qu’il allait se foutre de moi. En fait, il m’a poussé à continuer.
A-t-il eu besoin de te convaincre à un moment d’aller jusqu’au bout de la démarche pour en faire ton métier ?
C’était un peu bipolaire. A la fois, c’était très naturel, pour moi il y avait une logique pour qu’aujourd’hui ça entre dans ma vie et que ça devienne quelque chose de très important. A la fois, c’était tellement soudain, je n’arrivais pas à réaliser le sérieux de la chose.
J’ai commencé à composer en janvier 2015 et j’ai signé chez Barclay en août de la même année. Dans la même énergie que je finissais mes journées de couturière et que je composais ensuite, Dan finissait ses journées de boulot au studio et s’amusait ensuite avec mes maquettes. C’était un bon échange. Hyper frais. On n’a pas venu venir le tournant hyper sérieux de la chose. C’est lui qui a fait la démarche d’aller voir ses contacts. Avoir un retour c’était une curiosité énorme pour moi aussi. On avait une vingtaine de chansons.
Mais t’es passée de rien à boulimique de l’écriture. Tu as rattrapé le temps perdu ?
Je ne sais pas ce qu’il se passe dans le cerveau. Il y a vraiment des moments où j’ai besoin de composer. Il y a des phases aujourd’hui où je compose tout le temps. Pour moi c’est comme quelqu’un qui a besoin de danser. Il y a quelque chose d’hyper instinctif, d’animal, que je ne bride pas du tout.
Tu chantes uniquement en anglais. Pourquoi ?
J’ai plein d’origines différentes. Mon père est sicilien, pied noir, ma mère est allemande et russe. Ma mère me parle en allemand, j’ai fait des études en lettres. Du coup, j’ai un rapport aux langues assez développé. Ma culture est très ouverte. L’anglais vient de ça et du fait que mon influence musicale est vraiment anglaise.
Je suis fan absolue de Charles Aznavour et de parties de la musique française mais j’ai vraiment été bercée dans l’anglais. L’un des artistes qui me fascine et m’influence beaucoup est Bill Withers. Il y a aussi les grands classiques comme Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan, Etta James…
Dans la centaine de chansons que tu as écrites, il n’y en a pas une en français ?
Récemment ça m’est arrivé. J’ai fait une chanson où des paroles sont en français. C’était hyper difficile. Je pense que l’anglais, quelque part dans ce processus émotionnel d’exprimer quelque chose, me permet de filtrer. De parler en anglais, c’est moins face to face par rapport à ce que je dis.
Alors que c’est un EP très personnel, les chansons sont très intimes…
Mes lyrics sont très concrètes. Même si c’est très émotionnel ça reste très pragmatique. L’anglais m’a permis de dire les choses très simplement. En français c’était compliqué, comme c’est ma langue de base, il y avait un rapport pas assez distancé pour m’amener vers quelque chose de nouveau. Bizarrement aujourd’hui, je sens que ça nait, doucement. Ça ne veut pas dire que je vais faire un album en français mais j’ai fait plein de reprises toute seule dans mon studio en français. J’ai découvert aussi un truc dans ma voix en chantant en français.
Peut-être sur scène qui sait ?
Je voulais faire une reprise, une chanson de Maître Gims que j’adore. C’était ma première expérience en français. C’est la chanson Changer. De base, il y a plein de choses chez Maître Gims qui ne sont pas mon délire, mais il y a certaines de ses chansons où j’ai été prise.
On a eu un gros coup de cœur pour la chanson Dry your tears. Peux-tu nous en dire plus ?
Elle est hyper significative de ce que représente cet EP, c’est pour ça que je l’ai appelée comme ça aussi. J’ai vraiment, grâce à la musique et grâce à ses chansons, pu sécher mes larmes. Vraiment. C’est pour ça qu’il y a une certaine mélancolie, ça m’a permis de vivre en harmonie mon passé, avec les choses un peu dures que j’ai pu vivre.
Je suis passé par ces larmes et c’est ce geste de les sécher avec la main, j’efface, c’est tombé ça fait partie du processus. La musique c’était un renouveau, j’ai ouvert une nouvelle porte.
La chanson Waiting clôt l’EP. Qui est cette mystérieuse personne que tu attends ?
J’ai perdu mon frère il y a 5 ans d’un cancer, assez violemment et dans cette chanson j’ai voulu exprimer cette sensation que j’ai pu avoir après sa mort. C’est une période un peu de néant où on est en roue libre totale. C’était vraiment cette sensation, que j’ai encore aujourd’hui ce qui est assez fou avec le deuil, quand on pense faire le deuil mais qu’on ne le fait jamais en fait.
