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FARBEN au Théâtre de la Tempête : les couleurs d’une vie manquée

Farben, actuellement au Théâtre de la Tempête, retrace la vie gâchée d’une scientifique allemande du début du XXe siècle. Mise en scène très photographique et texte coupé à la serpe, c’est beau et déroutant à la fois.

photo Philippe Declacroix
photo Philippe Declacroix

Année 1900, Allemagne. Elle est la première femme à obtenir un doctorat de chimie. Coupée dans son élan par le machisme, l’antisémitisme et les pressions sociales, Clara Haber va vivre une existence de frustrations et d’humiliations quotidiennes. Pourtant, elle restera passive devant ce monde d’hommes qui l’étouffe. Naïve, elle voulait chercher, tout savoir et faire progresser l’humanité. Mais c’était sans compter sur la mentalité de l’Allemagne rétrograde du début du XXe siècle et l’ambition de son mari. Ce dernier donnera le coup de grâce aux rêves de la scientifique, quand il inventera la formule qui donnera le tristement célèbre gaz moutarde, utilisé sur les champs de bataille de la première guerre mondiale.

C’est cette vie pathétique que relate Farben, la pièce de Mathieu Bertholet, mise en scène par Véronique Bellegarde, au théâtre de la Tempête. Quatre tableaux titrés découpent l’histoire. Chacun de ces actes a la couleur d’un gaz, rappelant les travaux de chimie qu’aurait voulu mener Clara Haber (Odja Llorca). La pièce est composée d’une centaine de micro-séquences, comme des morceaux de puzzle, que l’on emboite les uns dans les autres.

photo Philippe Delacroix
photo Philippe Delacroix

Troublante mise en scène
Il faut l’avouer, lorsque les acteurs sont entrés en scène, nous avons eu peur. L’écriture est un peu prétentieuse, et le jeu, déroutant. Des bribes de phrases sont jetées au public, dans des apparitions fantomatiques successives. Le résultat est très esthétique, certes, mais on ne comprend pas bien où l’auteur et le metteur en scène veulent en venir. Mais petit à petit, sans nous en rendre compte, nous nous laissons porter. Il est difficile de définir clairement ce qui nous fait changer d’avis. La forme du texte est plus accessible ? La mise en scène se simplifie ?  Quelque chose d’imperceptible agit. Nous entrons totalement dans l’histoire, fascinés par le destin tragique de Clara Haber.

Il faut dire que le jeu des acteurs y est pour quelque chose. Ils semblent vivre leur rôle, jusqu’à ne faire plus qu’un avec leur personnage. On s’apitoie alors sur cette femme, tant écrasée par les conventions sociales, qu’elle ne peut plus réagir à l’hypocrisie qui l’entoure. L’odieux mépris de son mari (très bon Olivier Balazuk) nous laisse pantois. Le spectacle accorde également une grande place à la chanson. Les amateurs de Lieder, ces vieilles chansons traditionnelles d’outre-Rhin, et de chanteuses moulées dans des robes au style très art déco, apprécieront.

By Joël Clergiot

Affiche pièce Farben Théâtre de la Tempête Paris texte de Mathieu Bertholet mise en scène Véronique Bellegarde

Farben
de Mathieu Bertholet
mise en scène : Véronique Bellegarde
Avec Olivier Balazuc, François Clavier, Hélène Delavault, Laurent Joly, Odja Llorca, Sylvie Milhaud

jusqu’au 13 décembre 2015

du mardi au samedi à 20h30
le dimanche à 16h30
durée 1h30

Théâtre de la Tempête
Cartoucherie Route du Champ- de-Manœuvre
75012 Paris

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JOHN – Spectacle brut par DV8 Physical Theatre à la Villette #concours inside

John est le nouveau spectacle mélangeant théâtre et danse créé par Lloyd Newson,  fondateur et directeur artistique de DV8 Physical Theatre.
Habitué des sujets forts et délicats, ce dernier s’est entretenu avec plus de 50 hommes, les interrogeant à propos de l’amour et du sexe. John c’est l’homme qui compile cet ensemble de propos.
Présenté dans le cadre du Festival d’Automne à la Grande Halle Villette, cette création est Intense, sans détour et encrée dans le réel. Ce spectacle est déconseillé au moins de 16 ans.


John,
c’est certainement “John Doe”, le patronyme donné aux personnes inconnues, dans les pays anglo-saxons. Il signifie aussi “Monsieur X” ou “Monsieur Tour-le-monde”.

Après une enfance difficile entre les sévices de son père et l’overdose de sa mère, John, délinquant et consommateur de drogue, passe de centres pénitentiaires en centres de désintoxication. Entre temps, il erre seul dans les bas-fonds de Londres, luttant pour sa survie et nous entraînant avec lui dans des lieux inconnus.

