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Elise Noiraud : faire de sa propre expérience une réalité pour tous #interview

Nous avons rencontré Élise Noiraud, auteure et interprète de Pour que tu m’aimes encore, à la sortie de son spectacle, joué jusqu’au 25 juin, à la Comédie de Paris. Chevelure bouclée et large sourire, la jeune femme a l’écriture fine et de l’énergie à revendre.

selfie exclu pour USofparis
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INTERVIEW

 

USofParis : Dans ton spectacle, on est émus, parfois aux larmes, mais on rit également beaucoup. Dans quelle catégorie devons nous le mettre ?
Élise Noiraud : C’est un seul en scène, avec un texte de théâtre. Ce n’est pas un one woman show comique, avec une blague à chaque réplique. Il jongle entre l’humour et l’émotion, avec parfois quelques répliques noires. C’est important de mêler les genres, je travaille sur comment l’intime rejoint l’universalité. Ça ne peut pas être que triste ou que comique. Je veux que le texte fasse effet de miroir à la réalité de tous.

Quelle est la part de vérité dans cette histoire ?
Tout est vrai et faux en même temps. Les personnages et les situations viennent de ma vie, mais tout est circonscrit pour qu’ils deviennent de la fiction. La prof de sport existe, par exemple, mais elle n’avait pas le même nom et n’avait pas réellement ce comportement. Je ne cherche pas à coller au réel, mais à donner une sensation de réel.
C’est jubilatoire de faire ce spectacle. Je m’amuse, ce n’est jamais douloureux pour moi. Les comédiens qui souffrent sur scène parce qu’ils parlent d’eux-mêmes de façon très introspective, c’est pénible à regarder.

Les femmes dans l’humour sont de plus en plus nombreuses. Elles osent se lancer sur scène. Que se passerait-il si elles devenaient majoritaires ?
Je ne sais pas. Je ne suis pas sûre que ça change quelque chose. C’est un texte et la façon de l’interpréter qui font le spectacle, plus que le sexe de la personne qui le joue.

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Quel est ton entraînement pour avoir une telle forme sur scène ?
C’est effectivement très sportif. Au début, j’ai eu un peu de mal. J’étais épuisée. Mon sport, c’est le théâtre. Je bois beaucoup d’eau et je fais attention à ce que je mange. Je ne suis pas très sportive mais j’aimerais m’y remettre. Désolée, je n’ai pas d’autres conseils forme pour les lecteurs ! Mais on peut parler cheveux et maquillage si tu veux !

Que dit ta famille de se voir racontée dans tes spectacles ?
Elle sait que c’est du théâtre et de la fiction. Elle ne le prend pas mal du tout. Ce n’est pas violent, j’essaie de retranscrire l’expérience de grandir. Mais il évident qu’il faut passer des barrières quand on fait des trucs un peu autobiographiques, sinon, tu restes toujours un peu frileux. C’est compliqué d’être l’enfant de quelqu’un. Ici, l’ado ne critique pas sa mère, elle ne la juge jamais. Elle veut juste sortir de sa bulle familiale.

Ton spectacle est la suite de La Banane Américaine, il faut s’attendre à un troisième spectacle ?
Pour que tu m’aimes encore ne succède pas exactement à La Banane Américaine. C’est une suite mais la démarche d’écriture est différente. On peut voir les deux spectacles indépendamment l’un de l’autre.
Cela dit, plus je joue, plus j’imagine une suite. Mais j’ai d’autres projets en parallèle. Je joue actuellement une adaptation des Comtes du chat perché, de Marcel Aymé, au Théâtre Lucernaire (jusqu’au 29 mai, NDLR) et j’ai envie de créer des spectacles, de faire de la mise en scène. Il faudra donc être un peu patient.

Interview réalisée par Joël Clergiot

Pour que tu m'aimes encore Elise Noiraud Comédie de paris avis critique théâtre spectacle humour seul en scène affihe Blog United States of paris
Pour que tu m’aimes encore
de et par Élise Noiraud

Du mardi au samedi à 19h30

à la Comédie de Paris
42, rue Pierre Fontaine
75009 Paris

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Festival Perspectives 2016 : un week-end culturel à Sarrebruck

Pour un bain de spectacles vivants (théâtre, danse, musique) la destination de Sarrebruck (Allemagne) n’est, à première vue, pas une évidence, y compris pour nous.
Et pourtant, on s’est frotté ce week-end à la programmation attrayante, l’ambiance décontractée et l’accueil hors pair du festival (transfrontalier franco-allemand) Perspectives.

Eglise Ludwigskirche
Eglise Ludwigskirche

A moins de 2 heures de Paris
Marre de l’agitation urbaine ?
Envie de prendre l’air mais sans forcément sacrifier une part plus ou moins large de culture ?
La liaison directe TGV Paris/Sarrebruck offre un plein confort pour participer à ce rendez-vous à visage humain.
On a été séduit dès notre descente de train. !

May all your dreams come true street art graffiti Saarbrücken Sarrebruck tourisme festival Perspectives photo usofparis blog

Aucun spectateur exclu
La programmation de ce festival qui se tient le mois de mai à Sarrebruck, capitale du Land Sarre, accueille aussi bien Allemands que Français et pour cause : les formes sans parole sont privilégiées et, dans les autres cas, la traduction est intégrée au spectacle sinon, les sous-titrages sont nos meilleurs alliés.
Pas besoin de pratiquer l’allemand pour s’en sortir que ce soit dans la ville et encore mieux sur les sites du festival : les équipes d’accueil sont bilingues.

Preljocaj, Housse de Racket, cirque miniature…
L’intérêt de ce rendez-vous est d’offrir une série des spectacles variés, réjouissants et festifs.

