La légèreté ne tue pas. Alors quand elle est maniée avec brio, intelligence et menée par des artistes exceptionnels : le résultat (en)chante au point de poursuivre la chansonnette dans les rues de Paris – c’est ce qui nous est arrivé le soir de la générale.
Singin’ In The Rain a fait salle comble au Théâtre du Châtelet pendant 2 saisons et sera à de retour cette fois au Grand Palais à partir du 26 novembre 2017. Les spectateurs de cette production originale ont les meilleures raisons de réserver. Jugez plutôt !
Réducteur de ne retenir de Singin’ In The Rain que la séquence mythique de Gene Kelly sous la pluie, parapluie à la main, sauts dans les flaques d’eau sur un trottoir. Bien sûr cette séquence est attendue, même très attendue par le public parisien. Et on peut dire que l’ayant vue maintes et maintes fois en entier, en extrait, en parodie, la version de cette scène d’anthologie interprétée au Châtelet est incroyablement exaltante dans sa version sans claquettes et plus jazzy, une chorégraphie originale signée Stephen Mear.
Tout y est, c’est à la fois la même et une autre, par rapport à l’originale. La pluie tombant des cintres du théâtre confère une poésie assez inégalée pour un spectacle à Paris.
La performance de Dan Burton, interprète du rôle de Don Lockwood – l’acteur de films muets qui a quelques difficultés à passer au parlant – est convaincante. Pas de demi-mesure, le comédien-chanteur-danseur anglais se donne tout entier pour laisser le plus brillant souvenir de cette réinterprétation d’un mythe. Ce seul pari est gagné.
Broadway Rhythm
La comédie musicale inspirée du film de Stanley Donen et Gene Kelly est un show incroyable. Robert Carsen joue de l’humour et des situations cocasses du scénario original, convoquant la cinéphilie des spectateurs, le mythe d’Hollywwod(land) et de ses grandes stars. Les évocations visuelles du soir de première, des studios de cinéma, de scène avec rangées d’ampoules éblouissent. Pas de gros éléments lourds, juste ce qu’il faut pour transporter le public, avec des chorégraphies étourdissantes. Ça brille, ça claque…Et la tonalité noire et blanc initiée par le metteur en scène pour les décors et costumes confère un vrai raffinement à l’ensemble.
Mais surtout, Robert Carsen ne s’est pas privé d’utiliser le grand écran à très bon escient. Des séquences tournées avec les interprètes du show dans de beaux intérieurs de Paris et sa région (Hôtel de Ville, Versailles…) sont projetées sur l’écran blanc remplaçant le large rideau de scène tel un film muet avec accompagnement musical. Les close-up (gros plans) sur les acteurs sont imparables. On rit. La magie du cinéma des années 20 est transposée littéralement dans l’intérieur majestueux du Châtelet.
Robert Carsen ose même éclairer la salle en plein spectacle. Les applaudissements enregistrés pour les besoins de l’histoire finissent par se confondre avec ceux du public. L’action déborde même dans les rangs du théâtre de manière totalement romanesque, de quoi chavirer.
Make’Em Laugh, Good Morning, Broadway Rhythm, autant d’airs connus qui nous reviennent avec toute leur fougue et force de costumes (signés par le créateur oscarisé Anthony Powell) et des tableaux dansés originaux. Le rythme ne nous lâche pas pendant les 2 heures de ce spectacle.
Mention spéciale pour la performance de Emma Kate Nelson dont la voix de crécelle qu’elle prête à son personnage Lina Lamont ne manque jamais de piquant.
Les grincheux ne résisteront pas au final en cirés jaunes. Marianne James s’est levée pour la standing ovation. Plus de temps à perdre, c’est à votre tour.
SINGIN’ IN THE RAIN
Reprise du 26 novembre 2017 au 10 janvier 2018
Scénario : Betty Comden & Adolph Green
Chansons : Nacio Herb Brown & Arthur Freed
Direction musicale : Gareth Valentine
Mise en scène : Robert Carsen
Costumes : Anthony Powell
Chorégraphie : Stephen Mear
Décors : Tim Hatley
Dramaturge : Ian Burton
Lumières : Robert Carsen
Lumières : Giuseppe Di Iorio
Orchestre : Orchestre de chambre de Paris
Don Lockwood : Dan Burton
Cosmo Brown : Daniel Crossley
Kathy Selden : Clare Halse
Lina Lamont : Emma Kate Nelson
R.F. Simpson : Robert Dauney
Dora : Jennie Dale
Roscoe Dexter : Matthew Gonder
Rod & Tenor : Matthew McKenna
Zelda : Karen Aspinall
au Grand Palais
dans le cadre du Théâtre du Châtelet Hors les murs