La compagnie DV8 Physical Theatre (prononcé “deviate“) transpose les mots de ces 50 hommes en une performance de théâtre dansé.
Ce n’est pas une fiction, mais la vie recomposée de ces inconnus.
Parole brute et attitudes authentiques sont mises en avant par le mouvement des corps, parfois épileptique et parfois sensuel.Cette combinaison crée une expérience intense, émouvant et poignante.
DV8 Physical theatre John Grande Halle de la villette Lloyd Newson spectacle théâtre danse concours Paris affiche Andi Xhuma Ian Garside © photo by Laurent Philippe
 CONCOURS

Parce que nous aimons les spectacles forts et intenses, nous vous offrons des invitations pour la première du spectacle de John, le mercredi 9 décembre 2015.

Pour cela, rien de plus simple, remplissez le formulaire ci-dessous avant le 5 décembre 23h59. Et n’hésitez pas à nous laisser un commentaire sympathique (on aime beaucoup ça !)

Les gagnant(e)s seront tiré(e)s au sort parmi les inscrits. Ils recevront un mail leur confirmant leur lot : 2 places pour la représentation du mercredi 9 décembre 2015 à 20h  à  La Halle de la Villette (Paris).

Avant de vous inscrire, vérifiez bien que vous êtes libre le 9 !

DV8 Physical theatre John Grande Halle de la villette Lloyd Newson spectacle théâtre danse concours Paris affiche © Photo by Kris Rozental Visuel by Sophie Lavoiejpg

JOHN
Compagnie DV8 Physical Theatre
du 9 au 19 décembre 2015
Lundi, mardi, mercredi, vendredi et samedi à 20h, jeudi à 19h30

Grande Halle de la Villette
211, Avenue Jean Jaurès
75019 PARIS

Spectacle en anglais surtitré en français
Attention, le texte et certaines scènes peuvent heurter la sensibilité des plus jeunes. Conseillé à partir de 16 ans.

Pour des raisons artistiques, les retardataires ne sont pas acceptés sur ce spectacle

Création en partenariat avec le Théâtre de la Ville, la Biennale de la Danse de Lyon et le Festival d’automne à Paris

Concours JOHN DV8 Physical Theatre
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Plus de jeux concours
Concours Gratuits

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Un week-end sur deux au Théâtre Edgar : avis aux dépressifs du transat !

« C’est comment ici ?! Ah ! C’est comme en Ukraine mais avec la plage ! Bah, c’est à dire que si tu veux flinguer tes vacances, t’emmènes ton mec, ton ex et puis un môme ! » Julie, adorable organisatrice d’une semaine de vacances qui réunit Antoine, son ex (et père de son fiston, Jules) et son amoureux, Julien.

Si tu veux flinguer une soirée morose, t’emmènes ton mec, ton ex et ton môme voir cette pièce de théâtre ! Pour les enfants, en dessous de 10 ans, s’abstenir ! Vous n’êtes pas censé être dépressifs du transat.
Ce spectacle, c’est comme changer une couche. De la science-fiction !

Affiche spectacle Un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires comédie de jean franco et guillaume mélanie mise en scène Cédric Moreau au Théâtre Edgar Paris

Julien : « Tu sais pas t’occuper de ton fils ! […] Même changer une couche c’est de la science-fiction pour toi, c’est ça. Quand tu viens le chercher le week-end, on est obligé de te laisser un manuel d’utilisation. »

Et à mon tour, je suis obligée de vous laisser un manuel d’utilisation pour vous préparer à cette pièce qui se joue au Théâtre Edgar :

1. Ne pas se rendre en pantacourt vert kaki au théâtre.
Julien vous vannera : « C’est un peu comme les aisselles mal épilées sur une meuf, ça te nique toute envie ! »

2. Pour les spectateurs occupés à mourir tous les quarts d’heures – les hypocondriaques ; mâcher de la gomme à l’huile de cannabis pour traiter tout épanchement affectif.
Antoine : « Si je m’épanche trop, ça m’émeut physiquement et ça me provoque de la tachycardie ! Si je dis rien et que je garde les mots pour moi je n’ai qu’une angine. »

3. Offrir à la jolie Alexandra Chouraki, un dessin d’un ogre aquatique à la fin du spectacle.
Julie : « J’aimerais bien voir la gueule de ton bide, si tu avais été squatté par un ogre aquatique qu’on devait servir trois fois sinon il donnait des coups de pieds. »

4. A la question : « quel est le signe astrologique de Jules ? » posée par Julie, faites le cri du bélier (scène des « Olympiades du meilleur papa », soit 31 minutes après le début de la pièce).