LEO
LEO

De l’acrobatie pure : on a aimé Il n’est pas encore minuit… de la Compagnie XY, vu à la Villette et présenté ici. L’artiste Tobias Wegner nous a impressionnés par son jeu d’illusions et de perspectives dans son solo LEO qui a fait le tour du monde.
L’œil s’amuse tour à tour de la réalité du plateau et de la fiction vidéo. Le solo ne sombre pas pour autant pendant cette heure intense au cours de laquelle : danse, contorsions, dessins, vidéo animée viennent enthousiasmer petits et grands. Un spectacle qui nous a fait retraverser la frontière, car se jouant à Sarreguemines.

Roméo et Juliette par le Ballet Angelin Preljocaj création en 1996 salut des 23 danseurs festival Perspectives 2016 Sarrebruck Saarbrücken photo usofparis blog

Roméo et Juliette par le Ballet Angelin Preljocaj création en 1996 salut danseurs Redi Shtylla Viriginie Caussin festival Perspectives 2016 Sarrebruck Saarbrücken photo usofparis blog

Du spectacle culte : Angelin Preljocaj qui fête ses 30 ans de créations cette année et les 20 ans du ballet Roméo et Juliette présenté pour la première fois en Allemagne. Émerveillement avec cette histoire d’amour folle d’une sensualité inouïe. Marion Brando comme ressuscité sur scène par la carrure de l’interprète de Roméo et son débardeur qui dissimule peu de sa musculature.
23 interprètes composent les tableaux narratifs de cette fiction qui a retrouvé une pleine intensité grâce au talent du chorégraphe.

Etienne Manceau spectacle VU compagnie Sacékripa solo pour un manipulateur d objets usuels Festival Perspectives 2016 Sarrebruck Saarbrücken allemagne photo usofparis blog

Du grand bluff : VU nous emporte dans un théâtre de petits riens en nous captant l’attention de manière incroyable. Le résumé ne laisse pas percevoir ce qui va se tramer sous chapiteau. L’arrivée même d’Etienne Manceau est inhabituelle. Un couple d’amoureux se prend à sursauter à la vue de l’artiste arrivé discrètement derrière eux.
Ce personnage silencieux et qui compte une gamme très limitée de sourires nous emporte avec son univers d’une minutie décomplexée. Et qu’il est long le temps pour cet homme de se servir un thé, d’y plonger un sucre. Tout simplement parce qu’il ne fait rien comme les autres. Il tape du poing sur la table pour faire tomber une cuillère dans une tasse et que dire de la catapulte pince-ongle pour sucrer son breuvage ? On pourrait devenir fou. On rit avec délice.
Plus maniaque que ce garçon c’est impossible. Plus reconnaissant aussi. Il fait appel à la participation d’un(e) spectateur-trice qui a bien du mérite à répondre aux exigences du manipulateur.

E Werk
E Werk

Décors originaux
Perspectives réserve aussi de vraies surprises en terme de lieux de spectacles, aux côtés des salles de spectacle et autres chapiteaux.
Roméo et Juliette a eu comme écrin pendant 3 jours une ancienne usine électrique, E Werk.

Housse de Racket live
Housse de Racket live

Housse de Racket, Minuit et les autres artistes musicaux se succèdent à quelques mètres de là, dans un ancien magasin de cette zone commerciale : surprenant et spacieux avec sa terrasse cachée (prenez le long couloir à côté du bar).

Mais l’un des cadres les plus déroutants sera sans nul doute un ancien garage Citroën. Il accueillera la Hate Radio, cette reconstruction d’un studio radio à l’époque du génocide rwandais. Les contraintes de tournée du spectacle ont fait que, par manque de temps pour la réception des décors, l’alternative était de trouver un lieu qui pourrait s’adapter à la proposition théâtrale du metteur en scène et auteur Milo Rau.
La partie vitrée de l’ancien bureau-accueil du garage accueillera le studio d’enregistrement alors que les voitures laisseront place au gradin des spectateurs.

De bonnes raisons pour sortir du centre-ville, de filer avec son vélo et découvrir les alentours.

https://www.unitedstatesofparis.com/rainforest-festival-2016-fontainebleau-concert-ibeyi-concours-musique/

le festival Perspectives 2016 se poursuit jusqu’au 21 mai !
Toutes les infos sur le site : www.festival-perspectives.de

Merci à Marion, Hannah pour leur disponibilité et à leur accueil et merci aux Inrocks de nous avoir fait connaître le festival !

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Un amour qui ne finit pas : chef d’oeuvre au Théâtre Antoine !

Un amour qui ne finit pas est en fait un triple chef d’œuvre : texte, mise en scène et interprétation. Après le succès de Fleur de Cactus, Michel Fau – qui ne peut jamais quitter la scène plus de quelques semaines par an – est de retour au Théâtre Antoine avec son double col : metteur en scène et comédien.

Le génie de Michel Fau est de nous faire aimer à la folie des textes oubliés, des histoires qui n’ont plus d’âge. Il opère pour chacune de ses mises en scène un léger lift ou peeling pour rajeunir l’ensemble sans en ôter toute la sève qui a fait le succès de ces récits par le passé.
On avait été conquis, agrippés à nos accoudoirs, par le duo qu’il formait avec Léa Drucker dans Demain il fera jour.

photo Marcel Hartmann
photo Marcel Hartmann

Il retrouve sa partenaire pour une relation d’amour-complice-agaçant qui avait débuté au Théâtre de l’Œuvre. On comprend très vite l’intérêt de son personnage, Jean, à rêver une histoire d’amour avec une autre. Une histoire qui n’aura de fins que la correspondance, sans aucun autre contact auditif, visuel, physique possible. Tout doit être fantasmé, non consommé et unilatéral.
Ce pacte qu’il a scellé sans le réel consentement de cette inconnue croisée en cure, va être le début d’un vaudeville fin, léger et encore plus tonique que ce qu’a pu nous réserver Sacha Guitry.