Je trouve que même dans les relations amoureuses où aujourd’hui on peut être encore imprégné d’une personne passée avec qui on n’est plus depuis des années. J’avais envie d’exprimer cette sensation d’attendre, c’est très passionnant je trouve. Cette solitude qui est liée à quelqu’un. C’est assez perturbant aussi.
Ton dernier coup de cœur musical ?
J’ai une fixette avec Kanye West et j’ai beaucoup aimé Sigrid.
A peine la tournée Esperluette avec Julien Doré bouclée, Arman Méliès s’est remis tout de suite à l’ouvrage, c’est son “besoin irrépressible” de faire des chansons. En attendant son nouvel album, il s’est offert un aparté féminin en reprenant Juliette Armanet, Blondino ou encore Fishbach. L’EP Échappées Belles a été enregistré dans son home studio, en un mois à peine. Pour ce projet, le chanteur a été tout autant excité à l’idée d’enregistrer les titres que de travailler sur la conception du disque.
INTERVIEW
UsofParis : Quelle est la chanson déclic de ce projet ?
Arman Méliès : La chanson de Blondino est l’étincelle de cet EP. Je l’ai découverte dans un magasin de disques par hasard, à l’époque de la sortie de l’EP. Je suis allé voir le vendeur, le disque n’était pas encore sorti.
Il s’avérait que c’était sous le label Tomboy de Mélissa qui travaillait sur ma promo.
C’est un titre qui m’a poursuivi.
Qu’a-t-il de spécial ce titre ?
Il me touche !
Dans un premier temps, c’était la musicalité, dans le magasin. La mélodie, la suite d’accords…
Petit à petit a germé l’idée que je puisse le reprendre un jour. Les reprises, j’en fais peu.
Je voulais rendre hommage à la nouvelle génération de chanteuses, avec des titres qui me suivent plusieurs mois, extraits de premiers albums.
Comment s’est fait le choix des autres titres ?
Essayer de trouver des chansons qui me touchaient. Et c’est un peu par hasard que ce ne soit que des chanteuses. Après Blondino, il y a eu Maissiat que je connaissais depuis longtemps.
Et en réécoutant mes playlists, j’ai remarqué qu’il y avait beaucoup de chanteuses.
Cela fait sens par rapport à notre époque, #metoo, le cinéma, moins en chanson. La question de la femme dans notre société est quelque chose de fort. Et cet ensemble faisait sens.
L’adaptation a été facile pour toutes ces chansons ?
Curieusement, le titre de Blondino n’était pas si simple à adapter. Je le jouais depuis longtemps pour moi, guitare-voix. Et quand j’ai commencé à travailler dessus pour l’enregistrer, je me suis rendu compte de petites subtilités que j’avais gommées mais qui faisaient tout le sel de la chanson.
Il y avait aussi un phrasé très important dans la rythmique alors que j’avais essayé de m’en détacher. Mais ça ne marchait plus.
La gageure était de trouver l’angle pour aborder chaque titre.
Des paroles t’ont touché ?
De manière générale, je suis toujours séduit par la musique, dans un premier temps.
Mais quand on plonge dans les titres, on se rend compte que ce n’est pas par hasard qu’on les choisit.
Le titre de Maissiat qui parle du deuil, fait écho à mon album Casino qui traite du sujet – je venais de perdre ma mère. Non seulement c’est la même thématique, mais il y a une sorte de poésie commune.
Et le thème du feu (chanson de Fishbach) était obsessionnel dans mon album Vertigone et dans d’autres disques. J’adorais ce titre sans savoir comment il s’appelait. Pour moi, c’était un signe, j’allais clôturer ce sujet. 🙂
Fichbach est un peu sulfureuse. Elle est aimée mais sa musique agace aussi.
Arman Méliès : Je trouve ça bien que la musique divise. Je trouve suspect quand tout le monde aime la même chose.
Je suis partagé par rapport à son disque : certains me touchent beaucoup et d’autres moins.
Certaines productions très années 80 ont tendance à rendre certains morceaux hermétiques, en tout cas, par rapport à ma propre sensibilité.
Ce qui est curieux, c’est que nous avons le même producteur.
Je l’ai vue plusieurs fois en solo.