Bébé Jules :
« Waaa » – pleure
« Moua » – tête le biberon
Antoine : « C’est inimaginable de chier comme cela, c’est inhumain » – chie
« Hahaha » – rit
« » – dors.

Jean Franco et Guillaume Mélanie
Jean Franco et Guillaume Mélanie

Antoine et Julien nous emmènent dans un conflit tendre. Vannes, situations fantasques, jeux de mots participent à nous attacher à ce duo à la colère tendre. La scène des « Olympiades du meilleur papa » est magistrale.

Antoine : « C’est sympa de jouer avec les Ceausescu, c’est chouette ! »

Le duo happe la scène. Nous n’avons yeux et oreilles que pour Antoine à la nonchalance hypocondriaque et pour Julien en costume de l’athlète Usain Bolt, avec le physique en moins, mais le verbe caustique en plus. Chacun a pour objectif d’être reconnu. Au fond, il s’agit là, de l’enjeu de la pièce.

Alexandra Chouraqui
Alexandra Chouraqui

Comment deux hommes que tout oppose se prennent de tendresse l’un pour l’autre ? Jules, l’enfant projette ses deux pères dans l’action : passer une semaine de vacances ensemble. Mais c’est bel et bien Julie, la mère, l’épouse et l’ex qui est le catalyseur de leur rencontre. J’aurais aimé que ce rôle soit plus étoffé à l’instar des deux personnages d’Antoine et de Julien. Mon enthousiasme s’effrite lorsque je revois Julie peiner à prendre une place sur scène. J’ai cherché tout au long de la pièce ce moment tendre subtil pour ce personnage mais je ne l’ai pas saisi. Le duo des deux hommes permet d’outrepasser ce manque, parce qu’on s’identifie pleinement à leurs doutes, leurs peines et leurs espérances. Exister ensemble !

Cette comédie brillamment interprétée par Jean Franco et Guillaume Mélanie est à savourer le temps d’une ou deux représentations (pour celles et ceux qui veulent en reprendre une tranche) au Théâtre Edgar jusqu’au 3 janvier 2016.

by La Baleine Quantique

Un Week-end sur deux
et la moitié des vacances scolaires

Texte : Jean Franco et Guillaume Mélanie
Mise en scène : Cédric Moreau
avec : Alexandra Chouraqui (Julie : mère & névrosée comme 99% de la population mondiale)
Jean Franco (Antoine : l’ex de Julie, hypocondriaque & petit)
Guillaume Mélanie (Julien : l’amoureux de Julie & grande chose manique)
Poupée (Jules : le nourrisson né un 31 mars 2015)

Théâtre Edgar
58 boulevard Edgar Quinet
75014 Paris

du mardi au samedi : en alternance 19h ou 21h
Dimanche : 17h30 (1 fois sur deux pour cause de garde parentale)

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L’être ou pas : Pierre Arditi et Daniel Russo s’interrogent avec humour sur l’identité juive au Théâtre Antoine

 L’être ou pas, au Théâtre Antoine à partir du 3 novembre 2015, dresse un véritable inventaire à la Prévert de ce qui constitue le judaïsme, ou plus précisément la judaïcité. Accrochez-vous, le programme est vaste !

Habitué aux réflexions sur l’identité juive, Jean-Claude Grumbert, s’interroge cette fois-ci sur la façon dont un type lambda, étranger à cette religion, aborderait la judaïcité. Poussé par son épouse accroc aux recherches sur Internet, l’homme va demander l’expertise de son voisin juif pour éclairer leur lanterne. Pas de bol, car si le voisin est bien juif, il est surtout athée ! La pièce, portée par Pierre Arditi et Daniel Russo, est constituée de scénettes où tout y passe. Des sujets les plus anodins (manger ou non du porc, faire shabbat, se couvrir la tête) aux situations les plus épineuses (les territoires occupés, l’antisémitisme, Auschwitz).

Photo by Pascal Victor
Photo by Pascal Victor

Une formule qui marche

Le duo fonctionne et pourtant, rien d’original là-dedans. Pierre Arditi joue le rôle qu’on lui connaît depuis vingt ans, détaché, un brun désabusé et souvent cynique. Quant à Daniel Russo, là encore, rien de très novateur. Il entre dans la peau du gars sympa et naïf, à la limite de la bêtise. Énervant mais attachant. C’est vu et revu et pourtant quand les lumières se rallument, on réclamerait bien un petit quart d’heure de rab’.

On s’imagine aisément être dans leur cage d’escalier et participer à la conversation. Jean-Claude Grumbert ne change pas son style d’un iota. Il joue sur les mots et utilise grammaire et doubles sens pour renforcer les effets comiques. C’est intelligent, cynique et spirituel ! Quelques notions sur la culture juive sont toutefois souhaitables pour apprécier les sous-entendus tout en finesse du texte.