Léa Drucker est incroyable de malignité, doublée d’un penchant certain pour le cassage de bonbons. Elle irradie, une nouvelle fois. Elle nous apparaît vieillotte, sans âge, bourgeoise à souhait avec son ensemble que l’on prendre pour un Chanel et son collier de perles.
Elle est source d’un agacement inouï pour son mari, on le comprend. On rit sans aucune retenue.

Michel Fau, égal à lui-même, ni tout à fait le même, ni tout à fait un autre. Brillant, humour pince sans rire, sans retenue aucune.

photo Marcel Hartmann
photo Marcel Hartmann

Pascale Arbillot prête son charme à ce personnage qui devient le sujet-objet de toutes les attentions de Michel Fau.
Elle

Pierre Cassignard est un mari turbulent parfait. Excessif dans le rejet qu’un autre puisse aimer, pourtant à distance, sa femme.

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Pourquoi y aller ?
– une histoire d’amour extravagante mais envisageable
– les Léa Drucker lovers conquis au plus au point : la preuve, elle est nommée aux Molières 2016 de la Comédienne dans un spectacle de Théâtre privé
– 50 représentation exceptionnelles : pas une de plus !
pas de changement de distribution depuis la première au Théâtre de l’Oeuvre
– allez-y avec votre mère, la nôtre a adoré autant que nous !

Affiche pièce Un amour qui ne finit pas Théâtre Antoine Paris Léa Drucker Pascale Arbillot Pierre Cassignard mise en scène Michel Fau normination Molières 2016 comédienne théâtre privéUn amour qui ne finit pas
d’André Roussin
mise en scène : Michel Fau
Avec Michel Fau, Léa Drucker, Pascale Arbillot, Pierre Cassignard, Audrey Langle, avec la participation de Philippe Etesse

au Théâtre Antoine
14, boulevard de Strasbourg
75010 PARIS

jusqu’au 8 juillet 2016

du mardi au samedi à 21h
le dimanche à 16h

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Ancien malade aux hôpitaux de Paris au Théâtre de l’Atelier : hilarant !

Fabrice Luchini affiche complet (encore) en ce début d’année ? Vous êtes inconsolables comme nous ? Courrez au Théâtre de l’Atelier pour découvrir un autre performeur aussi talentueux, Olivier Saladin, porté par un texte, celui de Daniel Pennac, aussi intelligent et évocateur que les oeuvres de Beaudelaire, Molière ou Labiche.
Degré de déception possible ? Proche de zéro. La preuve : le spectacle est à nouveau à l’affiche à partir du 4 mai.

Affiche Ancien malade des hôpitaux de paris de Daniel Pennac avec Olivier Saladin mise en scène Benjamin Guillard Théâtre de l Atelier Paris nomination Molières 2016 seul en scène

Étudiant en médecine, médecin, professeur ou bien sommité de la rotule ou de l’hypothalamus.
Venez donc rire de vos petits travers, de vos tracas de la vie en blouse blanche et du plus improbable cas jamais inventé – que vous ne rencontrerez jamais, enfin on vous le souhaite !

Hypocondriaque, malade occasionnel, froussard du bloc opératoire, adepte du bio ou du végétalisme, découvrez l’arrière décor, les coulisses d’un service hospitalier en pleine ébullition autour d’un patient. Les documentaires à sensations type M6 ou Envoyé Spécial n’auront jamais été aussi proches de la réalité crue, hilarante et un chouïa caricaturale.

Avouons qu’on n’aimerait pas trop tomber dans les mains de Gérard Galvan. Il se démène comme il peut, on ne peut le nier. Mais ce n’est pas un éveillé du diagnostic irréprochable. Et c’est bien à cause de ce détail que tout va déraper.

“Les cons ! Ils ont foutu le feu au paradis”
Le récit porté par le seul comédien incarnant une bonne douzaine de personnages est mené à tombeau ouvert. C’est détonnant, satyrique, relevé et brillamment écrit.

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Daniel Pennac, rencontré juste avant le spectacle, avoue sa passion pour la carte de visite à rallonge des médecins. D’où son envie de détourner de manière originale cette propension de ce corps de métier à ne pas lésiner sur la longueur des spécialités de chacun. “Les médecins ont des cartes de visite merveilleuses : ancien interne de… chirurgien en… spécialiste en…
Mais il avoue que c’est certainement la rencontre d’un hypocondriaque qui lui a donné l’idée de cette nouvelle adaptée en pièce de théâtre. “Le corps est romanesque, il nous fait des surprises à longueur de notre vie“.

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Et l’auteur ne cache pas son plaisir de voir son texte ainsi incarné sur scène par Olivier Saladin, ancien membre des Deschiens dont Pennac était un inconditionnel. “La première fois que j’ai vu le spectacle, le public riait, et moi aussi“. Avant de rajouter : “On en a plein les yeux avec Olivier. Il avoue quelques minutes : “j’aurais aimé le jouer, mais je n’ai plus la condition physique pour.

Olivier Saladin a droit à des échanges amusants en sortant de scène et peut débuter une collection : “pas mal de médecins me donnent maintenant leur carte !

Carte de visite de Daniel Pennac
Carte de visite de Daniel Pennac

Saladin VS Luchini, les plus :
– Votre porte-feuille vous dira merci de ne pas avoir craqué pour les Poésies de Luchini à 60€ la 1ère catégorie.
Ancien Malade c’est 1h15 – applaudissement non compris – d’un rythme intense. 1h50 de Poésie ? forcément, à un moment ou un autre, ça fait bailler.