J’ai découvert son titre l’Amour en solitaire grâce à Édouard Marie qui fait de la basse sur la tournée de Julien Doré. Elle n’était pas connue à l’époque et c’est amusant de voir comment il est devenu un hymne maintenant.
Je trouvais que c’était le titre le plus éloigné de mon univers. Il a fallu faire un pas de côté, trouver l’angle, avec les 4 saxos qui remplacent synthé et piano.
Pourquoi une sortie format CD et en édition limitée ?
Je suis très attaché à l’objet. La sortie digitale permet une grande liberté. On peut sortir un titre un album très rapidement. Mais en termes de qualité sonore et d’approche fétichiste de la musique, je trouve que c’est dommage de ne pas avoir l’objet.
Je voulais une sortie physique. Le CD est un support sous-estimé. Et je suis sûr qu’il y aura un retour de hype. J’adore le vinyle pour la chaleur du son. Mais en termes de panels de fréquences, entre un vinyle et un CD c’est sans comparaison.
Les infra-basses sur un CD sont sans commune mesure.
La chanson de Julien Doré la plus grisante à jouer sur l’Esperluette Tour ?
Porto Vecchio. On l’a jouée longtemps en début de concert puis après en version acoustique, en milieu de set.
Il y avait la version orchestrée que l’on avait fait de ce titre et l’excitation de débuter le concert. C’était un vrai plaisir.
Idem pour le dernier morceau du live, De mes sombres archives, en version très épique, post-rock presque.
Dernier choc musical ?
L’album de Jon Hopkins, Immunity. Un Anglais qui fait de l’électro. Il y a des plages ambiantes et d’autres plus rythmées. C’est vraiment très beau.
Dernier choc scénique ?
Son Lux vu à la Cigale, il y a 3-4 mois. Très impressionné par les musiciens. Une vraie maîtrise à tous les niveaux.
Un guilty pleasure ?
Un album que j’écoute en ce moment : YOB, du gros métal ! Un groupe américain qui fait de la musique pachydermique. 🙂
J’aime beaucoup aussi la musique agressive. Je la trouve très saine car elle fait appel à des pulsions en nous. Finalement, ça peut être apaisant. On est proche du confort fœtal.
Aurélien Mole est un artiste à la barbe qui change selon les saisons. Dans le cadre de l’exposition Déclassement au Château d’Oiron, il a conçu une série de cartels aussi discrets que barrés pour réinventer les œuvres de cette collection unique en France. Son brin d’humour et de surréalisme nous ont convaincu de la nécessité d’échanger avec lui.
Autre particularité, Aurélien Mole a une relation forte avec le Château d’Oiron qu’il a fréquenté jeune, en voisin, déterminant sa fibre artistique.
Rencontre
UsofParis : Une image forte du Château d’Oiron ?
Aurélien Mole : Ma première visite à 17-18 ans a été marquante. Ça a été la découverte d’un lieu et de son influence sur les œuvres exposées. Il y a une vraie alchimie entre les œuvres et le lieu. Je me souviens du fait de pousser des portes, l’absence de gardien et donc la liberté de déambuler, d’explorer.
Ça a déterminé toute ma carrière. Aujourd’hui, je travaille autour du concept de l’exposition.
Quelle a été ta démarche pour cette œuvre in situ ?
C’est une pièce ancienne que j’ai faite à différents endroits (Villa Arson…). Quand Barbara Sirieix, la curatrice de l’exposition, m’a invité, elle a parlé de déclassement, le fait de ne pas toucher au Château. Il y avait en fait beaucoup de contraintes dans ce qu’elle proposait.
Et j’ai proposé de réactualiser cette pièce, Un cabinet d’amateur. C’est une façon d’étirer les œuvres vers des dimensions fictionnelles.
Je ne fais pas d’œuvres autonomes. L’exposition est toujours importante. Mes cartels sont des sortes de collage par rapport à des œuvres déjà présentes et comment broder des fictions, comme une tapisserie.
Les cartels n’ont pas tous le même effet sur les visiteurs.
Il y a un rapport de vérification entre ce qui est écrit et l’œuvre.
Il y a une trentaine de cartels, certains vraiment très loufoques, d’autres se veulent explicatifs et aussi des ouvertures dans le fantastique.
Ça s’appelle Un Cabinet d’amateur en référence à Georges Perec mais ça s’inscrit vraiment dans l’idée de l’exposition de Jean-Hubert Martin – ancien Directeur artistique du château d’Oiron et conservateur général du patrimoine.
Comment écris-tu, face aux œuvres, sur place ?