Côté mise en scène, la sobriété des acteurs et les jolies lumières tamisées sauvent un décor minimaliste et peu crédible. Mais là, c’est vraiment pour être pointilleux. Bien entendu, il faudra se passer d’une définition claire de ce qui fait qu’un juif est juif. Soyons sérieux, on ne pouvait pas espérer résumer près de 3 000 ans de culture et d’histoire en une heure.

L’être ou pas

pièce de Jean-Claude Grumbert
mise en scène : Charles Tordjman
avec Pierre Arditi et Daniel Russo

Du mardi au vendredi à 19h
Succès : reprise le 3 novembre 2015 pour 30 représentations exceptionnelles !

Théâtre Antoine
17, boulevard de Strasbourg
75010 Paris

By Joël Clergiot

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De l’autre côté de la route : équilibre parfait pour pièce forte !

C’est l’une des belles découvertes de cette rentrée 2015 : De l’autre côté de la route de Clément Koch au Théâtre Michel.
Des vieilles dames irrévérencieuses et fourbes, une journaliste en recherche de réponses, une aide-soignante volubile, et un fil rouge “pâte de fruits” hilarant, le tout dans une ambiance de thriller : tensions, émotions et humour sont au programme.

Une intrigue journalistico-pharmaceutique

Dans une maison de retraite suisse, Eva Makovski, scientifique de renom, coule des jours paisibles usant de son caractère irascible sur le personnel et sa voisine de chambre. C’est sans compter la visite d’une journaliste qui souhaite mettre à jour un scandale pharmaceutique. Au fil de l’intrigue, les langues se délient et les tourments de chacun se révèlent.

De l'autre côté de la route théâtre michel humour enquête comédie avis critique Maaike Jansen Dany Laurent Laurence Pierre Maïmouna Gueye Gérard Maro photo by blog United States of Paris
Impossible d’en dire plus sur l’histoire sans dévoiler des scènes hautes en couleur et au risque de gâcher votre plaisir, et ce de l’introduction jusqu’au final.
Le décor unique renforce la dramaturgie de la mise en scène et la cohérence de l’histoire.
Les bons mots sont légions et les répliques acerbes fusent. C’est vrai que l’on pardonne facilement à des mamies de dire des horreurs.
Cette pièce est donc un vrai ping-pong féminin qui compte un seul homme au milieu de cette tourmente.
L’auteur, Clément Koch, livre une écriture moderne, avec un plume acérée et acide, sur un sujet moderne qui fait écho à des actualités médico-judiciaires de ces derniers mois.

Maaïke Jansen est parfaite dans le rôle de la scientifique bougonne et rentre dedans. Dany Laurent est surprenante en voisine de chambrée, un poil d’Alzheimer avec ses fixettes personnelles, mais qui garde la tête sur les épaules au bon moment.
Laurence Pierre campe une journaliste forte en caractère mais qui arrive malgré tout à tenir tête à Eva, la scientifique chevronnée.
Maymouna Gueye, l’infirmière/aide-soignante, a le rôle le plus gouailleur. On pourrait reprocher une certaine caricature dans l’écriture et la composition de ce personnage. Mais tenant le rôle de l’auguste dans cette pièce, le personnage est obligé de forcer le trait pour alléger les côtés sombres de l’histoire.
Gérard Maro, quant à lui, est droit dans son rôle de big boss pharmaceutique.

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L’écriture très fine de cette pièce laisse le spectateur toujours sur le fil du rasoir, oscillant constamment entre drame, humour et émotions.
Et si le sujet peut paraître anxiogène, au premier abord, on rit, on est ému et on vibre avec cette incroyable troupe. Toutes les émotions sont convoquées sans pour étant un zapping continu. Tout est extrêmement bien dosé.
Et c’est tout ce que l’on aime ressentir au théâtre : vibrer sans résistance !

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De l’autre côté du miroir

Du mercredi au samedi à 21h00
Le samedi à 16h30 & le dimanche à 16h45

Théâtre Michel
38, rue des Mathurins
75008 Paris

pièce de Clément Koch
Mise en scène : Didier Caron
assistante mise en scène : Bénédicte Bailby
avec : Maaïke Jansen, Laurence Pierre, Gérard Maro, Dany Laurent, Maymouna Gueye

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Danser à la Lughnasa au Théâtre de l’Atelier : beau casting pour un bal

Distribution parfaite et mise en scène délicate pour Danser à la Lughnasa au Théâtre de l’Atelier. Le metteur en scène Didier Long nous emmène à la rencontre d’une famille irlandaise qui nourrit en son coeur autant d’entre-aide, de difficultés à vivre que d’envies… de danser.