Ancien malade aux hôpitaux de Paris
de Daniel Pennac
mise en scène : Benjamin Guillard
avec : Olivier Saladin

au Théâtre de l’Atelier
1, Place Charles Dullin
75018 PARIS

au mardi au samedi à 21h
matinée le dimanche à 15h

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Olivier Giraud – HOW TO BECOME PARISIAN IN ONE HOUR? au Petit St-Martin

On ne compte plus les saisons depuis que  How to become Parisian in one hour ? (Comment devenir Parisien en une heure?) est à l’affiche à Paris. Le one man show délirant mené avec brio par Olivier Giraud fait le bonheur des touristes éperdus entre resto gastronomique, French Cancan et city tour en car climatisé.
Paris n’étant pas New York, la ville n’offre que peu de réjouissances pour les anglo-saxons.
Et pourtant, il y une alternative aux attrape-gogo, le one-man-show d’un Frenchie, en anglais dans le texte pour une série de prolongations jusqu’en 2017 du Petit St-Martin au Théâtre des Nouveautés.

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Pendant plus d’une heure de spectacle, le vrai visage des Parisiens apparaît. Tour à tour arrogants, impatients, râleurs et injurieux – ça fait notre charme ! – ces hommes et ces femmes sont au final attendrissants dans leur rapport à l’autre.

Rencontré à sa sortie de scène après une séance photo avec les spectateurs, la moue boudeuse du Frenchie, Olivier ne cache pas que la première de la saison a été très stressante.
La pression retombée depuis, il savoure d’avoir une salle quasi pleine chaque soir.

INTERVIEW

Qu’est-ce qui change cette année ?
C’est mon premier spectacle. Je me suis limite formé sur scène. il a donc a beaucoup évolué. Il y a plus d’interaction avec le public, plus d’improvisation aussi.
Et pas mal de blagues en plus.
Il faut dire que grâce aux cartes laissées en fin de spectacle, il y a aussi beaucoup de spectateurs qui me donnent des idées. On me fait même des débriefs.

La réaction la plus amusante?
Une Thaïwanaise a pleuré quand elle a reçu le diplôme de Parisienne (à la fin du spectacle un spectateur est invité à monter sur scène pour interpréter un Parisien)
Elle pensait que c’était vraiment officiel. Avec le public, nous étions morts de rire. Et elle ne comprenait pas pourquoi tout le monde riait. Elle recevait le diplôme, comme si c’était un doctorat.

Un message touchant après le spectacle ?
Celui d’une Américaine, il y a 3 semaines. Elle a appris la veille du spectacle que son mari venait de décéder.
Elle avait acheté sa place et était à Paris. Ne pouvant rentrer aux Etats-Unis, elle a décidé de venir.
En sortant de la salle, cette spectatrice m’est tombée dans les bras. Elle pleurait. Je ne comprenais pas ce qui lui arrivait.
Et elle m’explique qu’elle venait de perdre son mari et que je l’avais fait sourire.

Quel est ton public ?
Beaucoup d’expatriés Américains, Canadiens, Anglais qui travaillent à Paris. Des Français bien sûr. (il n’est pas nécessaire d’avoir un excellent niveau d’anglais pour comprendre)
Et puis des touristes.

Quelle est la provenance la plus improbable que tu aies reçu, à part ce soir et l’Ouzbékistan?
Pas plus tard qu’hier, la Corée du Nord. Je me suis demandé si le spectateur ne s’était pas échappé.
J’ai dit “Hello” Et le problème, c’est que tout le monde était mort de rire.
C’était horrible, je me mettais à sa place.

La suite ?
Un livre, pas en Français. En Anglais, en japonais, je le ferai traduire. Ce sera un guide de survie qui te tutoie.
Dans le métro, je vais décrire tout ce qui peut arriver à un étranger.
Il faut quand même attendre un an pour que je l’écrive.

Ton pire souvenir de Frenchie à l’étranger?
Les États-Unis. Les Américains ne font pas d’effort de compréhension.
Si bien que je n’ai jamais pu commander une Budweiser. Ma prononciation était surement approximative.
Je me commandais une Corona à la place!

HOW TO BECOME PARISIAN IN ONE HOUR?
d’Olivier Giraud

au Théâtre du Petit St-Martin
du 29 juin au 27 août 2016

Reprise au Théâtre des Nouveautés
à partir du 24 septembre et jusqu’en août 2017

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Pour que tu m’aimes encore : irrésistible Elise Noiraud !

Pour que tu m’aimes encore est, pour beaucoup d’entre nous, une chanson d’adolescent(e) puissante et qui n’a pas perdu de son efficacité musicale, voire émotionnelle, avec le temps. Un tube qui a célébré l’apogée francophone de Céline Dion dans les années 90.
Il faut compter maintenant sur Élise Noiraud, pour qui, la chanson devient un hymne de jeunesse, la sienne, contée avec brio sur la scène de la Comédie de Paris.

L’intitulé “seul(e) en scène, à défaut de one (wo)man show, peut parfois refroidir nos ardeurs de passionnés de spectacle.
Et pourtant, on aime aussi pleurer, être émus, entre deux éclats de rire.

Le spectacle d’Elise débute par une émission de radio, flash info et prise d’antenne d’une animatrice délurée. Lancement d’un concours au lot mirifique, c’est à ce moment précis que la toute jeune Élise, 13 ans, fait son entrée.

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Le conte de cette adolescente qui vit sa crise comme elle peut, tente de s’émanciper de sa mère trop présente, et trouve une oreille attentive en la personne de sa prof de sport, débute avec panache, pieds nus sur la scène.
Les personnages dialoguent entre eux avec, au choix un accessoire pour les différencier, mais sans effet de voix qui peut accabler.
Difficile de définir ce qu’Élise apporte à la transition entre chaque personnage, mais il est certain que c’est un patte personnelle assez inédite.