Je connais bien les œuvres, je les avais en tête.
Mais, en général, je demande des photos, sans texte pour les autres lieux. Car les photos font sortir des points saillants de certaines pièces. Et c’est à partir de là que je peux commencer à broder des choses.
Je fais beaucoup de photographies d’expositions et je transforme les objets en image. Ainsi, je vois apparaître des choses dans les images qui ne se voient pas forcément dans les œuvres.
Connaissais-tu les autres artistes de Déclassement ?
Oui, je connaissais Hélène Bertin et Flora. Je les ai photographiées. En revanche, j’ai découvert l’Américain Tyler Corburn. Barbara Sirieix a un commissariat très peu formaliste. Les propositions sont très différentes d’un artiste à un autre.
Mais il y a plein d’échos, on s’en rend compte à posteriori.
Et puis, le château influence énormément le travail de chacun.
De quel artiste serais-tu le plus proche ?
Plutôt de Tyler Corburn, qui a une démarche plus conceptuelle, comme moi. Même si j’accepte de produire des formes.
En fait, je suis un conceptuel défroqué ! 🙂
L’œuvre qui te touche le plus au sein de la collection du Château d’Oiron ?
C’est compliqué. Je les aime toutes.
Je passais beaucoup de temps dans la pièce de La Collection de Mama W. Ça ressemblait peu à ce que faisait Daniel Spoerri.
J’aime aussi la pièce de Claude Rutault pour sa radicalité. Je la trouve assez forte, dans sa volonté de disparaître complètement.
La pièce de Sol Lewitt est aussi très bien placée.
L’humour est-il nécessaire dans l’art ?
“Il faut de tout pour faire un monde…” comme la chanson du générique d’Arnold et Willy. 🙂
L’humour n’est pas nécessaire. Mais il est important d’avoir un bon mauvais goût. Et dans l’humour, il peut y avoir quelque chose de l’ordre du mauvais goût. Réussir à cultiver quelque chose de dissonant est important.
L’humour peut être dissonant.
Par exemple, j’adore William Wegman et Buster Keaton, c’est à la fois très drôle et poétique.
L’œuvre de ta vie est-elle déjà réalisée ?
Ça peut se dire rétrospectivement. Je vise quand même un temps très long.
J’aimerais être un bon vieil artiste. 🙂
Il y a des artistes qui donnent tout jusqu’à l’âge de 30 ans et après ils restent enfermés dans le carcan formel. Et puis, il y en a d’autres, parce que découverts tard ou qui se remettent en question, qui a 70 ans ont encore des choses à dire. Ils charrient tout un pan d’histoire.
Tel un clin d’œil à notre enfance, la Pâtisserie des rêves a profité de la Fête des mères pour présenter sa toute dernière création : la charlotte aux fruits rouges. Imaginée par Étienne Leroy, on y retrouve toute sa sensibilité, sa douceur et sa passion.
Afin de vous garantir un avis sérieux et dans un souci de loyauté envers vous, nous avons repris trois fois de cette charlotte fondante, moelleuse, croustillante et savoureuse !
L’évocation de ce dessert m’a immédiatement replongé dans les souvenirs lointains d’une époque heureuse et insouciante… Un temps où j’aidais ma mère à tremper les biscuits à la cuillère (et mes doigts, soyons francs…) dans un gourmand sirop sucré. Quelle fierté nous avions avec mon frère lorsque nous démoulions cette charlotte. Un dessert de famille, à faire en famille.
C’est de ce constat qu’Étienne Leroy, chef pâtissier en charge de la création et champion du monde de la pâtisserie 2017, s’est inspiré.
Bien entendu, et pour notre plus grand plaisir, le niveau est différent !
Pour commencer, le fond sablé spéculoos-cranberry-zestes de citron est croustillant à souhait. Puis un appareil vanille-fève Tonka aux notes subtiles de Grand Marnier le recouvre. Cette crème infusée, toute en rondeur, contrebalance l’acidité des agrumes. Une délicate et fraîche compotée de groseilles, griottes, fraises et framboises l’accompagne. Enfin, l’aérien biscuit viennois rose est imbibé d’un sirop framboises-griottes-groseilles. Agrémenté de fruits entiers, l’ensemble est exquis…
Aussi, entre deux bouchées, nous avons eu le plaisir d’échanger avec Étienne Leroy.
USofParis : Pourquoi avoir choisi la charlotte ?