Il ne faut pas se tromper. Le résumé de la pièce ne laisse pas deviner que ce quintet de sœurs compose une partition tout à la fois légère, drôle, sous tension et énigmatique. Les secrets de famille apparaissent à mesure que le récit progresse. Aucune réelle gravité pourtant, mais pour 1936, les choses ne sont pas si simples à gérer dans une petite communauté en milieu rural.

photo Christophe Vootz
photo Christophe Vootz

La figure autoritaire interprétée par une Claire Nebout, surprenante de pudibonderie, tente de garder le semblant d’ordre de son cadre familial. C’est sans compter le retour de ce frère missionnaire en Afrique, cette sœur fille-mère et cette autre, originale, qui ne cherche que l’évasion.

Le conteur de ce récit est l’enfant unique de la famille, qui porte un regard rétrospectif sur ce cercle bancal qui l’a vu grandir. Âgé, le narrateur interprété par Philippe Nahon joue aussi les courts dialogues de son enfance, alors qu’il n’était âgé que de 7 ans, sans effet de voix. C’est brut, sans artifice et efficace.

photo Christophe Vootz
photo Christophe Vootz

Il se dégage de cette histoire un attachement réel pour chacune des soeurs Mundy que tout pourrait opposer. Maggie (excellente Florence Thomassin) provocante et légère, insuffle une bouffée d’air alors que sa soeur Chris (Lou de Laâge) se démène avec le père de son fils, Gerry, qui a pris de la distance et qui joue un numéro de charme troublant. Il semble qu’Agnès (Léna Breban) et Rose (Lola Naymark) n’aient en commun que le goût  de la couture tant leur caractère est bien distinct.
Le casting composé par Didier Long, actuel directeur du Théâtre de l’Atelier, est d’une justesse folle et nous révèle des comédiens à contre-emploi ainsi que des talents scéniques impressionnants de force.

Affiche Danser à la Lughnasa de Brian Friel avec Philippe Nahon Claire Nebout Florence Thomassin Léna Bréban Lou de Laâge mise en scène Didier Long théâtre de l ateier paris

Danser à la Lughnasa
de Brian Friel

du mardi au samedi à 21h
matinée le dimanche à 15h

au Théâtre de l’Atelier
1 place Charles Dullin
75018 PARIS

Mise en scène : Didier LONG
assisté de Jeoffrey BOURDENET

Avec : Lena BREBAN, Lou de LÂAGE, Philippe NAHON, Lola NAYMARK, Claire NEBOUT, Florence THOMASSIN, Bruno WOLKOWITCH, Alexandre ZAMBEAUX

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IRMA LA DOUCE : Nicole Croisille, elle est divine !

Avec Irma la Douce, le metteur en scène Nicolas Briançon nous transporte dans un coin de Paris au début du XXe siècle avec une vue imprenable sur le Sacré Coeur, le coude bien amarré au Bar des Inquiets. Une vraie réussite ! Mise en scène, tours de chant et décalage décoiffant sont les ingrédients de cette comédie musicale à l’affiche du Théâtre de la Porte Saint-Martin.

photo © Victor Pascal
photo © Victor Pascal

Le noir lui va si bien

L’éclat de ce spectacle n’est pas un jeune premier ou une mignonnette mais bien une valeur sûre de la scène. Nicole Croisille, incroyable patronne de bar qui connaît son petit monde comme si elle l’avait enfanté, nous apparaît dans un contre-emploi inouï. Bien sûr elle parle d’amour, comme dans les chansons qui ont fait son succès mais sa gouaille est d’un autre-temps, jubilatoire et effrontée.
Et qu’elle aguiche le premier rang, et qu’elle fume à son bar en commentant les amourettes d’Irma et de son Nestor. Nicolas Briançon a su voir au-delà des apparences de la Croisille. Un travail de maître d’autant qu’à l’origine, le rôle était celui d’un homme.

photo © Victor Pascal
photo © Victor Pascal

N’en oublions pas les amoureux. Marie-Julie Baup est une Irma aussi bien touchante qu’ingénie. Lorant Deutsch est enfin sorti de l’adolescence avec sa petite moustache et son costume de gars du milieu. Son filet de voix n’est pas aussi convaincant que celui de ses partenaires mais son jeu surpasse cette faiblesse.

A leurs côtés, une troupe qui lève la cuisse, change de personnages et de costumes, chante et brille au bon moment. Andy Cocq campe un travelo qui fait le tapin dans le même hôtel qu’Irma et Joyeuse, un bagnard plutôt futé. Une seule chanson lui suffit pour emporter le public. Un vrai show-man multi-talents qu’il ne faut pas quitter des yeux.
Total respect aussi à Claire Perot que nous avons tant aimé en Sally dans Cabaret (Folies Bergère et Théâtre Marigny) qui ose affronter la peur de tout comédien ou comédienne et artiste de théâtre : porter du vert sur scène.  La superstition, elle s’en moque brillamment chaque soir avec une robe d’un vert intense !