Pour que tu m’aimes encore : encore et encore

Tout est dans le débit, le ton ou le phrasé. L’histoire est limpide, aucune confusion possible dans cette galerie de personnalités aussi colorée que barrée.
Et on s’attache vite à cette mère qui a perdu toute crédibilité entre autorité et ado-friendly, et qui décide de se mettre à la peinture sur un coup de tête pour vivre un moment privilégié avec sa fille.
Car Élise, en plus d’être danseuse, d’écrire dans son journal, sait aussi peindre !

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Pour que tu m’aimes encore c’est l’école, les premières amours, la boum, les déconvenues et les petits espoirs : le tout dans un esprit très revival fin des années 90. Les spectateurs ado à cette époque ne manqueront pas de voir remonter beaucoup de souvenirs (très) personnels.

L’écriture d’Elise est fine, affûtée, sans concession pour ce qu’elle pouvait être, adolescente. Son interprétation aussi charmante que convaincante est un vrai tour de force qui emporte tout apriori.
On aime les 13 ans d’Elise, et l’on serait prêt à la suivre au lycée et à la fac ! L’histoire continue ?

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Pour que tu m’aimes encore

de et par Élise Noiraud

Du mardi au samedi à 19h30

Comédie de Paris
42, rue Pierre Fontaine
75009 Paris

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CHRISTINE BERROU, depuis 1982 : comme un arbre dans l’antre du Théâtre du Gymnase

En ce samedi soir, je plonge dans le dédale du Petit Gymnase où Christine Berrou s’apprête à faire son entrée. On l’accueille comme Beyoncé, mais en mieux. Un moment présent de jouissances, une expérience fascinante.

J’entends d’abord une voix de fumeuse d’hélium.
Puis, je la vois. Habillée d’une robe bleue turquoise à papillons ! Je me dis : “quel étrange être humain !” Pour moi, le papillon est le symbole du cycle éternel de la transformation personnelle. Quand on voit un papillon, cela annonce un changement de conscience. Et là, Christine en avait un sur l’épaule et des dizaines sur son corps.

Photo by Michel Restany
Photo by Michel Restany

Christine alpague un spectateur. Je ris. Ça nettoie.

Christine : « Quand j’étais petite, je voulais déjà être humoriste. Je montais déjà mes spectacles quand j’avais 6 ans et l’autre jour, j’étais en train de me dire ma famille c’était comme même le meilleur public. Et parce que ma famille, c’est mon meilleur public je voudrais que ma famille ce soir ce soit vous ? Est-ce que vous voulez être ma famille ce soir ? »

Nous exprimons un “Oui” mitigé. Appréhension

Bienvenue chez moi, dans mon salon même si on a l’impression d’être plutôt dans une cave. Toi, Benoit tu feras mon petit frère. Tu vas en prendre plein la gueule. Ensuite, est ce qu’il y a des vieux ? {…} Est ce qu’il a une bipolaire parmi nous ?

Doudou Nounou, Papy, Mamie, Maman, Frérot, Tonton Fred et Cousine Sidonie ont peuplé ce spectacle conversationnel. Manque de pot, elle me choisit pour incarner sa cousine Sidonie. Je me suis pourtant fait toute petite et je ne suis pas au premier rang.

« A côté de toi, Tonton Fred, ma cousine Sidonie. Je la détestais. »

Et quand au papa de Christine, absent !

« Mon père n’était pas là, parce que mon père a toujours préféré regarder le foot à mon spectacle. Oui, je sais, c’est un enculé. Mon père, c’est un intellectuel. Il a toujours pensé qu’humoriste cela ne pouvait pas devenir un vrai métier. Pendant un moment, j’ai été journaliste pour lui faire plaisir et puis j’ai réalisé qu’un journaliste c’est un petit peu comme un arbre.
C’est à dire que pour faire un beau papier, à un moment donné, il doit se laisser abattre. Ça, c’est ce que l’on appelle une blague Télérama. »

Marie Bell, Jacques Bertin, la mort, Franck Ribery, Marie Antoinette, Stéphane Bern, les réfugiés, la première série de l’humanité mènent à Dieu et son prophète : la super héroïne Christine Berrou.

Christine : « Dieu, c’est un petit peu comme un arbre. Si vous lui posez des questions, il ne vous répondra pas.
Non Sidonie !
Il sera là pour vous accompagner dans la mort. … {…}
Je voudrais juste dire pour moi qu’un immigré c’est un petit peu comme un arbre c’est à dire quelles que soient ces racines la planète en a besoin.

Et maintenant, je vais vous dire pourquoi je suis pour l’immigration vous voulez savoir la vraie raison ou pas ? »

Je me revois lui dire haut et fort : Oui.

« Mon patron s’appelle Djamel. »

Photo by Michel Restany
Photo by Michel Restany

Incarnant la suffragette “du droit de la femme à s’incarner dans un prophète“, elle dégomme.

« Anthony, tu peux mettre une lumière style, je parle à Dieu. »

Je la revoie tel un visage de la piéta.
« Cher Dieu, je suis dans un spectacle et tout le monde s’en tape apparemment. Je t’écris pour postuler au poste de prophète qui est vacant.
Oui, je te tutoie parce qu’en on m’a dit qu’il était partout et moi je tutoie les gens qui m’ont vu faire pipi. {…}
Tu es partout donc tu as dû voir que j’étais pas irréprochable moi aussi j’ai pécho.”

Elle se reprend : “Et le péché c’est comme un arbre.
Bon, ok, j’ai pas été touchée par la grâce par contre j’ai été touchée par la matière grasse ?”