Étienne Leroy : Je pensais au gâteau idéal que je pourrais faire à ma mère. Cette charlotte, c’est pour elle. C’est un cadeau que je lui fais pour la rendre fière de son petit garçon. 🙂
Quel est ton processus créatif ?
En réalité, tout est question de rencontres humaines, d’échanges ou de voyages. Ces expériences changent tes idées ou ta façon de procéder. J’aime travailler avec les produits et ingrédients locaux. Par exemple, le citron que nous trouvons à Paris n’aura pas le même aspect ni la même saveur qu’au Japon. Du coup, pour une même recette, il faut s’adapter et recréer sans cesse. C’est très stimulant !
Devant une course à l’originalité, tu n’as pas peur de la surenchère ?
Mon but est de faire une pâtisserie afin de se retrouver. Si tu fais une combinaison très originale avec des saveurs uniques c’est super. Mais si tu es le seul à l’apprécier autour d’une table, c’est dommage… D’où l’idée de cette charlotte. C’est le gâteau emblématique du partage ! 🙂
Parfois, les petits bonheurs quotidiens nous rendant la vie plus douce portent de bien jolis noms : Paris-Brest, Opéra, Charlotte aux fruits rouges ou autres Saint-Honoré…
Ma meilleure amie était présente avec moi lors de la dégustation. Le sourire aux lèvres, le regard complice et les yeux pétillants autant que nos papilles, nous étions en train de nous créer un beau souvenir. Merci Étienne. 😉
Pour ne rien vous cacher, la chansonPas grandir tourne en boucle dans notre playlist depuis que nous avons découvert Barbara Pravi.
Après sa participation à la comédie musicale Un été 44 et les premières parties de Florent Pagny, la jeune artiste a sorti son 1er EP. C’est au lendemain de son concert au YOYO à Paris où elle assurait la première partie du Britannique Calum Scott que nous avons rencontré Barbara Pravi pour une interview pleine de bonne humeur.
Rencontre avec une personne passionnée et passionnante.
INTERVIEW-SELFIE / Barbara Pravi.
USofParis : Dans le clip Pas grandir, on découvre des images de toi enfant adolescente en train de chanter notamment dans ton salon. C’était un rêve d’enfant de faire ce que tu fais aujourd’hui ?
Barbara Pravi: Je crois mais je n’ai jamais pensé que je pourrais y accéder. Je rêvais d’être Céline Dion mais je me suis jamais dit que ça pourrait arriver parce que je suis quelqu’un d’assez consciente des choses et de la vie. Je ne m’étais jamais dit que c’était possible parce que, pour moi, il fallait soit être née dans ce milieu, soit avoir des connaissances, soit avoir pris des cours…
Tu ne sais jamais vraiment comment accéder au milieu de la musique, c’est très flou. C’est pas en chantant dans un bar ou alors c’est que t’as une chance de dingue et que quelqu’un te repère.
Tu as déjà chanté dans un bar ou tu t’es déjà inscrite à une émission de télé-crochet ?
Jamais jamais ! The Voice c’est une autre démarche. Je pense que je n’aurais pas du tout ma place là-dedans. En fait, je me considère vraiment plus comme auteure et comme interprète, mais interprète au sens un peu vieux du terme. Les gens qui font The Voice, je trouve que ce sont plus des techniciens de la voix. C’est des performers et moi je ne suis pas une performeuse.
Quel a été le déclic ? Qu’est-ce qui a fait qu’aujourd’hui tu as sorti un single et que tu prépares un EP ?
C’est le droit ! J’ai fait du droit après le bac, pendant 2 ans. Je l’ai fait pour mes parents. Je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire, j’étais un peu nulle à l’école mais pas assez nulle pour faire du droit. Je me sentais tellement mal et enfermée là-dedans que je me suis dit : « J’ai 20 ans, la seule chose que j’aime faire c’est chanter, je ne sais pas comment je vais faire, je ne sais pas comment y arriver. Je me laisse jusqu’à 25 ans. ». A l’époque je n’écrivais pas encore. Moi pour faire les choses, il faut qu’il y ait un déblocage dans mon cerveau.
Un jour, j’ai eu une amie au téléphone qui m’a dit « Barbara t’es trop débile, arrête le droit et fais de la musique! » Au moment où elle m’ a dit ça c’était une évidence. Avant ça, je n’y avais jamais pensé ou alors mon inconscient devait y penser.
Et tu as rencontré Jules Jaconelli ?