Le plus : les surtitres en anglais !
Idéal si vous avez un(e) ami(e) américain, anglais ou d’une tout autre nationalité de passage et que vous ne souhaitez pas l’accompagner au Moulin Rouge.

photo © Victor Pascal
photo © Victor Pascal

 

IRMA LA DOUCE

Une comédie musicale d’Alexandre Breffort
Mise en scène Nicolas Briançon
Assisté de Pierre-Alain Leleu
Musique Marguerite Monnot
Arrangements Gérard Daguerre
Avec Lorant Deutsch, Marie-Julie Baup, Nicole Croisille, Andy Cocq, Olivier Claverie, Fabrice de la Villehervé, Jacques Fontanel, Valentin Fruitier, Laurent Paolini, Claire Perot, Bryan Polach, Pierre Reggiani, Loris Verrecchia, Philippe Vieux.

au Théâtre de la Porte Saint-Martin
18 boulevard Saint-Martin
75010 PARIS

du mardi au vendredi à 20h
samedi à 17h et 20h45

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Phia Ménard et ses belles s’attaquent au carcan patriarcal – Interview !

Avec Belle d’Hier, la Compagnie Non Nova, menée par Phia Ménard, tente de se libérer du mythe du prince charmant. Sur scène, telles les désillusions des petites filles face aux hommes injustement tout puissants, les robes de bal se transforment en serpillières. C’est beau, parfois violent, souvent dérangeant. Le but est atteint. On ne sort jamais indemne d’un spectacle de Phia Ménard.

N’allez toutefois pas croire que la circassienne d’origine nantaise ne pense qu’à monter sur les barricades. Alors qu’elle mettait en place son spectacle, joué à partir de ce soir, et jusqu’au 9 octobre, au Théâtre de la Ville, nous en avons profité pour déjeuner avec elle. Maquillage léger et manucure parfaite, Phia Ménard affiche un large sourire devant son tiramisu, prend le temps et parle d’une voix douce. Interview.

Phia Menard artiste metteuse en scène compagnie non nova interview pour united states of paris blog photo Joel Clergiot

USofParis : Dans Belle d’hier, quelles sont vos revendications ?
Phia Ménard : La pièce est un peu un manifeste à elle toute seule. Dès notre enfance, on nous dit que les petites filles doivent être sauvées par des princes et que grâce à eux, elles seront encore plus des princesses. Cette idée est fausse. On se sauve soi-même et certainement pas avec un homme. Pour casser cette idée du pouvoir hétéro patriarcal, j’ai demandé à 5 femmes de ranger l’humanité. C’est à dire que je veux remettre tout à zéro. Et comme l’humanité n’a pas commencé il y a 2 000 ans, j’ai décidé de remonter cette remise à plat à partir de la sédentarisation de l’être humain.

Votre spectacle est parfois violent, vos propos sont très engagés. Et l’amour dans tout ça ?
On n’a jamais autant d’amour que par ses parents. Mais ça n’empêche pas de pouvoir rencontrer quelqu’un qu’on aime vraiment. Mais comment faire pour trouver l’amour dans des conditions où l’homme a le pouvoir juste parce qu’il est un homme ? Les premières victimes de la guerre, des violences sociales et des viols sont toujours les femmes. J’hypothèque alors toute notre société actuelle pour l’imaginer autrement.

Est-ce à dire qu’une femme est obligée d’être féministe ?
Elle n’est pas obligée, une femme se DOIT d’être féministe. On demande aux femmes de s’émanciper, mais ce sont les hommes qui doivent s’émanciper totalement de leur façon de voir le monde. On ne remet jamais en question la société, on joue aux dupes et les hommes gardent tous les pouvoirs. Ils ont toutefois des comptes à rendre. J’attends de Dieu qu’il mette une raclée aux hommes pour ce qu’ils font. A ce moment-là, je commencerai peut-être à croire en lui.

Vous semblez toujours très sérieuse, n’avez-vous jamais envie d’aborder des sujets plus légers, plus futiles ?
Je m’amuse, je ne suis pas dans un pays en guerre, je peux m’exprimer. On a tous une part de futilité. Je fais les boutiques, j’aime me faire masser, je ne suis pas en permanence sous tension ou revendicative. Seuls les fous furieux sont dans la revendication permanente et la stigmatisation par la peur. Je prends du plaisir dans et en dehors de mon travail. Il y a un business de la futilité, je ne souhaite pas en faire partie. Ça ne m’intéresse pas, je veux amener les gens à penser autrement sur la société. Mais je n’ai la prétention de changer le monde. Si l’art avait ce pouvoir, il l’aurait déjà fait depuis longtemps.