Christine Berrou : un arbre de l’humour

Christine manie majestueusement l’art de l’autodérision. Après deux ans de philosophie (elle a redoublé 2 fois sa Terminale), elle a fait le Conservatoire de musique. Faut voir Christine and The King jouer sa chanson « Oh la la, il est trois heures. ». Il faut la voir mettre en scène ces relations amoureuses dans une cuillère à soupe sur le piffe, faut la voir parler des relations entre hommes et femmes dans le camion de Fred et Jamie. Christine c’est pas sorcier, c’est comme un arbre.

Photo by Michel Restany
Photo by Michel Restany

Parler de sexe, c’est toujours avec une tonitruante réplique, ni trop ni pas assez, mais avec sensibilité.
« La sodomie c’est un mot déjà c’est un mot beaucoup plus joli que l’activité qu’il nomine. »

Je suis tétanisée. Christine le sens.
« Ah Sidonie, elle prend des notes »
Je ris.
« Est-ce que Sidonie prend des notes ? »
Sidonie (moi) : « Non ! »
En fait, je prenais bien des notes. Et non, je ne suis pas journaliste. J’ai menti comme un enfant.
« Ah sinon je t’aurais aimée beaucoup d’un coup. J’aurais trouvé une autre Sidonie.  Qu’est- ce que j’étais en train de dire, Sidonie ? »

Christine porte un regard tendre et bienveillant sur elle, sur sa famille – la vraie et l’adoptée : les spectateurs, son histoire et l’Histoire avec un grand H. Je suis sous le charme de ce bout d’humain qui, dans l’antre du Grand Gymnase, anime en moi un super pouvoir : le super héros que je suis.

Christine Berrou Théâtre du Gymnase humour avis critique théâtre spectacle One woman show Blog United States of Paris
L’humour c’est comme un arbre

L’arbre de la connaissance. Et se cache dans notre arbre intérieur notre authenticité. Et pour Christine, c’est cela notre super pouvoir. Christine a réussi un soir d’un samedi du 8 avril 2016, à me connecter à mon authentique : l’art de cultiver l’enfant en soi.

Sur le boulevard de Bonne Nouvelle, je me suis retournée, j’ai contemplé le théâtre du Gymnase et je lui ai dit : « Christine, tu m’as accueillie dans tes racines, l’antre du Gymnase et tu m’as souhaité bon vent après m’avoir embrassé à la sortie du spectacle. Je suis sortie par là où mon premier élan m’a conduit en début de soirée par la porte du Grand Gymnase. C’est sur cette scène que je viendrais te voir la prochaine « foi ».

Un spectacle initiatique à expérimenter au plus vite avec l’arbre Christine Berrou.

by La Baleine Quantique

Christine Berrou Théâtre du Gymnase humour théâtre avis critique spectacle One woman show Paris Photo de Michel Restany

Christine Berrou

Les vendredi et samedi à 20h

Théâtre du Gymnase
Studio
38, Boulevard Bonne Nouvelle
75010 Paris

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NELSON : l’incorrigible Chantal Ladesou au Théâtre de la Porte Saint-Martin #Reprise

Pas de personnage en demi-teinte pour la grande Chantal Ladesou de retour à Paris pour les dernières de Nelson à partir du 21 juin. Ce n’est rien moins qu’à une brillante avocate de barreau de Paris que la comédienne va donner ses traits, chaque soir, au Théâtre de la Porte Saint-Martin.

Spectacle Chantal Ladesou comédienne à l'affiche de la pièce Nelson avec Armelle humour Théâtre Porte Saint-Martin photo by United States of Paris blog

Ladesou est incorrigible. Elle n’est jamais aussi loufoque que quand elle campe des personnages à caractère, aux épaules solides pour emporter la pleine adhésion du public.

Bien sûr que son personnage d’avocate est excessif comme cet acharnement systématique qu’elle a sur ses enfants – devenus adultes. Mais qu’est-ce que c’est hilarant !

Armée de ses Louboutin, Jacqueline Duvivier n’est donc pas une avocate à qui on la fait. Elle connaît toutes les ficelles qui régissent les rapports humains, quitte à soudoyer à bon escient.
Son mari (Thierry Samitier) lui, est effacé et empêtré dans une carrière de chanteur pathétique.
25 ans de mariage. Déjà ! Et deux enfants. Un garçon qui tente d’exister dans l’ombre de sa mère qui en impose en statut et en réparties. C’est pourtant de la fille que va venir le bouleversement le temps d’une soirée, d’un apéro précisément plus que d’un véritable dîner. La famille de carnivores va faire la rencontre d’une famille peace and love et végétalienne portée par la figure hystérique de la mère interprétée par Armelle.
Entre carottes et autres jus sans alcool, les esprits vont s’échauffer et rebondir d’une réplique à une autre, dans un rythme soutenu.

Chantal Ladesou avec le lapin Nelson pièce au Théâtre de la Porte Saint-Martin humour spectacle comédienne droits réservés

Les situations tiennent leur promesse de nous réserver des bonnes séries d’éclats de rire et pas seulement du côté des spectateurs. La preuve, ce mardi soir, Ladesou est prise d’un fou rire prolongé avec ses partenaires. Le rire particulier d’une spectatrice dans la salle devenant contagieux. Sans perdre le contrôle, la comédienne donnera tout ce qu’elle a en réserve pour en rajouter et tirer partie de cet écart.

Tu peux me tutoyer, mon chou”, “enchaîne Popole !
On est dans le boulevard sans porte qui claque mais où les quiproquos sont légions.
Les scènes cultes notamment avec cette Armelle, mère de famille bien rangée, ou encore avec une Ladesou lâchée dans un play-back incroyable ne sont pas prêtes de vous quitter et vous donneront un bon coup de fouet les jours de froid.