On s’est rencontré il y a 4 ans. Il revenait des USA et il voulait bosser sur des projets. Il s’était dit qu’avec un peu de chance il se trouverait une chanteuse ou un chanteur. On s’est trouvé et on a fait tout l’album ensemble. Je l’ai rencontré dans un bar. Je buvais des coups. C’était un hasard. On avait un ami commun qui était le responsable du bar. Je travaillais juste en face.
Pourquoi autant de temps ? 4 ans c’est long…
A l’époque, je n’écrivais que pour moi. Le temps de découvrir l’univers, de me découvrir dans les textes, la manière d’écrire. Je crois qu’aujourd’hui j’ai trouvé une façon d’écrire qui me plaît, qui me correspond. Mais ça prend du temps, parce qu’au début tu testes pleins de choses. On a fait 4 ans de chansons. Je suis partie de zéro, je ne suis pas arrivée avec mes textes. J’avance lentement mais j’avais besoin de ce temps.
Sur ta story insta, tu as partagé un mail de Monoprix qui disait que cela faisait 1 an que tu avais postulé chez eux et qu’ils retiraient ton CV de leur base de données…
Oui 🙂 il y a un an, j’ai dû faire une crise, une dépression 🙂 Ça fait 3 ans que je suis signée chez Capitol, ça fait 3 ans que je suis chez un label. Mais c’est très compliqué quand tu es signé comme artiste en développement dans un label parce qu’on est beaucoup. Il suffit que la personne qui dirige le label à ce moment-là ne croit pas en toi pour que tout le monde te mette de côté.
La personne qui m’a signé voulait faire une chanteuse, elle ne voulait pas que j’écrive. J’ai dit non et j’ai été mise de côté. Le patron a changé et a compris qui j’étais, ce que je voulais faire et depuis on travaille sur mon projet. En vrai, j’ai dû postuler chez Monop’ y’a 3-4 ans parce que depuis 2 ans ça va très bien dans la musique 🙂
Au Yoyo, on t’a découverte hyper à l’aise sur scène, tu as joué dans la comédie musicale Un été 44. Est-ce que cela t’as aidée ?
Alors pas du tout. C’est les premières parties de Florent Pagny je pense. Un été 44 c’était génial, c’était ma première fois sur scène. C’est très drôle mon parcours parce qu’à chaque fois que j’y repense j’ai l’impression que tout est hyper logique. Ça se fait par petites touches mais pour moi c’est absolument parfait.
J’avais jamais fait de scène et je crois que c’est le truc le plus difficile parce que tu es à poil, mais total ! Y’a plus aucun filtre entre ce que tu es et les gens ! Dans Un été 44, j’étais un personnage, tout est écrit et millimétré, tu débordes pas d’un cadre.
Quand tu connais ton texte, tes pas, tu n’as plus qu’à chercher les émotions en toi qui font que lorsque tu vas chanter tu vas toucher le public. Mais le jour où je me suis retrouvé à chanter mes chansons au Réservoir, j’ai passé 45 minutes, les mains crispées sur le pied du micro. Par contre, à force de chanter mes chansons devant un public ça m’a rendue plus à l’aise.
Tu as fait les premières parties de Florent Pagny, avec notamment des Zénith et Bercy. Impressionnant ?
Bercy, franchement c’est pas le plus impressionnant. Le Yoyo, c’est plus impressionnant parce que les gens sont debout, devant toi, tu les vois tous. Pour Florent Pagny, les gens étaient assis, la distance entre la scène et public est grande. c’est tellement grand que les gens tu ne les vois pas en fait, c’est une masse de visages un peu flou. Alors qu’au Yoyo tu vois tout, les expressions, les regards, les gens qui filment.
Est-ce que Florent Pagny t’as donné des conseils ?
Non mais il m’a fait beaucoup de compliments. Il écouté beaucoup lorsque je faisais ses premières parties et surtout mes balances. Il est très drôle parce que tu ne sais jamais quand il va arriver, il tape à ta loge et il dit (elle prend une autre voix et fait les mêmes mimiques que Florent Pagny) : « C’est précis ! La voix et très très précise ! Alors là vraiment je suis bluffé. » et il part.
Il est très très sympa, très présent. Il dit bonjour à tout le monde. Y’a peut-être 55 personnes qui bossent pour lui tous les jours, il dit bonjour aux 55 personnes. Je trouve ça génial. Pour moi, ça me paraît normal, il paraît que dans ce métier ce n’est pas normal, je trouve ça fantastique. Il est très humain. J’ai eu beaucoup de chance, entre Calum et Florent, j’ai une bonne étoile.