Qu’est-ce qui vous fait rire ?
Surement pas l’idiotie ! Je n’ai pas la télévision, mais ce que je connais de la téléréalité ne me fait absolument pas rire. Je ris beaucoup avec ma compagne, dans l’intimité. Nous rigolons de l’absurdité et à refaire le monde. J’aime quand le rire n’est pas recherché, contrairement aux spectacles de one-man show comme on voit souvent. Les clowns me font rire par exemple, car ils ont une totale liberté. Ils me surprennent en permanence et me dérangent là où d’autres ne le font pas.

Avez-vous envie d’intégrer d’autres disciplines du cirque dans vos créations ?
Dans le cirque, quand je crée, j’ai besoin de me poser la question sur ce qui est nécessaire dans l’espace dont je dispose. J’ai besoin que le spectateur s’identifie, et qu’il ne sublime pas le circassien. Le corps peut aller plus loin que ce qu’on imagine. On est alors impressionné par le jongleur. Ce sera en revanche difficile de s’identifier au trapéziste ou aux acrobates car c’est dangereux et très compliqué. Dans le jonglage, le rapport à la mort est inexistant.

Dans vos créations, vous utilisez des sons, des bruitages et très peu de musique. Pourquoi ?
Je ne veux pas que le spectateur soit amené là où j’ai envie qu’il aille. J’ai envie de lui laisser toute la liberté pour réfléchir. Quand je travaille l’élément sonore de la pièce, j’imagine ce qu’on entend dans l’image que je crée. Je déteste qu’un artiste me fasse avoir l’émotion qu’il veut que j’aie. Sinon je crie à l’arnaque. On oriente le spectateur. Je pense qu’on peut créer des émotions par d’autres moyens. Bien sûr, je suis tentée, comme tout artiste, de prendre de la musique. Mais je me dis qu’il faut que je travaille autrement et finalement, j’ai l’impression d’en utiliser quand même.

Le public parisien, et plus généralement français, est-il différent de celui des autres pays ?
Les spectateurs sont des spécialistes, où qu’ils soient. Notre société est culturelle. Partout dans le monde, nous avons un esprit critique et des références communes, ce qui fait que les spectateurs comprennent très bien ce que je fais.
Les Français, et plus particulièrement les parisiens, sont un public encore plus avertis. Les parisiens accordent une grande importance au théâtre dans lequel ils vont. Ici, on débat sur tout ce qu’on voit, tout le temps. Alors que dans certains pays, ce qu’on propose est vu avec plus de distance, on laisse passer ses émotions plus directement. En France, le théâtre est bourré de codes. Parfois, j’aimerais les transgresser.

Propos recueillis par Joël Clergiot

Affiche spectacle belle d hier mis en scène de Phia Ménard Jean-Luc Beaujault Compagnie Non Nova Théâtre de la Ville Paris 2015
Belle d’Hier
de Phia Ménard

Avec Isabelle Bats, Cécile Cozzolino, Géraldine Pochon, Marine Rostaing et Jeanne Vallauri

Du 3 au 9 octobre 2015

Théâtre de la Ville
2, place du Châtelet
75004 PARIS

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Oscar et la Dame Rose : une grande dame pour un magnifique texte

Aborder le sujet de la mort dans une pièce de théâtre est un pari risqué et encore plus quand il s’agit de parler de la fin de vie d’un enfant de 10 ans.
Mais avec Oscar et la dame Rose, Éric-Emmanuel Schmitt avait réussi à émouvoir le public avec cette histoire terrible tout en laissant une grande part d’espoir.

Plus de dix ans après l’adaptation de son roman sur les planches, c’est Judith Magre qui reprend le rôle de la conteuse. Du haut de ses 88 printemps, la comédienne – qu’on ne présente plus tant son parcours théâtral et cinématographique parle pour elle – donne corps et âme à cette Mamie Rose, qui sert de dernière confidente à Oscar, atteint d’une leucémie et sur le point de mourir.

Affiche-Oscar-et-la-Dame-Rose-pièce-de-Eric-Emmanuel-Schmitt-avec-Judith-Magre-mise-en-scène-Steve-Suissa-au-Théâtre-Rive-Gauche-ParisDans son monologue, où elle fait à la fois parler le jeune garçon et cette fameuse mamie, elle parvient à accrocher le spectateur par sa présence scénique et sa voix si singulière. Elle raconte avec beaucoup de justesse le texte de l’auteur. On ne s’ennuie pas avec elle. Moments de rire quand elle se met à la place du jeune garçon, qui, s’adressant tantôt à Dieu tantôt à Dame Rose, parle de son coup de cœur pour sa voisine de chambre d’hôpital, Peggy Blue. Ou quand il explique d’où viennent les surnoms des autres pensionnaires de l’hôpital pour enfants. Moments de rire également quand Judith Magre se glisse dans la peau Mamie Rose qui raconte qu’elle est une ancienne catcheuse et qui se confie sur les nombreuses adversaires aux noms improbables et à qui elle a eu à faire dans sa longue carrière sur le ring.