Il fallait bien, pas un mais deux metteurs en scène, pour canaliser toute l’énergie de la bête de scène Ladesou.

Chantal Ladesou Armelle pièce Nelson Eric Laugérias Thierry Samitier Clémence Ansault - Simon Jeannin Simon Larvaron Théâtre de la Porte Saint Martin photo by United States of Paris Blog

NELSON
avec Chantal Ladesou, Armelle, Eric Laugérias, Thierry Samitier, Clémence Ansault, Simon Jeannin, Simon Larvaron
pièce de Jean-Robert Charrier
mise en scène : Jean-Pierre Dravel et Olivier Macé

Reprise exceptionnelle du 21 juin au 3 juillet 2016 #dernières

au Théâtre de la Porte Saint-Martin
18, boulevard Saint-Martin
75010 Paris

de mardi à vendredi 20h30
Samedi à 17h et 20h45

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Old Times au Théâtre de l’Atelier : Adèle Haenel troublante

Jeu trouble de remontées de souvenirs, de dialogues aussi complices qu’étranges, d’échanges anodins, en apparence. Les spectateurs en pleine ambivalence face au texte sans concession de Harold Pinter, Old Times à l’affiche du Théâtre de l’Atelier.

La pièce débute en présence de trois personnages. Seuls deux parlent, Kate et Deele, un couple de quadras. Le troisième est observateur et silencieux.
On ne sait quand ce dernier va se manifester. Le temps est suspendu avant la révélation.

On comprend qu’Anna, la seule amie de jeunesse de Kate, est bien cette frêle jeune femme mystérieuse, à la robe bleue.
Tout de suite, sa personnalité, son expansion tranchent avec l’aspect policé du couple, bien posé sur canapé, pleinement embourgeoisé.

Marianne Denicourt Emmanuel Salinger Adèle Haenel salut pièce Old Times Théâtre de l atelier paris mise en scène Benoit Giros photo usofparis blog

“Le ciel est à ce point immobile !”

On est admiratif, sinon circonspect, de cette vivacité, de cette présence tout en gestes.
Il y a quelque chose de gauche aussi dans cette silhouette. Le jeu d’Adèle Haenel surprend, un jeu inhabituel quand on se réfère à ses apparitions au cinéma.
Le metteur en scène, Benoit Giros, sait nous saisir pour mieux nous capter et nous faire apprécier la matière poreuse qui nourrit le texte de Harold Pinter.
Anna exalte le passé, les souvenirs, la jeunesse, l’effervescence de Londres…
Il n’est pas rare que le trio se mettent à chanter,  qu’il se remémore un film culte.

Peu à peu, la parole de Kate se ratifie. Elle devient à son tour observatrice, témoin muet. Dans ces instants d’écoute, le regard de Marianne Denicourt est tout aussi intense. Il est intéressant de l’observer quand les deux acteurs, Haenel et Salinger, s’échauffent les souvenirs entre eux.

Old Times est plus une pièce d’ambiance plus que réellement narrative. Le charme n’en est pas moins présent d’autant qu’il est plaisant de retrouver ces trois comédiens qui nous habituent plus à des performances cinématographiques que scéniques.

Affiche Old Times au Théâtre de l atelier paris pièce de Harold Pinter avec Marianne Denicourt Adèle Haenel Emmanuel Salinger mise en scène Benoit Giros photo usofparis blog

Old Times

Texte de Harold PINTER
Texte français de Séverine MAGOIS

Mise en scène de Benoit GIROS

Avec Marianne DENICOURT, Adèle HAENEL et Emmanuel SALINGER

au Théâtre de l’Atelier 
1, place Charles Dullin
75018 PARIS

du mardi au samedi 21h
matinée le dimanche à 15h

durée : 1h20

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IN THE WORLD BOX au Théâtre Aktéon : expérimentons !

Prémisse d’une création théâtrale originale, In the World Box est à observer au Théâtre Aktéon. Expérience d’une immersion dans le monde des Machumans – moitié Hommes, moitié Machines !
C’est aussi l’occasion de découvrir une auteure en devenir, Madame AF – Anne Falcon.

Au commencement, la voix Off nous donne la place. Nous, public, humains, sommes observateurs. Durée d’observation 56 minutes.

“Mesdames et Messieurs, nous sommes heureux de vous accueillir dans le centre d’observation de la World Box !

Photo © Philippe Denis
Photo © Philippe Denis

Le centre d’observation, cube exigu se situe dans le Théâtre Aktéon. Madame AF, n’aurait pas pu mieux choisir. Selon la mythologie grecque, Aktéon symbolise l’hubris de la curiosité humaine. On raconte qu’Aktéon surprend au cours d’une chasse, la déesse Artémis prendre son bain. Furieuse, elle le transforme en un majestueux cerf. Impuissant, Aktéon meurt déchiré par ses propres chiens enragés par la déesse qui ne le reconnaissent pas.

L’auteure nous expose le monde des Love Box, House Box, Work Box, … A l’origine de ce monde un certain Monsieur On. Il a créé un monde parfait « The World Box ». Ses habitants sont les Machumans, des êtres parfaits. C’est une espèce hybride : mi-biologique et mi-technologie de pointe. Pour survivre dans la World Box, chaque individu doit obéir aux règles. A défaut, il sera envoyé dans la Off Box.

Dans ce monde étrange, Mademoiselle C – Eve Saint Louis va rencontrer Monsieur A – Geert Van Herwijnen dans la Love Box. Ils ont un seul choix : se choisir en tant que couple amoureux.