Dans les chansons que l’on a déjà découvertes tu parles beaucoup de ton enfance, du passé, avec une certaine nostalgie. Est-ce le sentiment que tu as lorsque tu as écrit ces chansons ?
Barbara Pravi : Ce n’est pas de la nostalgie dans le sens négatif du terme, c’est de la nostalgie positive. J’ai eu beaucoup de chance, mes parents sont encore ensemble, ils sont très amoureux, ils nous ont éduqué dans l’amour. Je me rends compte que je suis quelqu’un qui a besoin de donner beaucoup d’amour parce que mes parents m’en ont donné tellement. Du coup, je suis une grosse boule d’amour. Et je suis tout le temps de bonne humeur parce que ma mère est toujours de bonne humeur. Je n’ai rien à regretterdans mon enfance. J’ai eu une très jolie insouciance, j’ai toujours pu faire ce que je voulais. J’ai toujours pu être très indépendante dans mes choix. C’est de la nostalgie positive.
Même pour Louis ? Parce que tu l’as introduite de façon un peu brutal avant de la chanter au Yoyo : « La prochaine chanson raconte l’histoire d’amour que j’ai vécu avec un con… »
🙂 Parce qu’aujourd’hui j’aimerais me dire que je ne laisserais jamais personne me foutre un plan comme ça. C’est odieux. Il n’y a pas de nostalgie. Je me rappelle très bien du moment où j’ai écrit cette chanson et c’était de la tristesse. C’est ce moment où tu as l’impression que tu ne vivras plus jamais rien d’autre et que le sentiment est dévastateur. Aujourd’hui, ça n’en est plus mais à chaque fois que je la chante j’essaie de me souvenir de ce que je ressentais à ce moment là. C’est la première fois que j’écrivais en ne pensant pas journal intime mais poème.
Il sait que tu as écrit une chanson sur lui ?
C’est très drôle, parce qu’aujourd’hui on s’entend bien, je l’ai croisé y’a pas très longtemps je lui ai filé un EP parce que j’en avais un dans mon sac. Le lendemain il m’a envoyé une vidéo qu’il y a sur Youtube d’une première partie de Florent Pagny, où justement j’introduis la chanson de la même façon, et il m’a écrit « Je ne sais pas qui c’est ce connard mais franchement la chanson est trop belle ».
Qu’est-ce qui t’influence et t’inspire pour ta musique ?
Je me suis toujours inspirée des chansons françaises un peu ancienne. Edith Piaf, par exemple, ses textes sont fantastiques. J’écoute pleins de choses. J’ai envie de faire quelque chose de très populaire. La pop américaine réussi à faire des choses très réfléchies, pas du tout grossière et en même temps très populaire. En France, on a un bagage musical qui fait qu’on ne pourra jamais faire ce qu’ils font, au même titre qu’eux ne feront jamais ce qu’on fait nous. Il y a une balance à faire entre les deux. Un espèce de truc semi-français par les textes et semi-américain dans les sonorités et c’est vraiment ce que je recherche.
Comment as-tu rencontré Calum Scott ?
C’est nos labels qui nous ont mis en relation. C’était un petit pari car ils ne peuvent pas savoir si les artistes vont s’entendre et ils ont eu tout juste. On est vraiment en passion l’un pour l’autre. Love at first sight. Il m’a envoyé des « Je t’aime » ce matin, on s’adore.
Et vous avez enregistré un duo pour ton EP ?
On a enregistré « son » duo. On a fait You are the reason, en version franglaise. J’ai écrit la partie française avec Tomislav Matosin avec qui j’ai adapté Kid aussi.
D’ailleurs cette version de Kid d’Eddy de Pretto, tu l’as faite pour la Journée internationale des droits des femmes ?
Barbara Pravi : À la base, je l’ai faite parce que j’avais ressenti le besoin de le faire. Je l’ai faite 3 mois avant, Kid venait de sortir il y a quelques semaines. Il y avait l’affaire Weinstein avec toutes ces contradictions qu’il y avait sur les #BalanceTonPorc, #MeToo, et puis les mecs qui trouvaient ça ridicule. Certaines meufs aussi. Il y avait toute une espèce de polémique, contre polémique, anti polémique. Ça m’a semblé être une évidence de reprendre cette chanson. Dans la manière dont le texte est découpé et dans ce qu’il prône, je me suis dit que je pouvais faire la même chose pour les femmes. Et le 8 mars c’était le bon moment pour la sortir. Ça faisait longtemps que je pensais à la sortir, et surtout la sortir en image.