Mais aussi moments de tristesse et d’émotion quand il s’agit de parler de la mort, de la maladie et de comment accepter tout cela…
La profondeur que la comédienne donne aux personnages de cette histoire est inimitable. Elle nous fait aimer ce jeune Oscar, dont on écoute les confessions et les prières quotidiennes alors que ses jours sont comptés. Elle nous donne envie de connaître cette Mamie Rose que l’on aimerait nous aussi avoir pour confidente tant elle redonne de l’espoir là où il semblait perdu.

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Pour comprendre, le mieux est de se rendre au Théâtre Rive Gauche et de venir voir et écouter Judith Magre, cette grande dame qui, il est certain, vous fera passer un excellent moment de théâtre.

by Leïla Lamnaouer

Oscar et la dame Rose

pièce de Eric-Emmanuel Schmitt
mise en scène : Steve Suissa
avec Judith Magre

au Théâtre Rive Gauche
6, rue de la Gaité
75014 PARIS

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Hyacinthe et Rose de François Morel : tendresse à l’état pur ! #Bonplan inside

Roses, pâquerettes, digitales, dahlias, camélias, tulipes, marguerites… Il fleure bon entendre conter à nouveau François Morel avec ce texte original et de sa composition. Hyacinthe et Rose offre un moment délicat, une parenthèse enchantée en fin de journée au Théâtre de l’Atelier, qu’il ne faut surtout pas manquer.

Besoin d’un shoot de verdure ? Envie de renouer avec le souvenir de votre enfance et de vos grands-parents ? Papi Hyacynthe et mamie Rose ne peuvent que vous touchés. La preuve, nous n’avons pas résisté à verser une petite larme tant le texte touche, amuse. Une jolie poésie se dégage de ce duo que tout oppose.

HYANCINTHE ET ROSE pièce de et avec François Morel - Antoine Sahler Théâtre de l Atelier Paris PHOTO Manuelle Toussaint Starface

Hyacynthe & Rose est en fait le récit d’un des neuf petits-enfants de ces deux petits vieux qui ne semblent réellement unis que par l’entremise des fleurs. A la première personne, ce garçon revient sur ses tendres années marquées par la présence de ces deux caractères et ses étés passés en leur compagnie.
Tendre, cocasse, sensible, ce récit à une voix nous saisit à la volée, sans aucun effort de notre part, pour ne plus nous lâcher. Récit à un comédien mais avec une mise en musique, la création d’Antoine Sahler – qui semble n’avoir aucune limite pour la maitrise des instruments : piano, trompette, ukulélé, piano d’enfant…

Ce n’est donc plus tout à fait une lecture, même si le texte est bien posé sur la table devant laquelle le comédien prend place. Le ciel qui évolue en fond de scène et en fonction du temps, le gazon synthétique, participent à créer un cadre propice à l’envolée, à la remontée des souvenirs de ce jeune garçon et aux nôtres.

François Morel et Antoine Sahler pièce Hyacinthe et Rose au Théâtre de l Atelier photo by united states of paris blog
Cousins Fabrice et Jean-Pierre, cousine Cécile, la chatte Estafette, Tata Noémie, Diane la trottinette sont autant de personnages qui agrémentent ce conte joyeux sans oublier l’incroyable logorrhée de ce prêtre à l’exceptionnelle endurance. Jeux d’enfants, et clafoutis aux cerises font remonter en chacun de nous l’insouciance de nos jeunes années.

Hyacinthe et Rose
de François Morel
avec François Morel et Antoine Sahler

Du mardi au samedi à 19h00
Matinée le samedi à 17h00

Attention : samedi 10 octobre représentation à 16h00 uniquement

au Théâtre de l’Atelier
Place Dullin
75018 PARIS

jusqu’au 11 décembre 2015

Durée du spectacle : 1h10

BON PLAN !
OFFRE SPÉCIALE “RENTRÉE A L’ATELIER“:
Jusqu’au 18 octobre prochain, bénéficiez d’un tarif préférentiel (16,€10 la place) en réservant vos places PAR TÉLÉPHONE AU 01 46 06 49 24 et en mentionnant le code promotionnel “LAETITIA”.

Cette offre est valable sur toutes les pièces actuellement à l’affiche à l’Atelier, dans la limite des places et des catégories disponibles.

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