Photo © Philippe Denis
Photo © Philippe Denis

Monsieur A : Vous savez ce que je déteste le plus au monde ?
Mademoiselle C : Les premières fois ?
Monsieur A : Non.
Mademoiselle C : Alors, je ne sais pas !
Monsieur A : Le silence !
Mademoiselle C : Le silence ?
Monsieur A : Oui
Mademoiselle C : Pourtant la parole est d’argent et le silence est d’or.
Monsieur A : Eh bien moi, voyez-vous, je préfère quand le silence dort.
Mademoiselle C : Je suis comme vous. Je trouve, en effet, que certains silences sont angoissants. Ils nous mettent trop souvent dans l’embarras.
Monsieur A : Ça ne devrait pas exister.
Mademoiselle C : Ou alors ce qui devrait exister, c’est une box à secours en cas de silence prolongé. A l’intérieur, on y mettrait pleins de sujets de conversation… »

Le couple AC se choisit. S’embrasser, faire l’amour – chut : je vous laisse découvrir dans le centre d’observation. Comme tout couple Machumans, ils intègrent une House Box. Pour ce faire, Mademoiselle C et Monsieur A doivent travailler. Mais Mademoiselle C n’arrive pas à trouver un travail.

Photo © Philippe Denis
Photo © Philippe Denis

Mademoiselle C : Nous n’étions plus que 3 candidats et ils nous ont demandé à chacun de mimer un souvenir d’enfance, celui qu’on voulait !
Monsieur A : Ok
Mademoiselle C : Chacun alors a mimé son souvenir d’enfance.
Monsieur A : Et après ?
Mademoiselle C : La world box n’a pas su nous départager estimant qu’il s’agissait de trois expériences intéressantes. Du coup, on nous a demandé de procéder à l’auto-élimination les deux autres candidats ont voté contre moi !

Le couperet tombe. Elle n’a plus que deux jours pour trouver un travail, sinon expédition à la Off Box. Elle rencontre le terrible Monsieur H – Germain Boissy, patron de la Work Box, tyran espiègle.

Photo © Philippe Denis
Photo © Philippe Denis

Mademoiselle C réussira à obtenir ce poste in extremis.

Le monde de la World Box distille subtilement les angoisses de notre société, vivre ou ne pas vivre ses émotions, la peur du silence et du vide, le travail, l’emprise de l’autre dans l’intimité.
Le quotidien du couple se résume à Travel box, Work box, et House Box – métro – boulot – dodo. La voix off conditionne leurs faits et gestes dans la House Box.

Photo © Philippe Denis
Photo © Philippe Denis

Je me suis surprise à effectuer la même chorégraphie gestuelle que les Machumans. Je me suis surprise à aimer cette Mademoiselle C et à moins aimer Monsieur A. Le jeu des comédiens participe sans doute à mon identification émotionnelle, au-delà des personnages qu’ils incarnent.

Mademoiselle C atteint le Burn Out professionnel. La cadence l’a épuisée. Elle s’empiffre de pop-corn. L’auteure, Madame AF nous invite alors à nous questionner sur les imaginaires de l’évolution et de l’humanité.

Monsieur A : Tu sais c’est important d’évoluer.
Mademoiselle C : C’est violent d’évoluer.
Monsieur A : On ne peut pas toujours rester au même stade.
Mademoiselle C : Et si, moi, j’ai envie de rester au même stade !

C’est à cet instant, que je sens le miroir opérer en moi. Qu’est-ce que je pense de la société qui prône la compétitivité et l’évolution comme figures de proue de la réussite ? Je la rejette en m’empiffrant comme Mademoiselle C parfois.

Photo © Philippe Denis
Photo © Philippe Denis

Scotchée dans mon fauteuil d’observatrice, j’ai eu de la compassion pour ces Machumans qui considèrent que l’évolution est une affaire de cadence de travail. Et j’ai gardé au coin de mon hippocampe (mémoire) cervical, cette scène qui je l’espère me rappellera dans un futur proche de redéfinir mon sens de l’évolution et du travail.

Mademoiselle C à l’intelligence émotionnelle développée n’aura de cesse de rejeter la World Box. Pour s’en sauver, elle nous interpelle. Et c’est le point fort de la pièce.

Dans le centre d’observation, qu’avons-nous fait, nous le public pour aider Mademoiselle C ?
Madame AF, nous a mis devant un choix : intervenir ou ne pas intervenir ?
J’aurais aimé me lever, aller prendre par la main Mademoiselle C et la sortir de la World Box.

Je ne l’ai pas fait. Pourquoi ? Parce que le silence dormait dans la salle. Parce que l’instant d’après la raison m’a rappelé que ce n’était qu’une pièce de théâtre. Parce que j’avais peur ? J’ai quitté le théâtre en me demandant : Et si je l’avais fait ?

Comme Artémis, Madame Anne Falcon m’a transformée en un animal. J’ai été dévorée par mes propres chiens de garde, comme Aktéon. Ainsi l’observateur est forcément transformé par ce qu’il observe.

In the World Box est une pièce qui nous observe et qui donne du choix. A vous de choisir d’aller vivre cette expérience jusqu’au 10 mars 2016.

By la Baleine Quantique

In the world box théâtre aktéon spectacle avis critique Anne Falcon blog United States of Paris

In the World Box
Jusqu’au 10 mars 2016 – Mercredi & Jeudi à 20h

Compagnie des Lueurs
Texte et mise en scène :  Anne Falcon
Avec : Germain Boissy, Geert Van Herwijnen, Eve Saint Louis, Mathilde Cessinas et Etienne Tho.
Voix off : Frédéric Courraud

Musique : ELEKTRO GUZZI
Création musicale : Alexandre Fergui
Lumières : Matthieu Barani & Olivier Ryder
Costumes : Donatella Franco

Aktéon Théâtre
11, rue du Général Blaise
75011 PARIS
Métro Saint-Ambroise

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