As-tu eu un retour d’Eddy de Pretto sur cette adaptation ?
Je sais qu’il l’a écouté et il m’envoyé un petit message sur Instagram en me félicitant.
En reprenant ce titre mais aussi Dommage de Bigflo & Oli, il y a un du féminisme derrière tout ça. Tu es féministe ?
Je pense qu’à moins que tu sois misogyne tu es féministe. Mais j’aime pas le mot. Le problème avec ça c’est que les limites sont très minces entre être super lourde et juste vouloir quelque chose de normal qui est l’égalité. Mais l’égalité c’est délicat parce que je trouve que le fait qu’un homme te tienne la porte pour te laisser passer c’est de la galanterie. Tu vois la limite ? L’égalité des salaires, le fait qu’on ait tous les mêmes chances de réussite ça c’est des vrais sujets. Dans le féminisme on colle pleins d’étiquettes et de faux sujets, pleins de faux problèmes. C’est là dedans que je suis féministe.
J’ai beaucoup lu le terme de « femme-enfant » lorsqu’on parle de toi, est-ce que tu penses que c’est un terme qui te correspond ? Parce que tu as une chanson qui a pour titre « Pas grandir », la presse t’a mise dans une case et je pense vraiment que ça ne correspond pas à ta musique.
Barbara Pravi : En fait, je me suis rendu compte avec le recul que ce titre ne me faisait pas forcément du bien. Juste le titre, le « Pas Grandir ». C’est dommage parce que la lecture profonde de ce texte est beaucoup plus impactante et beaucoup plus forte, c’est juste qu’il faut aller écouter jusqu’au deuxième couplet. C’est toujours ce même truc, quand tu es une nana sympathique, pas très grande, souriante et qui n’est pas tout en selfie, tout en « je te toise », tu es considérée comme un enfant. Non j’ai 25 ans, je suis une femme. Un femme avec des problématiques de femme qui a été enfant.
On est donc d’accord ! Tu as un univers visuel bien marqué, que ce soit tes clips, tes photos, cette présence des fleurs. On adore. C’est toi qui a eu l’idée ?
Barbara Pravi : Je fais tout tout tout. J’écris mes clips. J’adore l’image. J’ai bossé la pochette du single et de l’EP avec Anthony Souchet (Anthony Souchet a mis en scène Un été 44, il est aussi producteur et conseiller artistique notamment de Mylène Farmer). Je regarde pleins de choses, beaucoup de films anciens, et pour la pochette j’ai été inspiré d’Audrey Hepburn qui a une photo avec des fleurs comme ça.
Tu seras sur la scène des Étoiles le 28 juin 2018, qu’est-ce qui attend le public ?
Je vais proposer les titres que je fais d’habitude mais en version groupe. Pour les premières parties, je n’avais qu’un guitariste, là nous serons 3 sur scène. Il y aura les reprises d’Eddy de Pretto et de Big Flo & Oli. Et aussi des titres inédits.
Ton dernier concert ?
Eddy de Pretto à la Cigale, c’était vachement bien !
Ton dernier coup de coeur musical ?
Tim Dup, c’est un gars qui s’accompagne au piano et c’est très beau, c’est presque du slam mais en même temps il chante. Il a une manière d’écrire très à vif que j’aime beaucoup.
Ton duo de rêve ?
Céline Dion ! Mais je ne sais même pas si j’aurais envie de faire un duo avec elle. J’aurais peur que ça casse le mythe. Jacques Brel ou Nougaro… ou Edith Piaf. Putain je suis nulle je prends que des ieuv 🙂Bigflo & Oli !
Une chanson que tu aurais aimé avoir écrite ?
Dommage de Bigflo & Oli.
Ton guilty pleasure ?
Franchement Lorie et Priscilla c’est la folie. J’ai réécouté en tournée sur la route, mais c’est génial. Les prods de ces chansons sont géniales. Les premiers albums après ça part un peu en couille.
Une bonne adresse à Paris ?
Le District (80 rue Montmartre Paris II), c’est ma cantine le midi et Etsi (23 rue Eugène Carrière Paris XVIII)c’est un resto grec, le soir pour diner.
Ton endroit préféré à Paris ?
La cour carrée, au coucher du soleil, au moment où les lumières s’allument dans la cour, en plus y’a toujours un mec qui joue du violoncelle, c’est magnifique.